26 mars 1962 : 54 ans après

DES CENTAINES DE MORTS FRANÇAIS PAR DES BALLES FRANÇAISES
Nombre d’articles d’hommes libres et intimement blessés vont commémorer ce 26 mars 1962 où l’armée française tira sur la foule désarmée et pacifique à Alger, rue d’Isly. Ces pauvres gens voulaient montrer leur soutien aux habitants de Bab-el-Oued, leurs parents, leurs amis, leurs frères de désespoir. Ce quartier avait déjà été attaqué à l’arme lourde, par l’armée française (faisant plusieurs dizaines de victimes) et soumis à un blocus complet depuis plusieurs jours, car des membres de l’OAS y avaient trouvé refuge.
Des dizaines de morts, des centaines de blessés, hommes, femmes, enfants. Douze minutes de feu… un homme supplie « … Mon lieutenant, halte au feu… » Douze minutes de feu… Aujourd’hui encore le bilan officiel fait état d’une cinquantaine de morts et deux cents blessés. La réalité – de multiples témoins l’ont constatée dans les hôpitaux et cliniques – fut pire.

POURQUOI ? DE GAULLE, LE PIRE DES GAULOIS
Aujourd’hui, après cinquante-quatre ans, que reste-t-il de ce délire de feu et de sang ? Qu’en penser ? La réponse est simple. Elle tient en peu de lignes, comme la plupart des tragédies.
De Gaulle le dit lui-même à Christian Fouchet : « Souvenez-vous de l’Algérie et de la rue d’Isly. Là, j’ai osé [faire tirer] et je ne le regrette pas parce qu’il fallait montrer que l’armée n’était pas complice de la population algéroise . »
Seulement, cette phrase ne dit pas tout. Elle reste à la surface des décisions. Il faut aller plus loin. Il faut comprendre les mécanismes sous-jacents. Or on ne comprend rien à la politique de de Gaulle si l’on oublie que la haine fut le moteur profond de toutes ses décisions. Certes, il la cacha sous des appels à la grandeur, toujours figés en mépris hautain. Certes il fut servi par les événements du siècle. Certes il avait des ressources intellectuelles majeures et un sens politique développé (celui-là même qui manqua au général Giraud). Mais la haine le viciait, la haine le rongeait. Et pas n’importe quelle haine, mais une haine pathologique, irrémédiable, contre tout ce qui venait ou touchait à l’outre-mer.
On n’a pas encore osé dévoiler le côté maléfique de ce personnage. D’abord parce qu’il n’est pas habituel de sonder si profond sans une certaine expérience. Mais aussi car de Gaulle a su – rappelons l’intelligence des grands pervers – utiliser la lame de fond qui traverse la France depuis des siècles, héritage maléfique des tribus gauloises : la division, encore la division, toujours la division. Il n’est meilleur ennemi que la tribu voisine, surtout la tribu alliée.
Ainsi, le pire a voulu que son comportement, son attitude, ses décisions correspondent à ce que pensaient sans oser l’avouer l’immense majorité des Français de Métropole.
Or la haine obscurcit le jugement. Elle est le moteur des grandes vengeances où tous les risques, les dangers et les erreurs sont accumulées pourvu que son feu incessant soit alimenté. Nous en voyons chaque jour les conséquences.

UN POLITICIEN RETORS, UN GÉOPOLITICIEN À LA DÉRIVE
La plus grande faute stratégique de de Gaulle a été de sacrifier les liens politiques et géopolitiques qui unissaient la France et son emprise africaine. Que ces liens eussent pu être améliorés, aménagés, modulés au gré des temps nouveaux, cela ne fait aucun doute. Qu’ils aient pu être rompus, méprisés, trahis à ce point fut la grande faute stratégique. Le politicien naviguait, le géopoliticien coulait et menait le navire à sa perte.
Il était possible, il était nécessaire, en 1958, de relancer la France sur la scène internationale. La rébellion était écrasée en Algérie. Ce pays – des départements français – pouvait devenir le point d’ancrage, la tête de pont africaine de la France, nécessaire pour contrer les avancées aujourd’hui appelées islamistes qui avaient pu se faire jour, et qui perduraient dans les bases du Moyen-Orient. Le plan de Constantine, s’il n’avait été un leurre, aurait pu mener à la puissance.
Mais pour comprendre cela, il aurait fallu porter un regard lucide, dénué de haine sur cette extraordinaire spécificité du Maghreb (le Couchant, l’Ouest, en arabe). En 1958 il était temps de prendre appui sur le puissant amour des Européens pour la patrie française, sur la fidélité armée de l’immense majorité des musulmans (qui étaient légalement français, ce qui est trop souvent oublié) qui pratiquaient un islam tranquille, porté par ses marabouts (l’équivalent de nos saints), ses coutumes, ses relations constantes et bienveillantes avec la population dite « Pied-Noir » par le mépris métropolitain.
Oui, en 1958, il était temps de redonner une vraie grandeur à la France et des armes géopolitiques. C’était nécessaire et vital pour s’opposer à des menées hégémonistes qui avaient déjà levé le voile (rappelons-nous le coup d’arrêt donné par les USA à l’expédition vers l’Égypte de 1956).
C’eût même été la vraie puissance d’une France imposant une Europe puissante, et non ce conglomérat déliquescent de technocrates impuissants dont nous voyons chaque jour la dégradation.
Tout fut lâché, trahi, abîmé. Le résultat est sous nos yeux, incontestable, logique, mérité. Les menées islamistes avaient le champ libre.

