La Hongrie dit adieu au FMI

Le gouvernement conservateur hongrois dirigé par Viktor Orbán (photo ci-contre) a annoncé qu’il rembourserait avant la fin de l’année, avec un trimestre d’avance, la dernière tranche de 2,2 milliards d’euros du prêt de 20 milliards accordé par le FMI au gouvernement de la coalition socialiste-libérale en 2008. La Hongrie avait alors été le premier pays de l’Union européenne à obtenir un prêt du FMI. En 2011, après des négociations infructueuses entre le gouvernement du Fidesz et le FMI, la Hongrie avait décidé de ne pas renouveler ce prêt et de se débrouiller seule pour remonter la pente après la gestion désastreuse de ses prédécesseurs. Viktor Orbán avait ouvertement critiqué les conditions que le FMI voulait imposer à la Hongrie et il s’en était pris à l’institution internationale pour sa politique en Grèce, à Chypre et en Espagne. Aujourd’hui, la Hongrie a renoué avec une croissance modeste, le chômage y est en légère baisse, à 10,5%, et la Commission européenne a abandonné en juin sa procédure pour déficits excessifs puisque le déficit des finances publiques a été ramené par le gouvernement du Fidesz en dessous de la barre des 3% du PIB. Le FMI a d’ailleurs reconnu lui-même récemment que ses politiques menées de concert avec l’Union européenne avaient contribué à aggraver la situation dans les pays d’Europe qui ont eu recours à son « aide », notamment en Grèce.

Les résultats économiques positifs obtenus par le Fidesz en Hongrie devraient inciter les gouvernements européens à la réflexion plutôt qu’à la critique car ils ont été accompagné d’une baisse drastique de l’impôt sur le revenu ramené à 16% quel que soit le niveau de revenu (principe de l’impôt linéaire, non progressif), d’un allégement de la fiscalité sur les PME et de la mise en place d’une politique familiale de grande ampleur : allègements fiscaux importants dès le premier enfant, et dont l’importance s’accroît en proportion du nombre d’enfants quel que soit le niveau de revenus, et également de nombreuses aides financières et matérielles. Par ses mesures en faveur des familles introduites successivement depuis l’arrivée au pouvoir du Fidesz en 2010, le gouvernement conservateur hongrois souhaite réagir au désastre démographique auquel fait face le pays, avec un taux de fécondité de 1,21 enfant par femme en 2011 !

Pour compenser les pertes du budget, le Fidesz a accru la fiscalité de crise sur les grosses multinationales et notamment sur le secteur bancaire, le secteur des télécommunications, le secteur énergétique et la grande distribution. Le secteur bancaire en Hongrie, qui est aux mains des grandes banques internationales, est l’un des plus lourdement imposés en Europe. En dépit des cris d’alarme lancés par la gauche hongroise et européenne, la fuite des investisseurs n’a pas eu lieu après ces mesures de crise. Le constructeur automobile allemand Mercedes-Benz y a même inauguré une nouvelle usine l’année dernière, sa première nouvelle usine depuis 15 ans. La Hongrie se finance aujourd’hui seule sur les marchés et peut donc se payer le luxe de remercier le FMI et de lui faire savoir que son bureau de Budapest n’a plus lieu d’être.

Conscient que sa révolution fiscale et sa politique familiale ne peuvent être efficaces qu’en garantissant stabilité et visibilité sur le long terme, le Fidesz a mis à profit sa majorité des deux tiers au Parlement hongrois pour changer la constitution héritée du régime communiste et pour inscrire sa nouvelle fiscalité et ses mesures de soutien aux familles dans des lois « cardinales » rendues possibles par la nouvelle constitution, c’est-à-dire des lois qui ne pourront à l’avenir être amendées ou révoquées qu’à la majorité des deux tiers. Si c’est un des reproches faits à la Hongrie dans le « rapport Tavares » adopté début juillet par le Parlement européen (voir l’article), les premiers signes du redressement économique et même démographique sont déjà au rendez-vous. Les traités européens ne permettent de toute façon pas à l’Union européenne d’imposer aux États membres leur politique fiscale et familiale ni de leur dire quelles sont les lois qui nécessitent une majorité simple et quelles sont celles qui requièrent une majorité qualifiée des deux tiers. Les gesticulations d’eurodéputés qui cherchent à se rendre intéressants aux yeux de leurs électeurs et celles de commissaires européens qui se rêvent ministres d’un gouvernement fédéral n’y changeront rien.

À titre de comparaison, en Pologne, autre pays d’Europe centrale dont la transition du communisme à la démocratie et à l’économie de marché s’est faite de manière incomplète et qui fait donc face au même genre de difficultés que la Hongrie, le gouvernement polonais libéral de Donald Tusk, qui a pris récemment un virage libertaire pro-LGBT et fédéraliste vanté par les grands médias et les institutions de l’Union européenne, vient d’annoncer qu’il lui fallait accroître son déficit budgétaire 2013 de plus du tiers, et faire passer ainsi le déficit des finances publics cette année de 3,9% à 4,4% du PIB. Autre comparaison frappante : alors qu’en Pologne c’est désormais l’opposition conservatrice du PiS, dirigée par Jarosław Kaczyński, qui est en tête dans les sondages et que Donald Tusk est de plus en plus impopulaire, en Hongrie les enquêtes d’opinion donnent toujours au Fidesz une large avance sur tous les partis d’opposition. Le parti conservateur PiS se met même à croire à une majorité absolue au parlement polonais après les prochaines élections, ce qui n’est pas évident dans un pays où les élections législatives se font à la proportionnelle et où aucun parti n’a jamais obtenu la majorité absolue depuis la chute du communisme en 1990. Une telle majorité permettrait au PiS polonais de suivre la voie des réformes politiques et économiques engagées par le Fidesz hongrois. Et aussi d’enrager encore plus la gauche européenne post-soixante-huitarde (à l’Ouest) et post-communiste (à l’Est) et ses alliés.

