Le Rideau de Fer de retour ou retourné ?

Quatre jours passés à Moscou ont un effet étrange. Le rideau de fer a certes disparu dans la manière de vivre. Le Goum, le grand magasin de la Place Rouge n’est plus celui que j’avais connu en 1988 avec ses files pour le sucre ou pour les pièces de téléviseurs à réparer. C’est un ensemble de commerces, avec les enseignes les plus prestigieuses de la planète, qu’on a plaisir à parcourir en raison de l’élégance de sa distribution. Mais dans le fond, le rideau de fer existe toujours. Il s’est inversé. Avant, il empêchait les ressortissants du bloc soviétique de s’évader de l’Empire, et bloquait les idées dangereuses et leurs porteurs à l’entrée. Aujourd’hui, il est érigé par l’ »Ouest ». Il interdit à un certain nombre de responsables russes de visiter des pays comme la France ou les Etats-Unis sous prétexte de sanctions, et c’est lui qui au nom de la pensée unique et du politiquement correct impose une ligne aux médias. Regarder France 24 en Russie est une leçon d’humilité. Après un reportage inquisitorial sur le droit à l’avortement assorti d’une interview d’un représentant du planning familial, destiné à condamner ceux qui osent la dissidence, qui ont le toupet de conseiller de laisser vivre l’enfant à naître, on a droit sur la Syrie à une présentation westernienne avec les bons, les rebelles, et les méchants, le régime. On écoute un représentant de la rébellion. On attend vainement l’avis d’un Syrien favorable au gouvernement légal, qui évidement n’a pas davantage droit à la parole. Un minimum de sens critique met alors mal à l’aise. Ce n’est pas de l’information, mais de la propagande, et ce « prêt-à-penser » vient de chez nous…

Hélène Carrère d’Encausse avait écrit deux ouvrages magistraux sur l’Union Soviétique : « l’Empire éclaté » et » le Pouvoir confisqué ». En intervenant lors d’un colloque organisé par » Rethinking Russia » sur la démocratie directe, je ne pouvais m’empêcher de penser que la situation actuelle de la France est bien celle d’un pays où le pouvoir a été confisqué par des groupes de pression et où la démocratie est éclatée en minorités et communautés diverses. Il n’a pas été possible d’instaurer un référendum d’initiative populaire réalisable. La Constitution n’a accepté en 2008 qu’une initiative partagée entre le Parlement et le peuple sur des sujets limités et sous le contrôle du Conseil Constitutionnel. Le million de manifestants contre l’aberration anthropologique du mariage unisexe n’a pas pu donner lieu à une consultation populaire. Le mouvement initié contre la loi El Khomry par quelques organisations syndicales politisées a, en revanche, fait reculer le gouvernement. Avons-nous des leçons à donner à un peuple qui adhère à 80% à la politique menée par son Président malgré la pression étrangère ? En France, c’est au contraire la part de la population qui refuse l’action présidentielle, ce produit incohérent de mesures néfastes et de blocages désastreux qu’a généré l’oligarchie des antichambres, des hauts fonctionnaires aux syndicats ultra-minoritaires en passant par les diverses confréries qui concourent à notre déclin.

Aussi bien à l’Université Lomonossov, où nous étions reçus, Ivan Blot et moi, par un groupe d’universitaires et d’étudiants que lors de la Conférence du MGIMO (Institut d’Etat des Relations Internationales), consacrée justement au 70ème anniversaire du discours de Churchill évoquant le rideau de fer, est apparu le sentiment d’une grande proximité de pensée avec nos interlocuteurs russes. La technocratie européenne méprise les identités des peuples. La fin du communisme a au contraire restauré l’affirmation de l’identité russe. De Gaulle disait que la Russie boirait le communisme comme le buvard boit l’encre. C’est fait. Cette identité russe ne gomme en rien la religion orthodoxe qui a joué un si grand rôle dans la construction du pays. Chez nous, la « République » efface l’identité nationale et la laïcité arrache rageusement les racines chrétiennes de la France. Le Président Vladimir Poutine incarne la volonté de cette grande nation de restaurer sa riche personnalité et de retrouver la place à laquelle elle a droit dans le monde. Comme nous avons été plusieurs à le souligner, il y a une grande proximité avec notre gaullisme.

Related Articles

5 Comments

Avarage Rating:
  • 0 / 10
  • HuGo , 21 mars 2016 @ 8 h 43 min

    Quoique que l’on puisse penser ou médire sur Poutine, de Gaulle, Gorbatchev ou Churchill…tous ces dirigeants, malgré certaines erreurs parfois, sont d’heureux phares !

  • eric-p , 21 mars 2016 @ 14 h 29 min

    On aimerait avoir un dirigeant de la trempe de Poutine pour remettre la France sur les rails.

    J’aimerai d’ailleurs qu’on fasse un vrai sondage indépendant sur la popularité de Poutine en France
    (je n’ai AUCUNE confiance aux sondages des instituts “mainstream”).

    Celà nous donnerait une idée du niveau d’endoctrinement de la population française…

  • Troy , 21 mars 2016 @ 16 h 08 min

    Malheureusement, la propagande officielle des médias fonctionne à plein régime, et ça marche ! Lors de conversations diverses et variées, pendant la pause du midi, avec mes collègues de travail, presque tous voient la Russie comme une dictature comme au temps de l’URSS, et Poutine comme le tyran absolu de la planète. Ils ne savent pas trop pourquoi, mais parce que les médias l’ont dit. J’essaie de leur dire que les médias leur mentent à longueur de journée mais ils ne me croient pas. L’un de ces idiots utiles m’a même sorti un jour que si Poutine était élu par 80% de son peuple, c’est parce que les Russes subissent des pressions, et sont envoyés en prison, ou pire, s’ils ne se rallient pas à ce tyran !
    Comment voulez-vous que ces gens là comprennent quelque chose à la géopolitique ? Ce sont de parfaits petits soldats du système, et ils revoteront Hollande avec le sourire…

  • rovigo , 22 mars 2016 @ 10 h 47 min

    Héléne Carrère d’Encausse n’avait rien compris à l’URSS, malgré son ascendance russe,elle en voyait la chute sous la rébellion des “républiques musulmanes d’Asie Centrale, on sait ce qu’il en a été! Il aurait mieux valu lire A. Amalrik, “l’Union Soviétique survivra-t-elle en 1984?”, assassiné en Espagne par un “accident” opportun, n’ayant jamais fait l’objet d’une enquête.
    Poutine semble être le dirigeant que souhaitent les russes, quel dirigeant souhaitent les français?

  • montecristo , 22 mars 2016 @ 18 h 14 min

    Monsieur Vanneste ! Pour UNE fois, je m’inscris en faux !

    Car, la comparaison avec les russes ne tient plus !
    Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes : Il ne peut plus y avoir de doute … nos dirigeants ont décidé de marcher en terrain découvert pour nous imposer “le Grand Remplacement ” !
    Cette fois, ils ne se cachent même plus. Ils savent trop bien que le peuple français a été préparé depuis des décennies dans cette éventualité et qu’il ne se révoltera pas !

    Or, c’est De Gaulle qui a donné le départ de la politique de destruction de la population par ses propres dirigeants.

    Tous les dirigeants qui ont suivi, n’ont fait que suivre cet exemple. Je ne détaillerai pas, il ne faut pas être un grand observateur de notre temps pour le constater.
    Hollande aujourd’hui ne fait que suivre l’exemple donné par “le Grand Visionnaire ” ! Comme les précédents…

    En conséquence , attendons nous à ce que vos enfants portent le voile et la djellaba, bientôt , si rien ne change radicalement

Comments are closed.