AUJOURD’HUI… DEMAIN ?
La traditionnelle messe du 26 mars en mémoire des morts de la rue d’Isly n’aura pas lieu à Saint-Nicolas-du-Chardonnet (semaine sainte oblige). Une pensée n’est pas interdite.
Les balles de 1962 n’ont pas fini leur course. Elle tuent à Paris. Elles tueront encore. Les explosions de Bruxelles ne sont qu’un symbole de chair et de sang. Invasion et démographie feront le reste.
Quel sera l’avenir d’un peuple mené par la haine et la bêtise ? Quelle sera l’avenir d’une Europe des lâches. L’histoire répondra.

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39 Comments

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  • petitjean , 26 mars 2016 @ 19 h 37 min

    C’est une page noire de notre Histoire que cette décolonisation.

    dans son fort intérieur De Gaulle avait décidé de se séparer de l’Algérie
    c’était conforme à la marche de l’Histoire, ajoutons que nos “alliés” y étaient favorables !

    maintenant, pourquoi De Gaulle a-t-il dit : “je vous ai compris” à Alger, jamais nous ne le saurons. Aurait-il eu un élan romantique, saisi d’émotion par l’accueil qui lui fut réservé , J’ai des doutes, De Gaulle avait suffisamment le cuir épais après les tourments de la 2ème guerre mondiale.

    je comprends que les partisans de l’Algérie française soient encore en fureur contre De Gaulle et ne lui pardonneront jamais. Ce fut vécu comme une abominable trahison. Les atrocités qui suivirent, démontrent l’impréparation de la rupture entre la France et l’Algérie, de cela De Gaulle est responsable mais ses prédécesseurs aussi

    Je maintiens qu’il fallait se séparer de l’Algérie, cela aurait dû être préparé dès 1945. De Gaulle n’est arrivé qu’en 1958 et il était déjà trop tard.

    L’Histoire est tragique et certaines décisions, nécessaires, provoquent des drames et des ressentiments. L’Histoire en est pleine……………….

  • Hilarion , 26 mars 2016 @ 19 h 39 min

    Jusqu’en 1830 les côtes européennes de la Méditerranée étaient régulièrement ravagées par des pillards venus des côtes de ce qui ne s’appelait pas encore l’Algérie. Pillards et pirates, détruisaient les villages côtiers, s’emparaient des habitants comme ils s’emparaient des équipages des navires pris sur mer, pour les vendre sur l’un des plus connus des marchés aux esclaves, celui d’Alger. Sur des siècles ce sont ainsi plusieurs centaines de milliers d’européens chrétiens, hommes et femmes qui furent vendus comme esclaves ou rendus contre rançon lorsque la famille le pouvait.En 1830, afin de faire cesser ces exactions, le nettoyage de la mer se révélant insuffisant, il fut nécessaire d’investir militairement les côtes d’Afrique du Nord afin de couper les malfaiteurs de leurs bases de repli. A cette époque l’Algérie ne disposait d’aucune économie notamment agricole. Le peuplement par des européens que l’on appela “pieds noirs” se fit donc progressivement à partir de 1830, notamment des Espagnols. C’est cette population de pieds noirs qui développa une économie en Algérie. Plus généralement, il existe un excellent ouvrage intitulé “Esclaves chrétiens, maître musulmans” ouvrage de C.Davis professeur d’histoire à l’université d’état de l’Ohio qui a étudié l’histoire de l’esclavage dont les européens furent victimes. Sur trois siècles, il évalue à plus d’un million le nombre des victimes de ce trafic et explique comment fonctionnait ces marchés aux esclaves d’Alger, de Tripoli et de Tunis. Voilà un ouvrage qui a dû faire verser une larme à Mme Taubira.

