Théorie du genre : Finkielkraut dénonce «une révolution culturelle en train de transformer notre démocratie en maison de redressement des vivants et des morts»

Ce 2 juin sur RCJ, la radio de la communauté juive, le professeur Alain Finkielkraut répond à la question : qu’est-ce que la théorie du genre ? Après l’avoir définie, il émet la critique suivante : dans sa version radicale, il y voit un nouveau marcionisme (du nom de ce théologien qui voulait rompre totalement avec l’Ancien Testament), une dérive déjà vécue à la Révolution française (et dont nous étions revenu avec la courant romantique), la confusion entre traditions et stéréotypes (car quid de la galanterie française), la négation des différences, une rééducation des enfants, un danger pour la neutralité de l’école, un rejet de toute la civilisation et notamment de la littérature et de la philosophie. Il fait un parallèle avec un autre délire du progressisme contemporain : le débat sur les prétendus droits des animaux (autre forme de marcionisme, qui aboutirait à traiter tout le monde de barbares, puisque carnivores). Extrait :

“Je voudrais commencer par dire que, s’il ne s’agissait dans le mariage pour tous, que de légaliser, d’officialiser, de normaliser les unions des couples homosexuels, nous n’aurions affaire qu’à une réforme sociétale. Nous pourrions l’approuver, ou au contraire lui trouver des défauts, mais ce serait finalement une histoire mineure. Il ne s’agit pas de cela. Un mouvement s’est mis en marche : une révolution culturelle, qui est en train de transformer notre démocratie en maison de redressement des vivants et des morts. La théorie du genre. Un fait a été mis en lumière par les sciences de l’homme : il n’est aucune humanité, aucune société, qui n’appartienne à une culture. Toutes nos manières de sentir et de percevoir témoignent d’une compréhension du monde préalable. Une tradition imprègne nos moeurs, anime nos manières de voir, de travailler, de sentir. Les théoriciens du genre s’appuient sur cette découverte des sciences humaines, pour radicaliser la proposition. Pour ces théoriciens et théoriciennes, il faut réduire la part du biologique. Tout est culturel. Le sexe est genre de part en part. Tout est culturel. En effet. Alors, je disais les sciences de l’homme. Mais les sciences de l’homme ont été précédées dans cette découverte par un grand mouvement de pensée, au début du XIXe siècle, en réaction à la Révolution française. Le romantisme. Qui a dit : il y a des traditions historiques, on ne peut pas, sauf à tomber dans les plus grands périls, vouloir construire un homme nouveau, nous venons de quelque part. Mais, précisément, le romantisme disait : ce qui est historique doit être respecté. Les théoriciens du genre disent : ce qui est historique doit être déconstruit, pour être remodelé. La théorie du genre nous précipite dans une sorte de constructivisme généralisé. Nous devons savoir que notre identité prétendument sexuelle (donc naturelle) est une identité culturelle. Dès lors elle est critiquable, elle est remédiable, elle est remodelable, et nous pouvons choisir l’identité que nous voulons. Être plus ou moins homme, plus ou moins femme, parce que les caractères qu’on attribue à l’un et à l’autre, précisément, sont arbitraires en tant qu’ils sont culturels…”

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27 Comments

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  • Luc Ruy , 12 juin 2013 @ 18 h 06 min

    Personne n’a de problème avec la vidéo ? Chez moi ce n’est pas la bonne qui s’affiche…

  • Luc Ruy , 12 juin 2013 @ 18 h 21 min

    Toutes mes excuses, c’était une extension de google chrome qui causait le problème.

