Grande-Bretagne : un miracle économique ?

Il y a tout juste un an, la coalition libérale-conservatrice dirigée par David Cameron essuyait de nombreuses attaques au sujet de sa politique économique jugée trop austère. Crédités de 12 à 15 points d’avance dans les sondages, les Travaillistes se voyaient déjà revenir aux affaires. Mais l’été 2013 semble avoir marqué un brutal renversement du paysage politique, l’avance des Travaillistes s’étant réduite à 4 petits points.

Les premiers résultats économiques de l’équipe en place n’y sont pas étrangers. Car depuis son arrivée en 2010, le jeune ministre de l’Échiquier George Osborne (39 ans à l’époque) n’a pas chômé pour remettre l’économie britannique sur les rails. Il est vrai que, malgré la violence de la crise outre-Manche (le PIB réel s’est contracté de 3,3 % entre 2007 et fin 2011), le pays s’appuie toujours sur l’inestimable héritage de Margareth Thatcher. Et plus qu’une série de réformes – réduction de la dépense publique, baisse des impôts directs, lutte contre l’hyper-inflation, flexibilisation du marché du travail, privatisations – l’ancien Premier ministre de Grande-Bretagne a légué à son peuple une vision de l’économie bien précieuse en ces temps de socialisme généralisé. « Un homme a le droit de travailler comme il veut, de dépenser ce qu’il gagne, de posséder sa propriété, d’avoir l’État pour serviteur et non pour maître. »

À la fin des années 1970, le Royaume-Uni est l’homme malade de l’Europe, rongé par la peste syndicale et le cancer étatiste. Thatcher décide de redessiner l’économie britannique. Dix ans plus tard, les résultats sont spectaculaires. Les syndicats qui refusaient les lois de l’économie et bloquaient toute réforme sont brisés. La dette publique qui atteignait 48% du PIB en 1980 est retombée à 32%. La croissance de la productivité dépasse 4% par an. Enfin, en 1993, le niveau des recettes publiques totales atteint un niveau historiquement bas à 36,5% (contre 42% en 1980).

Surtout, cette refondation fait entrer le pays dans plus de deux décennies de prospérité. Revenus au pouvoir en 1997, les Travaillistes se gardent bien de remettre en cause une politique génératrice de si bons résultats. Des relents socialisants réapparaissent néanmoins avec une progression de 48% des dépenses de protection sociale entre 1997 et 2007. Le niveau des recettes publiques totales progresse parallèlement de 4 points à 40,4% du PIB (10 points inférieurs à la France).

De 1980 à 2007, le PIB anglais en valeur réelle a quasiment doublé contre une hausse de 71% en France. En 2006, le taux de chômage britannique tourne autour de 5% contre 9% en France. Toutefois, le Gouvernement Blair se laisse griser par la croissance facile gonflée artificiellement par la hausse des prix de l‘immobilier, l’explosion de l’endettement des ménages – qui passe de 96% à 155% du revenu disponible brut entre 1997 et 2007 (il était resté quasi-stable depuis le début des années 1980) – et la croissance déraisonnée du secteur financier.

La crise des subprimes a raison de cette exubérance. La croissance britannique s’effondre nette, frappée de plein fouet par la faillite de son système bancaire. Mais le pays ne semble pas avoir totalement oublié les remèdes de la dame de fer.

Après les errements d’un retour raté au socialisme avec les années Brown (2007-2010) – garanties et nationalisations en cascade des banques, plans de relance (25 milliards de livres) – qui conduit à l’explosion du déficit public (supérieur à 12% du PIB en 2010), les Britanniques choisissent de renouer avec le Parti conservateur qui promet une politique d’austérité carabinée.

“Il n’y a aucun miracle, seulement de la sueur et des larmes !”

Afin de ramener le déficit public autour de 2% du PIB, George Osborne présente le 22 juin 2010 un plan radical sur quatre ans reposant avant tout sur la réduction de la dépense publique (85 milliards de livres) complétée par 28 milliards de hausses d’impôts. Il prévoit notamment un relèvement accéléré de l’âge de la retraite, la suppression de 500 000 emplois publics et des coupes d’en moyenne 25% dans presque tous les ministères (la Défense, la Santé et l’Éducation sont plus préservés). Surtout, ce plan repose sur une profonde réforme de la protection sociale britannique – qui absorbe 24% de la dépense publique en 2012 – avec la fusion de la majorité des allocations et leur plafonnement. La dernière revue budgétaire du gouvernement en 2013 estime ainsi les économies attendues à 22 milliards de livres par an en 2016.

Parallèlement, le Royaume-Uni fait le choix de renforcer sa compétitivité en réduisant son impôt sur les sociétés de 28% à 22% (20% pour les entreprises dont le résultat est inférieur à 300 000 livres) financé par une hausse de la TVA de 2,5 points à 20% et une nouvelle taxe sur les banques que les excès passés permettent de justifier.