  • Marino , 26 mars 2016 @ 19 h 47 min

    26 mars 1962 Alger Bab-el-oued la fusillade

    – Vous n’avez pas osé faire tirer.
    – J’aurais osé s’il l’avait fallu, ai-je répondu à De Gaulle, rue d’Isly j’ai osé et je ne le regrette pas,
    • Haut-commissaire en Algérie en mars 1962, Christian Fouchet semble reconnaître ici sa responsabilité directe dans la répression sanglante de la manifestation organisée à Alger le 26 mars 1962 en soutien avec la population de Bab-el-oued assiégée.
    Cette consigne est traduite par le commandement de la Xe région militaire aux soldats dirigeant le barrage de la rue d’Isly par : « Si les manifestants insistent, ouvrez le feu »

    NB : Les militaires qui ont tiré étaient des tirailleurs Algériens de l’armée Française, en majorité des musulmans fraichement recrutés…

    https://www.youtube.com/watch?v=YNfzTjQfrlE

  • Pacific , 26 mars 2016 @ 20 h 42 min

    L’expression “pied-noir” avait au départ un sens péjoratif ; ce sont les métropolitains qui désignaient ainsi les rapatriés d’Algérie. Puis ceux-ci se l’ont appropriée et l’expression a perdu au fil du temps son caractère péjoratif.
    A mon avis, le mot “rapatrié” est impropre pour désigner les Français d’Algérie. On est rapatrié chez soi, par exemple, après un accident survenu loin de son domicile.
    Or nombre de ces gens ne connurent la métropole que dans les livres de classes ou à l’occasion de leur service militaire ou pendant les périodes de guerre. Le mot “exilé” serait plus exact ; un exil sans retour..

  • peripathos , 27 mars 2016 @ 0 h 04 min

    petitjean

    arrêtez de nous jouer la chanson du pseudo-sage et vrai faux cul sur “l’histoire” ( avec un petit h svp ! ) .
    Dans une vision chrétienne ET rationnelle , réaliste , du monde , il n’y a AUCUN “sens de l’histoire” pré-écrit et les ACTEURS de cette histoire , notamment les dirigeants politiques restent PLEINEMENT responsables de leurs actes .
    L’histoire écrite dans les livres n’est que la résultante de millions d’histoires individuelles et son cours a souvent hésité et toujours dépendu de choix , de décisions et d’actions INDIVIDUELLES .

    Bref de gaulle n’est qu’un paltoquet et une grande gueule infatuée , un pantin mégalomaniaque avide de pouvoir .
    Le planqué de Londres aurait du rentrer dans une caserne en revenant en France

  • kazo , 27 mars 2016 @ 1 h 25 min

    “L’Algérie nous coûte plus qu’elle nous rapporte !” Ce fut l’ultime argument du “guide du peuple français”.
    Déjà, elle lui avait rapporté deux fois le pouvoir. Ensuite,
    quelle stupidité (il l’avait dit : “si nous étions assez lâches
    et stupides pour abandonner l’Algérie,..;”) ! Nous serions
    autosuffisants en pétrole et gaz et disposerions du plus
    riche territoire d’Afrique. Ce que nous coûtait l’Algérie était
    un formidable investissement économique et humain.
    L’Algérie produisant les fruits de cet investissement, les
    Arabes n’auraient pas eu besoin de venir en masse en
    métropole et nous, “pieds-noirs” avions cent ans d’expérience pour les “gérer” comme vous dites.
    C’est vrai que De Gaulle, comme un grand nombre d’hexagonaux, était raciste. Ironie de l’histoire, l’Algérie française perdue a donné une France sur le point de devenir algérienne.
    Enfin, avec l’argument du “coût”; pourquoi avoir conservé
    les DOM TOM qui sont des catastrophes budgétaires ?
    Pourquoi garder la Corse etc ? Idéal gaulliste, un territoire réduit à son quart le plus productif …

  • Maurice , 27 mars 2016 @ 7 h 38 min

    Avant 1830 il y a eu au moins une tentative de faire cesser les razzias et piratages en Méditerranéenne par les corsaires barbaresques, Louis XIV s’y est cassé les dents avec l’expédition de Djidjelli en 1661.
    Il y a eu des déportations d’opposants au régime en Algérie comme il y en a eu en Nouvelle-Calédonie. (merci de nous avoir rappelé l’origine de l’intervention en Algérie qui n’était pas un pays libre comme beaucoup voudraient que nous le croyions, mais un comptoir turque depuis que depuis 1530 un corsaire turc en avait pris possession – merci internet –)

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