Pour un alter-humanisme fondé sur l’image du Christ

Tribune de Cyril Brun* pour Nouvelles de France

Face aux crises à répétitions, la présidence française du G20 a décidé de mettre à l’ordre du jour du sommet de Cannes la régulation du système financier. C’est donc naturellement que l’Observatoire sociopolitique (OSP) du diocèse de Fréjus-Toulon, comme organe de réflexion et de proposition de l’Eglise du Var, a souhaité apporter sa contribution à cette initiative qui se tient à ses portes. Experte en humanité, l’Eglise a en effet toujours épousé la cause des plus démunis. Or, il se trouve que face à la situation actuelle, les plus démunis sont légions. Et il ne s’agit pas seulement de pauvreté financière, mais également d’errance morale et intellectuelle. Les plus grands spécialistes eux-mêmes sont embarrassés face à l’ampleur du phénomène. Toutefois, l’expertise de l’Eglise, pour promouvoir des pistes de recherche sérieuses et réalistes doit s’appuyer sur l’expertise de scientifiques. C’est dans cette optique que l’OSP réunit sur l’île de Lérins, sous la juridiction de l’évêque de Fréjus-Toulon, des économistes, des banquiers et des financiers catholiques. Fort de leurs travaux et de leurs apports, l’Observatoire proposera des axes de réflexions, à la lumière de l’Evangile et de la doctrine sociale de l’Eglise.

Cyril Brun

D’ores et déjà, nous pouvons dire que le but de ces deux jours insulaires n’est pas de proposer des solutions clefs en main, mais de mettre en reliefs les fondements profonds et authentiques de la crise à laquelle nous assistons. Crise de confiance des banques entre elles, crise de confiance des acteurs économiques vis-à-vis des banques, crise de confiance des banques et des populations vis-à-vis des Etats… Mais la confiance ne se perd pas sans raison. Au-delà de cette crise de confiance se trouve une crise plus grave, celle des fondements et des non-dits sur lesquels repose le système économique actuel. La question du contrôle des marchés et de leurs acteurs, celle de l’origine de l’argent, celle du rôle de la monnaie et des marchés, ne sont que quelques exemples parmi d’autres. Derrières ces problématiques se cachent des questions plus profondes encore, comme la place de l’homme dans l’économie, ou de l’économie au service de l’homme. Au fond, c’est une véritable question anthropologique et donc éthique qui se trouve à la racine de la crise actuelle. C’est toute une certaine conception de l’homme qui peu à peu s’est substitué à l’homme réel et qui aujourd’hui l’étouffe.


Il s’agit, à l’appel de Benoît XVI, de passer à l’économie du don, c’est-à-dire du service gratuit.

Le quartier d'affaire de Frankfurt (Oder)

Mettre en lumière les dysfonctionnements de notre économie, à la lumière de l’Evangile, et en rendre raison à nos concitoyens, comme saint Pierre nous demande de rendre compte de notre foi, telle est l’ambition de ce colloque… La sollicitude de l’Eglise pour le développement intégral de la personne humaine lui fait un devoir de discerner ce qui est bon et mauvais pour l’homme dans le monde et d’ainsi participer à la promotion du nouveau modèle économique qui tend à se mettre en place aujourd’hui.

Ce modèle doit mettre l’homme au sommet des préoccupations et faire du Bien Commun le véritable enjeu de l’économie de marché. Pour cela, une réforme profonde des marchés est nécessaire, mais plus encore une réforme de la vision que l’on a actuellement du marché et de la finance. Il s’agit, à l’appel de Benoît XVI, de passer à l’économie du don, c’est-à-dire du service gratuit. Entendons par là que même si le travail est rémunéré, il est d’abord un service rendu et mis à disposition du Bien Commun. Ce qui signifie que tout produit qui ne participe pas au Bien Commun, à savoir au développement intégral de tout l’homme et de tout homme, n’a pas de raison d’être. Il perd sa gratuité puisqu’il cherche en lui-même son propre intérêt.

A l’alter-mondialisme et à l’impasse actuelle il y a une alternative chrétienne qu’il faut promouvoir, l’alter-humanisme, fondé sur l’image du Christ.

* Cyril Brun est le directeur de l’Observatoire sociopolitique de Fréjus-Toulon.

A écouter :
> l’entretien audio avec Cyril Brun réalisé par Radio Vatican.

L’Observatoire sociopolitique (OSP) du diocèse de Fréjus-Toulon a été fondé en 2005 par Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon. Ses objectifs : apporter une voix chrétienne dans la cité, être un pôle de recherche dynamique et une force de proposition catholique au sein du monde contemporain. Apolitique et dépendant directement de l’évêque, il souhaite confronter la vision sociale, économique et politique de l’Église aux grands enjeux sociétaux, en constituant à la fois une plate-forme de dialogue et de réflexion, de formation et de diffusion de la Doctrine sociale de l’Eglise.

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2 Comments

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  • Pierre de Bellerive , 19 octobre 2011 @ 14 h 13 min

    Excellente analyse et tout à fait d’actualité.

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