  • M-Editer , 13 juin 2013 @ 10 h 08 min

    En savoir plus sur l’auteur : http://m-editer.izibookstore.com/aute… (Extrait de conférence publiée dans son intégralité aux Éditions M-Éditer)
    Si on peut interroger la distinction si problématique entre sexe et genre. Etre sexué implique-t-il un comportement genré, c’est-à-dire un comportement culturel qui poursuive les différences naturelles (biologiques, hormonales, etc.) ? Il faut d’abord faire un point sur les différences naturelles et sur leur poids : que savons-nous aujourd’hui de cela ; et malgré le caractère scientifique de nos savoirs, quelle part l’idéologie a dans ces questions? Etre genré, avoir un comportement féminin ou masculin, est-ce poursuivre l’impératif biologique en nous par des moyens culturels ou est-ce intérioriser des codes, c’est-à-dire faire sien par l’éducation des règles et des usages ?

  • François2 , 13 juin 2013 @ 10 h 27 min

    Si ce n’est pas un monstre, c’est une curiosité comme la femme à barbe. Autrefois il ou elle aurait eu sa place : une attraction à la foire.

  • M-Editer , 13 juin 2013 @ 10 h 45 min

    Le lien de ladite conférence : https://www.youtube.com/watch?v=2eH-xoFdpjU

  • emji , 13 juin 2013 @ 15 h 24 min

    On semble un peu trop obsédé par l’égalité en France, comme si c’était une valeur absolue applicable partout. En réalité ce n’est valable que dans certaines situations et pas dans d’autres. Pour prendre un exemple, lors d’un match de football, l’égalité ce serait le match nul, mais les supporters n’en veulent pas du match nul, ce qu’ils veulent c’est gagner. Et quand une équipe gagne et l’autre perd ce n’est plus l’égalité mais l’inégalité qui s’exprime. Et quand on a gagné que se passe-t-il ? on exulte, on fait la fête, on klaxonne dans les rues, et journalistes en viennent à écrire « qu’on nage dans le bonheur » ! Ces manifestations traduisent l’exaltation de l’inégalité finalement ! Dans ce cas de figure, c’est l’inégalité qui devient intéressante et non pas l’égalité ! Et puis je ferais remarquer que le progrès s’exprime fondamentalement par des dépassements, et quand il y a dépassants et dépassés, là non plus ce n’est plus l’égalité mais l’inégalité qui se manifeste, et qui devient intéressante si elle traduit un progrès. Vouloir imposer l’égalité, empêcher des dépassements, c’est bloquer le progrès finalement, on n’avance plus ; c’est ce qui s’est passé dans les pays communistes où on empêchait des gens doués et capables de s’épanouir, de devenir riches : résultat, tous les pays communistes européens se sont écroulés et ont disparu !
    Et c’est au nom de l’égalité que l’on veut effacer les différences entre l’homme et la femme, alors que les différences biologiques et génétiques sont pourtant évidentes. On n’a pas remarqué semble-t-il que l’avenir est à la diversité et non pas à l’uniformité. Je rappelle que les premières fleurs apparaissaient il y a 200 millions d’années à la fin du Trias, ce qui est relativement récent, si on ramenait l’âge de la Terre, 4.5 milliards d’années, à une année, les fleurs ne se manifesteraient qu’à partir de la mi-décembre ! Et maintenant avec le nombre étonnant de variétés qui se présentent, un jardin ayant de nombreuses espèces de fleurs différentes est manifestement plus intéressant et agréable à regarder qu’un jardin ne présentant que des fleurs identiques, ce qui serait plutôt monotone ! Et pour prendre un autre exemple, en quelques décades la diversification des produits de toutes sortes proposés aux acheteurs s’est amplifiée de façon spectaculaire dans les magasins, les grandes surfaces surtout.
    Finalement c’est une bonne chose que la femme se différencie de l’homme, c’est ce qui fait son charme !
    Quant à l’homme nouveau, il pourrait bien survenir en effet, précisément à cause de l’accroissement de la diversité, mais ce sera par la génétique et non pas par le culturel ou le social.

  • LUC+ , 14 juin 2013 @ 13 h 23 min

    Qui est ce ce FINKIELKRAUT ? D’ou parle t-il ? Quelles sont ses références ? Qui représente t-il ?

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