Gesté : dernier acte !

Gesté est une petite ville de 2600 habitants située dans le Maine-et-Loire.
(Crédit : Wikimédia)

PATRIMOINE – À Gesté (2 600 habitants), la mobilisation continue pour empêcher la destruction de l’église St-Pierre-aux-liens. Sur le terrain de nombreuses associations de défense se relaient pour empêcher la destruction.

Dernière initiative en date, une manifestation organisée dimanche 25 août par le collectif St Jacques d’Abbeville et par le Souvenir Chouan de Bretagne :

“Le collectif St Jacques d’Abbeville et le Souvenir Chouan de Bretagne vous invitent à manifester votre opposition à la destruction illégale de l’église St Pierre, le dimanche 25 Aout à 12 h 30. »

Ci-dessous le reportage vidéo du Courrier de l’ouest :

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=j6Qpf1cXC2o]

M. Jean-Pierre Léger
9, Place Monseigneur Dupont – BP 9
49600   GESTÉ
France

Tandis que la démolition a repris, comme prévu (les vitraux sont en train d’être démontés depuis le 30 juillet), les organisateurs proposent aussi d’écrire au maire une lettre de protestation. Ils suggèrent encore de venir visiter l’église afin de rappeler au maire qu’il doit “entretenir son église au même titre que son terrain de football et accessoirement obéir comme les autres à la loi » .

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Pourquoi garder les églises construites au XIXe siècle ?

Dans la lettre d’information n012 de la mairie de Gesté sur le projet de démolition, on peut retrouver les arguments ordinairement utilisés pour chaque destruction d’église (par exemple par la mairie d’Abbeville, ou même parfois dans les commentaires de Nouvelles de France) :

Ainsi que préfère-t-on ? Une église non classée dont la taille est sans rapport avec le nombre d’habitants et la pratique religieuse, dont les coûts de restauration et d’entretien sont prohibitifs ? […]

Que répondre à ces arguments ?

“L’architecture du XIXe, c’est moche et c’est fragile !”

C’est là l’un des arguments les plus utilisé pour justifier les démolitions. “Faux vieux” (expression de la mairie de Gesté), “rien de plus laid” (commentaires), etc. Pourtant, comme le note Jean-Michel Leniaud, directeur de l’école des Chartes et spécialiste reconnu de l’architecture religieuse du XIXe, on ne peut considérer “les édifices religieux du XIXe siècle comme des pastiches dépourvus d’art et de sincérité, car cela conduit à négliger l’une des inspirations majeures des artistes d’alors, le sentiment national, dont l’affirmation progressive marque le siècle tout entier” Note 1.

Il faut en outre noter que l’une des régions les plus touchées par les destructions est l’Anjou, et plus particulièrement les Mauges, à savoir un des territoires de la Vendée militaire, très touchés par les persécutions anti-catholiques lors de la révolution Note 2.  C’est ce qui explique que la plupart des églises de la région furent reconstruites dans les années 1840-1890.

Guy Massin le Goff

Quant à la supposée fragilité des édifices, elle tient en général plutôt à l’absence d’entretien : après la loi de séparation, lorsqu’ils étaient encore peu anciens ; pendant l’entre-deux-guerres, où seuls les édifices des XVe et XVIe commençaient à être entretenus ; encore de nos jours où, comme le note Guy Massin Le Goff, conservateur départemental des antiquités et objets d’art du Maine-et-Loire et fondateur d’Europa Thesauri, l’association européenne de conservateurs de trésors ecclésiastiques, “le principe de la restauration d’un édifice religieux du XIXe siècle n’est pas encore né quand, à la fin des années soixante, les conséquences de la mauvaise interprétation de la réforme conciliaire conduisent allègrement à la démolition du mobilier liturgique créé à l’époque de la construction et donc en harmonie avec l’architecture.”  Note 3

 

La nouvelle architecture envisagée est-elle réellement plus belle que celle qui avait été imaginée entre autres par l’architecte Tessier, incontournable en Anjou ?
“C’est trop cher de les entretenir ces églises !”

La mairie de Gesté n’affirme-t-elle pas, dans le but de justifier son empressement à détruire avoir de nombreux autres projets coûteux pour Gesté ? De plus, on l’a déjà vu (voir nos précédents articles), les coûts de réparation sont fréquemment surévalués, et cela semble avoir été le cas à Gesté (le délabrement supposé de l’église étant d’ailleurs tout relatif).