Dans son souci constant de renforcer l’attractivité du pays, Osborne réduit en 2013 de 50% à 45% le taux d’imposition marginale sur les revenus (après une hausse de 10 points sous l’ère Brown) contrebalancé par une hausse des droits de transmission sur les logements luxueux. Le ministre de l’Échiquier assume ainsi une politique fiscale résolument compétitive.

Mais cette ligne de conduite n’est pas tenue sans difficulté et la faiblesse de la croissance britannique – marquée par une deuxième période récessive en 2012 – contraint le Gouvernement de Cameron à réduire ses ambitions sans pour autant renoncer à son plan initial. Sous l’effet de la crise prolongée, les moindres rentrées fiscales et les plus fortes dépenses sociales conduisent à un déficit public de 7,4% en 2012 et pousse la dette publique à 90% du PIB. La cible de déficit de 2% à l’horizon 2015 devient clairement intenable.

Pour autant, la réduction des dépenses publiques s’est bien réalisée. En 2013, l’Institute for Fiscal Studies révèle ainsi que la moitié de la consolidation budgétaire annoncée en 2010 a été menée et que 410 000 emplois publics ont déjà été supprimés. Les hausses d’impôts, la baisse des investissements publics et les réductions des allocations sociales ont été presque entièrement effectuées. En revanche, les coupes budgétaires sont loin d’être terminées avec un taux de réalisation de seulement 36 %.

Désormais, l’économie britannique semble relever la tête. Après une hausse de 0,3% du PIB au premier trimestre 2013 (quand la France affichait encore une contraction de 0,2%), la croissance s’est accélérée au deuxième trimestre atteignant + 0,7%. Et l’OCDE de rehausser de 0,8% à 1,5% sa prévision de croissance pour l’année 2013. Surtout, ce rebond est alimenté par une hausse de 1,7% de l’investissement (le meilleur des carburants) alors qu’il continue de contribuer négativement à la croissance en France (- 0,5%). Plus globalement, nombre d’indicateurs sont passés au vert (moral des patrons et des ménages ou indice PMI manufacturier) reflétant la confiance grandissante des agents économiques britanniques.

L’action courageuse de David Cameron n’explique pas tout. La Banque d’Angleterre joue un rôle actif avec sa politique monétaire ultra accommodante de taux bas et de création monétaire. En laissant filer quelque peu l’inflation (entre 3% et 5% depuis 2010), elle fait le choix d’alléger le fardeau de la dette (publique et privée) qui ampute la reprise. Mais elle devra aussi se montrer très prudente tant les effets indésirables d’une telle politique peuvent rapidement virer au cauchemar (accélération de l’inflation ou formation de nouvelles bulles).

La consolidation est encore fragile pour le Royaume-Uni. La dette publique représente plus de 90% du PIB. Le taux de chômage atteint encore 7,8 %. Surtout, les salaires réels ont reculé depuis 2008 et l’endettement des ménages reste élevé, détériorant le niveau de vie de nombreux Anglais. Mais leur choix de ne pas se réfugier dans le socialisme moribond de certains de leurs voisins permet d’espérer des lendemains meilleurs. À la destruction de l’esprit entrepreneurial, la hausse sans discernement des impôts, l’obésité étatique et le partage de la pauvreté, ils opposent la gestion rigoureuse des deniers publics, la compétitivité et la création de richesses. Il n’y a aucun miracle, seulement de la sueur et des larmes !

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23 Comments

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  • Bernard , 16 septembre 2013 @ 13 h 45 min

    VOICI le ” miracle français ” !!!! Qu’en pensez vous ??
    L’ancien ministre giscardien, Michel Poniatowski, écrivait dans son livre-testament une conclusion dont on ne voit pas quelle ligne on pourrait changer 21 ans plus tard.

    “Son âme, la France est en train de la perdre, non seulement à cause de la mondialisation, mais aussi, et surtout, à cause de la société à la fois pluriethnique et pluriculturelle que l’on s’acharne avec de fausses idées et de vrais mensonges, à lui imposer. Si cet essai a permis à quelques-uns de mesurer devant quels périls nous nous trouvons placés, il aura déjà atteint son but. (…) Ces pages peuvent apparaître cruelles. Mais elles correspondent à un sentiment très profond.

    Le moment est venu de traiter énergiquement le problème de l’immigration africaine et notamment musulmane. Si tel n’est pas le cas, la France aura deux visages : celui du «cher et vieux pays» et celui du campement avancé du tiers monde africain.

    Si nous désirons voir les choses dégénérer ainsi, il suffit de leur laisser suivre leur cours. Le campement africain toujours plus grand, plus vaste, plus illégal, grignotera d’abord, puis rongera, avant de faire disparaître tout entier le cher vieux pays, dont la défaite sera annoncée du haut des minarets de nos nombreuses mosquées.

