La Hongrie plus proche de la Russie

La signature par la Hongrie d’un accord avec la Russie il y a deux semaines pour l’extension de l’unique centrale nucléaire hongroise est-elle la confirmation d’un rapprochement stratégique entre la Hongrie de Viktor Orbán et la Russie de Vladimir Poutine ? Si le gouvernement hongrois affirme que l’offre du Russe Rosatom était meilleure que celle des autres concurrents en lice, parmi lesquels le Français Areva, il faut aussi dire que l’accord signé la semaine dernière entre les deux pays prévoit un crédit russe de 30 ans à des taux avantageux. Un crédit qui n’est pas conditionné à la mise en œuvre de politiques économiques néfastes définies à Bruxelles ou dans les bureaux du FMI.

Après le soutien apporté par la Hongrie au projet de gazoduc russe South Stream qui renforcera le monopole de Gazprom sur les marchés européens, le choix de la technologie russe pour le nucléaire hongrois est perçu par certains comme un rapprochement politique autant qu’un choix économique. Certains évoquent même la possibilité d’une annonce de la baisse du prix du gaz russe fourni à la Hongrie avant les élections législatives prévues pour avril et dénoncent une manœuvre politique du Fidesz pour lui permettre de gagner des voix supplémentaires. Si le parti de Viktor Orbán est largement en tête dans tous les sondages, il semble malgré tout avoir perdu une partie du soutien qui lui avait donné une majorité constitutionnelle aux élections de 2010. De son côté, la Russie est connue pour faire fluctuer les prix du gaz vendu par Gazprom en fonction de ses intérêts politiques. On peut par conséquent se demander si rendre la Hongrie encore plus dépendante de Moscou qu’elle ne l’est déjà pour ses approvisionnements énergétiques n’est pas malgré tout une grave erreur stratégique du premier ministre hongrois.

Mais il n’est pas impossible que le rapprochement avec la Russie soit aussi motivé par des considérations idéologiques. Tout semblait opposer au départ l’ancien dissident Viktor Orbán, dont le programme politique et économique est axé sur la décommunisation définitive et complète de son pays, à l’ancien officier du KGB Vladimir Poutine qui doit beaucoup à la présence de ses anciens collègues des services spéciaux à tous les postes clés du pouvoir politique et économique russe. Néanmoins, le virage ouvertement conservateur pris par la Russie après les dernières élections la rapproche incontestablement de la Hongrie de Viktor Orbán sans cesse attaquée par ses « amis » et alliés européens et par des institutions européennes dont la volonté d’ingérence est devenue totalement insupportable aux yeux d’une majorité de Hongrois.

La Hongrie, qui à l’arrivée du Fidesz au pouvoir en 2010 était dans un état proche de celui de la Grèce après des années de coalition entre socialistes et libéraux, a non seulement mis en œuvre par ses propres moyens, avec succès, des politiques économiques aux antipodes des remèdes imposés par l’Union européenne et le FMI, mais elle a aussi adopté une nouvelle constitution réaffirmant ses racines chrétiennes, le droit à la vie de la conception à la mort naturelle et la nature du mariage comme étant l’union d’un homme et d’une femme, ce qui lui a valu des critiques très violentes en Europe. Une Europe qui est même allée jusqu’à menacer la Hongrie de la priver de ses droits de vote dans les institutions européennes lorsqu’elle ne trouvait pas à son goût les lois adoptées par le parlement hongrois démocratiquement élu.

À l’inverse, la Russie brandit aujourd’hui l’étendard de la défense du christianisme. Outre la loi interdisant la propagande LGBT auprès des mineurs, la Russie a aussi introduit des sanctions contre les profanateurs d’églises et elle interdit désormais la publicité en faveur de l’avortement, même si l’avortement est une pratique si courante en Russie qu’il faudra sans doute attendre encore avant d’éventuelles restrictions quant aux conditions d’accès à l’IVG. Par ailleurs, Vladimir Poutine a violemment critiqué en décembre dans un discours devant le parlement russe la révision des normes morales et éthiques en cours dans de nombreux pays occidentaux. Et Viktor Orbán ne pouvait pas ne pas être d’accord avec le président russe quand celui-ci a cité les mots du philosophe orthodoxe Nicolas Berdiaev : « le conservatisme ne consiste pas à s’opposer à un mouvement en avant vers le haut, mais à un mouvement en arrière vers le bas ».

