La jurisprudence Benoît XVI

Si l’on se doutait que le travail théologique de Benoît XVI aurait un impact sur la doctrine chrétienne, on imagina moins, quand il renonça en février 2013, que le souverain pontife ferait aussi date en matière politique.

Juste un mois avant lui, le 28 janvier, la reine Beatrix des Pays-Bas avait annoncé qu’elle abdiquerait en faveur de son fils, ce que sa grand-mère et sa mère avaient fait avant elle. Sa décision semble n’avoir été motivée que par son âge de 75 ans. La date du 30 avril, fête de la reine et anniversaire de son accession au trône, donna l’éclat qu’il fallait à la passation. Certains commentateurs avaient relevé la concomitance des deux abdications, mais la tradition de la couronne néerlandaise empêchait d’y voir davantage qu’un hasard de calendrier.

Bien plus surprenant, le 25 juin 2013, l’émir du Qatar, le cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani, abdique en faveur de son fils, à cause de problèmes de santé. Il invoque alors « l’intérêt du pays et la prospérité de son peuple ».

“Il y a maintenant une « jurisprudence Benoît XVI » pour les têtes couronnées.”

Le 3 juillet, le roi Albert II de Belgique annonce à son tour son abdication en faveur de son fils. Il s’en explique dans ces termes : « Je constate que mon âge et ma santé ne me permettent plus d’exercer ma fonction comme je le voudrais. Ce serait manquer à mes devoirs et à ma conception de la fonction royale que de vouloir me maintenir en exercice à tout prix, sans être en mesure d’assumer pleinement mon rôle. » Là encore, la date retenue, le 21 juillet, est celle de la fête nationale belge.

Jusqu’à cet an de grâce 2013, les monarques n’abdiquaient que déchus, voire jamais pour certains, devaient-ils en mourir. Quant à invoquer l’âge ou la maladie, nul n’y songeait seulement. Il fallait tenir sa charge, quoi qu’il en coûte au pays.

La sage humilité de Benoît XVI a soudain ouvert une porte aux souverains. Il n’est désormais plus honteux de renoncer à sa couronne pour des raisons de santé. On le voit, les monarques se sont précipités à la suite du Saint-Père. Un tel nombre d’abdications en si peu de mois le prouve, après tant de siècles où il n’y en eut pas. Ce faisant, les dirigeants démissionnaires épargnent à leurs États les faiblesses et les délitements que causerait leur impotence.

Benoît XVI a peut-être donné la clé pour le maintien des dynasties dans les pays où il en reste : savoir partir à temps avec magnanimité, et transmettre ce que l’on a reçu. Il y a maintenant une « jurisprudence Benoît XVI » pour les têtes couronnées.

Related Articles

18 Comments

Avarage Rating:
  • 0 / 10
  • Pite , 10 juillet 2013 @ 17 h 12 min

    Je ne suis pas d’accord sur plusieurs points…
    1) si on prend l’exemple du roi des belges, qu’il reste en place ou qu’il abdique ça ne change pas grand chose à la vie des belges car aujourd’hui c’est un roi “décoratif” ce n’est pas lui qui fait avancer le pays…
    2) Pour Benoit XVI, je ne suis pas d’accord non plus : il n’avait pas à abdiquer…
    C’est prédécesseurs ont rempli leur fonction jusqu’au bout avec succès, c’est les médias et l’image projetée par ces derniers qui obligent aujourd’hui le monarque à abdiquer… Si on regarde l’ensemble de l’histoire de France ou de l’Eglise on voit que l’institution continuait à avancer malgré l’âge du monarque et je dirais même qu’il avait pour lui l’expérience et la sagesse. Mais notre monde moderne veut le zapping, le changement : on voit où ça mène…

  • Charles Ed Durand , 11 juillet 2013 @ 10 h 05 min

    Benoît XVI a déjà dit que l’Esprit-Saint s’était quelques fois trompé sur l’élection des papes… Pensons à certains Papes, de notre Sainte Mère l’Église, à la vie dissolue, mais qui cependant n’ont pas altéré ni modifié le dépôt de la Foi.
    Quand je lis ou entend les commentaires enthousiastes du cardinal Godfried Dannells et la joie du cardinal Roger Michael Mahony… et certaines prises de position favorables à la reconnaissance des mariages gay par certains éminentissimes voir de Mgr Pierro Marini qui lui en parle ouvertement sans précautions oratoires ni sans nuance alors oui avec Paul VI nous disons : il y a la fumée de Satan qui tourne autour de l’autel. Prions pour notre pape François qui est le vicaire du Christ, mais pas Notre-Seigneur Jésus-Christ. ”L’Évangile met en action Jésus, (le fils du Père) et personne d’autre” écrivit Graham Green dans son roman : La Puissance et la gloire. Il nous convie à le suivre. Alors marchons à la suite du Christ.

  • degabesatataouine , 11 juillet 2013 @ 13 h 34 min

    Il y a des fois,pas souvent,quand j’arrive à partager vos commentaires.

  • Faraway , 12 juillet 2013 @ 16 h 50 min

    Je ne dirais pas que le Roi des Belges est décoratif. Il a bel et bien un rôle a jouer sur la scène politique.
    Comme on a encore pu s’en rendre compte pendant les 540 jours que nous sommes resté sans gouvernement en Belgique.
    Le Roi avait fort à faire… Et sans doute n’a t’il pas envie de revivre cela l’année prochaine puisque c’est bien de ça qu’il s’agit : la crise politique à venir en 2014 dès le lendemain des législatives. :o)

Comments are closed.