    Nos temps sont assez graves pour ne pas faire appel à de médiocres facilités politiciennes. Nous allons vers des Saint-Barthélemy si l’immigration africaine n’est pas strictement contrôlée, limitée, réduite et expurgée de ses éléments négatifs et dangereux, si un effort d’intégration ne vient pas aussi compléter cette nécessaire répression. Les mesures à prendre sont sévères et il ne faudra pas que le vieux pays frémisse de réprobation chaque fois qu’un charter rapatriera des envahisseurs illégaux. Il faut donc ainsi que ce cher vieux pays restitue à l’état sa place normale. Les libéraux l’ont affaibli, les socialistes l’ont détruit. “Où sont les grandes tâches dévolues à l’État ? La Justice, l’Armée, l’Éducation nationale, la Sécurité, la Police, notre place en Europe ?

    En miettes. La France est à l’abandon, est en décomposition à travers le monde. Sa recomposition est dans un retour énergique à l’unité et à la cohérence, et de la Nation et de l’État.”

    “Si la vérité vous choque, faites en sorte qu’elle devienne acceptable, mais ne bâillonnez pas celui qui en dénonce l’absurdité, l’injustice ou l’horreur.”

    DEPUIS SI LONGTEMPS…..PERSONNE NE L A ECOUTE !!!!

  • SUPERBE!!! , 16 septembre 2013 @ 13 h 50 min

    Ca n’a strictement aucun rapport avec le sujet!
    Tu as lu l’article Bernard,ou tu fais un copier-coller de ton commentaire-type et tu le balances quel que soit le sujet de l’article? Faut te ressaisir Bernard,tu vas passer pour un maboul!

  • fendu du chichoule , 16 septembre 2013 @ 14 h 30 min

    Nous, nous sommes champion du monde du: ” regardez l’herbe est beaucoup plus verte chez les autres”, voyez cette économie formidable avec ces chiffres excellents. Tiens dans votre article vous ne donnez aucuns chiffres concernant une nouvelle taxe sur les banques que les excès passés permettent de justifier (excès passés! non mais sans déconner c’était une faillite que nos impots a renflouée et que nous continuons a payer). Ces memes banques qui sont en train de saigner la Gréce et qui ont voulues piller les comptes courant des Chypriotes, ect….
    Je me souviens de ce que disaient tout les journalistes libérales de l’Irlande au début des années 2000: Le tigre celtique; avec ces memes chiffres miraculeux… que c’était l’exemple à absolument suivre parce que nous, nous étions des nuls. Des chiffres, des chiffres et encor des chiffres pour les banquiers car la sueur et les larmes c’est pour les autres.

    Tiens, le gouvernement Cameron c’est lui qui a fait passer la loi du mariage homo.

  • pas dupe , 16 septembre 2013 @ 17 h 39 min

    Roumanie, Bulgarie: une citoyenneté européenne au rabais?

    Le 1er janvier 2014, fini les restrictions, la Roumanie et la Bulgarie intègreront l’espace Schengen. Au Royaume-Uni, on envisagerait une campagne de pub anti-UK pour décourager les potentiels migrants. Roumains et Bulgares ont déjà lancé la riposte…

    Entre 2012 et aujourd’hui, les Britanniques sont passés de « venez chez nous » à « restez chez vous »…

    En 2013, l’accueil n’est plus aussi chaleureux. Fin janvier, la presse britannique a révélé que le gouvernement envisagerait de diffuser une campagne de publicité négative pour dissuader les Roumains et les Bulgares d’immigrer en Grande-Bretagne…

    http://atelier.rfi.fr/profiles/blogs/roumains-bulgares-restez-chez-vous

  • Antoine , 16 septembre 2013 @ 18 h 23 min

    Il faut aussi rajouter que le Royaume – Uni est totalement libre de sa politique économique. Elle n’est pas encartée dans l’Union européenne qui fait faire de l’austérité à tout le monde alors que les résultats sont désastreux.
    En fait, je pense que le Premier ministre britannique a réussi à concilier austérité et relance, ce que nos gouvernants et technocrates européens n’ont pas compris.

  • SUPERBE!!! , 16 septembre 2013 @ 18 h 47 min

    Oui l’herbe est plus verte en Angleterre. C’est plus propre,plus sur,et il y a beaucoup moins (mais vraiment beaucoup,beaucoup moins) de clochards qu’en France,beaucoup moins de gens qui dorment dans la rue,et pas de bidonvilles comme il y en a maintenant autours de Paris.
    Sur le plan du dévellopement économique,la France,comparé á l’Angleterre,c’est un peu le tiers-monde.

  • fendu du chichoule , 16 septembre 2013 @ 21 h 26 min

    Sans commentaire

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