“Quel intérêt y a-t-il à conserver des édifices sans rapport avec le nombre de pratiquants des paroisses ?”

Et si le regard évoluait ?

“Pour conforter les projets de destruction d’une église, les mêmes arguments reviennent comme une serinette Moins de prêtres, moins de messes, moins de pratiquants, donc moins de nécessité de conserver de grands vaisseaux lorsqu’une chapelle suffit. C’est là une vision très réductrice de la pratique religieuse. Tout d’abord, nul n’aurait pu prévoir il y a cinquante ans la grande crise de vocations sacerdotales que connaît l’Église depuis trois décennies et personne ne peut prédire ce que sera la vie religieuse dans cinquante ans. D’autre part, limiter l’usage de l’église à la messe, dominicale ou quotidienne, est une présentation erronée même si elle est étendue aux cérémonies de baptême, mariage et enterrement. Une église n’est pas un lieu ouvert uniquement pour l’eucharistie ; les prières individuelles des fidèles, les cierges offerts, les multiples raisons de pousser la porte de l’église, seul ou par petits groupes, en témoignent. 

Qu’on en juge par le succès de la politique des « églises accueillantes » ouvertes, nettoyées et fleuries qui sont autant de haltes touristiques ou ferventes confortées par des textes explicatifs sur l’histoire de l’édifice et ses principales qualités artistiques. C’est là que l’on comprend qu’une église porte toute l’histoire d’une communauté humaine qui s’est organisée autour d’elle. L’anéantir c’est détruire tout un passé, et que serait un village sans son église ? C’est à cette question que répond le conseil général du Maine-et-Loire en proposant ses nouvelles dispositions d’aide à la restauration spécifique pour les églises non protégées au titre des Monuments historiques [NDLR : Dont Gesté aurait vraisemblablement pu profiter, eut égard à la qualité architecturale plusieurs fois reconnue du bâtiment].

Au-delà de l’exemple du Maine-et-Loire, c’est toute une approche nationale, voire européenne, qui doit se mettre en marche en encourageant les défenseurs de ce patrimoine à se manifester, en aidant ceux qui apprécient l’architecture du XIXe siècle à se faire entendre en dépit des critiques qui peuvent sourdre ici et là. Nous avons à comprendre et à défendre une véritable architecture et les œuvres d’art qui l’accompagnent, expressions de notre histoire et du génie humain.”

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Guy Massin Le Goff, « La polémique autour de la démolition des églises : le cas du Maine-et-Loire », In Situ [En ligne], 12 | 2009, mis en ligne le 03 novembre 2009, consulté le 25 août 2013. URL : http://insitu.revues.org/5563 ; DOI : 10.4000/insitu.5563

 

Notes & références

Note 1 Jean-Michel Leniaud. Vingt siècles d’architecture, CNDP, 2007

Note 2 C’est ce qui faisait dire à l’abbé de Bellefontaine, Dom Sortais, “Les jeunes églises des Mauges sont un témoignage de vitalité chrétienne. Si la Vendée angevine n’a plus d’anciens sanctuaires, c’est que ses fils ont lutté pour les défendre.” (Revue du Souvenir Vendéen, Noël 1954). On consultera avantageusement à ce propos l’article de l’association Mémoire Vivante du Patrimoine Gestois (M.V.P.G.) sur l’histoire de l’église St-Pierre-aux-liens.

Note 3 Guy Massin Le Goff, « La polémique autour de la démolition des églises : le cas du Maine-et-Loire », In Situ [En ligne], 12 | 2009, mis en ligne le 03 novembre 2009, consulté le 25 août 2013. URL : http://insitu.revues.org/5563 ; DOI : 10.4000/insitu.5563

Autres articles

Le projet de la mairie

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Nous vous rappelons l’existence de deux pétitions pour empêcher la destruction de l’église de Gesté :

  1. La pétition de l’association locale Mémoire Vivante du Patrimoine Gestois (M.V.P.G.), adressée à Madame le ministre de la culture, Aurélie Filippetti ;
  2. La pétition de l’association Patrimoine-Environnementlancée en décembre 2012, et adressée à Mgr Delmas, évêque d’Angers, qui s’est refusé à agir.

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19 Comments

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  • 0 / 10
  • xrayzoulou , 27 août 2013 @ 19 h 31 min

    Si vous faites une pétition, je la signe des deux mains, je trouve malheureux de détruire une maison de DIEU (quand d’un autre côté on fait des mosquées : allez faire une église dans un pays arabe !)