Le rapprochement russo-hongrois au détriment de l’indépendance énergétique de l’UE face à la Russie confirme ainsi la justesse de l’avertissement lancé par le numéro deux d’un autre grand parti conservateur d’Europe centrale, le Polonais Antoni Macierewicz du PiS de Kaczyński, que j’avais interviewé en mai dernier :

« Les critiques contre Viktor Orbán sont virulentes et c’est à mon avis totalement injustifié. Ses réformes qui visent à rendre la Hongrie réellement démocratique sont pourtant dans l’intérêt de l’UE. Par contre elles ne sont pas du goût des personnes qui voudraient créer un super-État européen, mais c’est la vision de ces personnes qui est déraisonnable, pas la politique d’Orbán. Ce sont ces personnes qui nuisent à l’unité de l’Europe et l’idée de créer un État européen ne peut se terminer que par une catastrophe. Il n’est pas dans l’intérêt de l’unité européenne d’attaquer au titre de convictions personnelles le Hongrois Viktor Orbán, pas plus que l’ancien président tchèque Vaclav Klaus ou notre défunt président Lech Kaczyński. Ces critiques sont motivées par l’intérêt politique à court terme des partisans d’un État fédéral européen. Elles ne sont pas motivées par l’intérêt commun de l’Union européenne et de ses membres. »

Par ses dérives totalitaires, la gauche européenne est en train de saborder elle-même cette Union qu’elle prétend pourtant vouloir renforcer.

Du même auteur :

>L’illusion russe (entretien avec le journaliste conservateur polonais Artur Dmochowski)
> Viktor Orbán : pour sauver l’Europe, il faut des politiques familiales courageuses, pas des politiques d’immigration
> Après la Hongrie, la Pologne ? Haro sur les conservateurs !

Photo : Ria Novosti.

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5 Comments

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  • V_Parlier , 30 janvier 2014 @ 13 h 21 min

    Une excellente présentation pour rappel, montrant que des pays souverainistes d’Europe peuvent très bien s’en sortir “à l’ancienne” et que tous ceux que l’UE prétend combattre ou éduquer pourront, dans quelques temps, nous donner d’utiles leçons.

    Il y a quelques années, déjà: http://www.pobudushego.ucoz.com/hg2011fr.htm

  • xtemps , 30 janvier 2014 @ 15 h 31 min

    Les Suisses peuvent déjà donné des leçons de morale à l’UE,la Hongrie à le droit de sortir de l’Union Européenne par l’article 50,comme tous les peuples Européens ont droit.

  • Marquais , 31 janvier 2014 @ 8 h 33 min

    L’Ukraine aurait tout intérêt à suivre ma même tendance. Aussi inattendu que cela puisse paraître, notre civilisation semble mieux protégée par Poutine que par l’Europe telle que nous la voyons évoluer !

  • johnDeuf , 31 janvier 2014 @ 22 h 00 min

    Ce sont les politiciens européens qui tuent l’Europe. Quand on voit un Ciotti s’attaquer à la manif du dimanche 2 au motif que la loi Taubira serait une loi de la République on peut s’inquiéter encore que j’ai commencé à m’inquiéter dès 1961. Il est ou inconscient et il ferait mieux de changer de métier, éboueur lui conseillerai-je, ou il est complice des marxistes qui coulent notre pays depuis quelques décennies.
    C’est la Liberté qui est étranglée plutôt égorgée. Pourquoi des élus dits de droite n’ont pas abrogé les lois Pléven et Gayssot qui ne servent qu’à détourner les Français des crimes contre l’humanité commis par les communistes. Pourquoi n’ont-ils pas tous voté contre la loi Taubira qui est encore une loi liberticide ?
    Pourquoi n’ont ils pas tous voté contre la loi soit disant pour l’Egalité homme femme ? Sont-ils complices ou ne réalisent ils pas que cette extrême gauche est en train d’instrumentaliser l’égalité (plutôt l’égalitarisme) pour égorger la Liberté ?
    Il était facile de demander à la franco marocaine ce qu’elle faisait pour l’égalité homme femme au Maroc ? Pourquoi n’a t elle pas signé la pétition contre l’impunité des violeurs qui s’accaparent ces filles mineures ?

    L’avenir de la France n’était pas l’Europe mais l’Afrique ( Eurafrique à la rigueur) ce que n’a pas compris de Gaulle et son clan d’affairistes.
    Aujourd’hui notre avenir c’est la Russie qui est riche en énergie et en minerais alors que l’Europe n’a aucune richesse.
    Ce sont des marxistes comme cohn Bendit qui en veulent à Orban d’imposer la démocratie en Hongrie alors qu’en France nous ne sommes plus depuis la 5 ème en démocratie avec le verrouillage par le scrutin uninominal majoritaire et le refus du réferendum d’initiative populaire au profit du quasi plébiscite gouvernemental.

    Orban me semble être un honnête homme, un bon père de famille en tout cas un homme sain de corps et d’esprit et pas corrompu comme nos politicards.
    Les ukrainiens doivent se débarrasser de leurs dirigeants actuels mais ils feraient mieux de réfléchir ensuite quant à leur association avec l’Europe, pourvu qu’ils consultent Kaczynski dès son retour au pouvoir.
    Une union avec la Russie serait de loin nécessaire voire indispensable face aux ensembles qui se constituent mais il faut en finir avec toutes ces idéologies malsaines et corrompues véhiculées par ces marxistes corrompus qui veulent détruire la société libérale et son pilier la famille.

  • hermeneias , 1 février 2014 @ 8 h 19 min

    johnDeuf

    Marxistes ? Ils sont pires ! Sans foi ni loi , vendus , achetés , maqués( des frangins-macons ) , prostitués .

    Alors complices vous pensez ? Avec une telle persévérance dans l’erreur …..!

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