Du même auteur :
> La Hongrie de Viktor Orbán pour exemple
> Pologne : la tragédie de Smolensk et le scénario hongrois (interview avec le député du PiS Antoni Macierewicz, président de la Commission parlementaire polonaise qui enquête sur le crash de l’avion du président Lech Kaczyński à Smolensk)

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28 Comments

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  • Bernard , 23 juillet 2013 @ 9 h 57 min

    Dire NON, c’est bien vrai mais INSUFFISANT ; Nous TOUS devrons à un moment donner lever nos gros c.. de nos chaises, quitter la TV qui nous enfume….. et AGIR enfin !
    Il y a 70 ans, ils se levèrent, décidèrent qu’il fallait s’opposer…. se révolter…. repousser l’adversaire ! C’était il y a 70 ans, ils n’avaient pas de TV, voiture, vacances, Iphone, Mobile, PC….. ; ils dialoguaient moins mais AGISSAIENT plus ces VRAIS Français…..
    Mais à présent………….

  • mabridge2 , 23 juillet 2013 @ 10 h 24 min

    Sincères félicitations car voilà un pays qui a su faire face à ses engagements. Il a su également faire face à l’immigration sauvage ce que n’ont pas faits ses collègues européens. Résultat : Ils s’en sortent !

  • Daniel , 23 juillet 2013 @ 10 h 30 min

    La même histoire que pour Jaroslaw Kaczynski le “nationaliste” , que les médias français de gauche avaient assimilé à un certain Roman Giertych (un article dans le Monde Diplomatique de Ignacio Ramonet traitant de l’ancienne alliance tripartite Droit et Justice PiS – Auto-Défense République Samoobrona – Ligue Familles Polonaises LPR)

    Et dire qu’à une certaine époque, avant d’entrer en IEP, mon ancienne prof de philo (militante communiste) m’avait conseillé la lecture du Monde Diplomatique ….

    A méditer….

  • Olizefly , 23 juillet 2013 @ 10 h 34 min

    Si elle était militante communiste, c’est qu’elle était plutôt nulle en philosophie. Philosophie = recherche de la sagesse. Elle, c’est la bêtise qu’elle avait trouvée. C’est curieux qu’à l’IEP ils emploient des profs incompétents dans leur domaine d’enseignement.

  • Olivier Bault , 23 juillet 2013 @ 11 h 02 min

    Pas que les médias de gauche. Arielle Thedrel du Figaro accompagne systématiquement le nom “Kaczyński” de l’adjectif “nationaliste” et aussi éventuellement “germanophobe” et/ou “russophobe”.
    En matière de propagande et de désinformation de ses lecteurs, cette dame fait aussi fort que les journalistes de gauche et d’extrême-gauche quand elle écrit des articles sur la Pologne.

  • Olivier Bault , 23 juillet 2013 @ 11 h 15 min

    D’ailleurs Le Figaro a fait circuler une citation déformée de Jarosław Kaczyński pour soutenir sa thèse selon laquelle ce serait un nationaliste germanophobe :
    “Merkel représente cette génération de politiciens allemands qui veulent reconstruire la puissance impériale de l’Allemagne. Un axe stratégique avec Moscou en est un élément et la Pologne ne peux constituer un obstacle. Notre pays doit donc être soumis, d’une façon ou d’une autre” (Polska Naszych Marzeń, 2011)”
    Comme on me sortait cette citation pour me prouver que Kaczyński est un nationalistem je me suis procuré ce livre pour en avoir le cœur net. La phrase citée existe bien (page 39 du livre) mais en fait il n’y est pas question de “puissance impériale” mais de “statut de puissance” (mocarstwowość). Pour la dernière phrase c’est écrit : “La Pologne, c’est-à-dire notre pays, doit être d’une certaine manière soumis.” (Polska, czyli nasz kraj musi być w jakiś sposób podporządkowany).

    Je ne sais pas si Le Figaro est à l’origine de la traduction déformée, mais en tout cas il l’a diffusée.

  • Daniel , 23 juillet 2013 @ 11 h 56 min

    “Diffamez, il en restera toujours quelque chose”, c’est exactement le mode opératoire de la désinformation.

    Quand bien même des médias alternatifs énonceraient la vérité, les médias meanstream continueraient leur désinformation. Un exemple récent flagrant sur l’emploi diffamatoire de l’expression “camp de concentration polonais” : cette fois – ci, c’est un ancien survivant polonais qui a déposé plainte contre ZDF (chaine télé allemande)

    En attendant, les médias alternatifs ont un joli avenir devant eux, tandis que les médias meanstream, en continuant leur bourrage de crâne, fusse t ‘il expliqué pour des raisons idéologiques ou paresse intellectuelle, perdent de plus en plus de lecteurs (des clients), dépendent de plus en plus des subventions, et donc de l’Etat et des politiques.

    Si bien que dorénavant, tout internaute, si bien informé des questions politiques en Europe Centrale, est aujourd’hui à même de publier des dépêches d’actualité dont le visionnage sur médias indépendants dépasse parfois largement celui d’une dépêche média meanstream.

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