  • Pierre-A , 27 août 2013 @ 20 h 55 min

    Loin de moi l’envie de critiquer cet écrit. Seulement, pour moi c’est aux habitants des communes concernées de s’impliquer d’avantage; A défaut d’aller à la messe, il faut prendre le temps de se renseigner sur ce qu’il se trame dans sa communauté (j’entends au niveau local) et prendre les devants. Dans l’exemple de Gesté (qui d’ailleurs est tout a fait représentatif) l’église est déjà en cours de destruction et les manifs arrivent après.
    Il n’y a pas eu de projet au conseil municipal? Et combien y a t-il de manifestants prêt a donner un peu de temps pour ce patrimoine? Les pétitions d’enjeux national ne suffisent pas, regardez autour de chez vous et impliquez vous, c’est le seul moyen de faire basculer la tendance

  • mariedefrance , 27 août 2013 @ 21 h 33 min

    Demain, j’écrirai à ce maire…

  • JOUNO , 27 août 2013 @ 22 h 53 min

    Je vais écrire aussi à ce maire infâme d’Abbeville, où je suis né…

  • john Deuf , 27 août 2013 @ 23 h 05 min

    Pourquoi détruire les Eglises pour y reconstruire des sortes d’hangars ?
    N’est ce pas parce que cela va permettre à un copain de travailler et de faire son beurre sur le dos des contribuables locaux et nationaux ( subventions) ?

  • NEMAPPELEZPLUSJAMAISFRANCE , 28 août 2013 @ 0 h 13 min

    Il faut toujours mettre hors d’état de nuire les assassins. Il en est ainsi des assassins d’églises qui s’arrogent le droit de vie ou de mort car ils se jugent les seuls en droit à exercer leur pouvoir sur le monde et les choses.

    Dieu fait Homme? Nous ne connaissons que le Christ.

    Mais monsieur le maire de Gesté qui n’aime que les odeurs de béton est incapable de ressentir dans les pierres de son église du XIXème siècle son âme et encore moins l’âme des ancêtres et anciens qui, au nom de leur foi et en l’honneur du Bon Dieu, ont tout donné pour la construction de cet édifice béni, maison de Dieu.

    Ce personnage, dont l’honneur semble-t-il fait défaut à l’endroit de l’héritage qui lui a été provisoirement confié, trahit la mémoire de ces Chouans qui ont, dans l’honneur et le courage, sacrifiés leur vie pour défendre l’Honneur de Notre Seigneur et dont les vitraux de cette église retraçait leur épopée et leur martyr.

    En détruisant cette église, le maire salarié en CDD commet un “crime de Mémoire” que LA JUSTICE un jour devra prendre en compte.

    Quelle honte pour ce responsable de passage de se comporter en “inquisiteur” condamnant au supplice de la pelleteuse la Foi et l’âme de ses sujets citoyens par la destruction de leur Maison Commune toute chargée de leur Histoire et de celle de leurs défunts.

    Un résistance farouche doit se mettre en place car nombres d’églises sont menacées de la sorte et la mollesse des évêchés à s’opposer à ces décisions de destruction est toute aussi criminelle laissant seules les associations se dépatouiller.

    Allons, réagissons, réagissez! N’attendez pas que le paysage se transforme car la Foi ne résistera pas au béton ni à une architecture moderne plus que douteuse alors que les mosquées qui se construisent ressemblent, elles, à des mosquées lesquelles, au train où vont les choses, remplaceront les symboles et témoignages de notre histoire c’est à dire nos églises.

    Je vous invite à lire le commentaire paru sous ce même titre “nemappalezplusjamaisfrance”, titre un peu long mais qui en dit long, dans Nouvelles de France du 17/08/2013, dans la rubrique “les députés mal payés” pour prendre conscience plus à fond du désastre programmé.

    A l’exemple de notre Sainte patronne secondaire de la France, JEANNE D’ARC, “Les hommes d’armes batailleront et Dieu donnera la Victoire”, ainsi engageons nous, bataillons et Dieu nous guidera à la Victoire.

  • MEYER , 28 août 2013 @ 8 h 38 min

    De quand date la mairie de Gesté ? Son année de ‘fabrication’ ? – En quel état architectural est-elle ? – N’y a-t-il pas lieu de la considérer, elle aussi, comme ‘moche’ et ‘vétuste’ ? – Alors, amis de Gesté : prenez vos pioches et vos bulldozers et détruisez-nous ce nid d’imbéciles incultes dans les 2 sens du terme

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