La nouvelle Île de France (5)

par Pierre-François Ghisoni*

Notre cinquième résumé de la soirée du 26 avril reprend la vie de l’homme qui a construit son habitat, perfectionné son métier, et réparé ses forces par le repos. Restera-t-ainsi ? Non, car il lui reste à partager sa vie et à reformuler les grandes questions de l’humanité. Courage petit homme, surtout si tu as en tête le grand projet de la nouvelle île de France.

Vient l’envie de vivre en couple. Choisissons le terme qui nous convient : mariage, concubinage, etc. L’essentiel, pour que la vie continue, est l’union, même temporaire, d’un homme et d’une femme.

Toutes les civilisations de tous les continents, de toutes les époques ont toujours, d’une façon ou d’une autre célébré cette union, de façon à ce que la somme des individus d’une génération soit supérieure à celle des individus de la génération précédente, et si possible plus vigoureuse. Aucun cas d’espèce, avec, y compris les cas d’exécution d’une famille par une autre n’échappe à cette règle d’accroissement en nombre. Sinon, Adam et Ève, dans notre civilisation seraient restés bien seuls et même inconnus. Idem pour tous les couples primitifs de toutes les civilisations. Alors des questions fondamentales se posent pour les personnes qui envisageraient de s’implanter dans un territoire isolé :

– Le conjoint (présent ou futur) acceptera-t-il de suivre, en fait, d’accompagner ?
– Sera-ce spontanément ou avec un quelconque sentiment d’avoir été poussé ?
– Une telle situation ne risque-t-elle pas de créer des conflits majorités par des conditions différentes de celles connues jusqu’alors ?
– Dans le cas où le postulant est célibataire, y aura-t-il sur place possibilité de trouver chaussure à son pied ? Comment ?

Là apparaît un point d’interrogation qui transcende notre horizon humain : que se passe-t-il ou que va-t-il se passer ici et au-delà ? Un fois de plus, l’humain se détache de l’animal. Il se demande d’où il vient, où il va, et à quoi sert tout cela, si cela a un sens, si le soleil continuera à se lever demain, si le ciel ne risque pas de lui tomber sur la tête, si les enfants lui survivront, si les parents disparus le sont vraiment, s’il y a un ailleurs, et même si le présent mérite qu’on le poursuive, s’il faut l’améliorer, l’aménager, le conserver bien identique à lui-même, s’il existe des moyens adéquats pour forcer le destin, pour entrevoir l’avenir, pour se concilier les bons esprits et se protéger des mauvais.

L’homme se prolonge dans le futur et se pose dans une pensée métaphysique, religieuse ou non, quelle que soit son nom. Il découvre des puissances qui le dépassent.

Parmi les moyens qu’a l’homme de se projeter dans le futur, c’est-à-dire de préparer son testament, il faut distinguer les travaux, porteurs de mémoire (mais de cela nous avons déjà esquissé le schéma) et deux outils fondamentaux que sont les enfants et les interrogations métaphysiques.

Une fois de plus, il ne s’agit pas ici d’imposer des solutions, car nous savons bien voir que les espoirs mis dans les générations qui nous suivent sont parfois mis à mal par la réalité de la vie.

Quant aux interrogations métaphysiques, avec ou sans Dieu, quel que soit son nom, et même au pluriel, nous voyons bien quelles sommes, de conflits internes ou externes elles sont susceptibles d’engendrer, les quiétudes des uns étant les inquiétudes des autres, et pire encore, les devoirs des uns étant les péchés des autres.

La destinée humaine est teintée de couleurs multiples dont le noir (le blanc pour d’autres civilisations) n’est pas absent.

Ainsi, les impétrants au départ devront rajouter de nouvelles questions à leur liste :

– Dans ces conditions, comment élever des enfants ?
– Risquent-ils de manquer d’une éducation adéquate à la civilisation environnante ? Ou au contraire, tireront-ils des forces supplémentaires de nos choix ?
– Y aura-t-il une école ? Quand ? Où ? Par qui ?
– Quels risques courent-ils de ce fait ? Des inconnues de ce nouveau territoire ? Mais comme toujours, quels bienfaits en contrepartie ?
– Y aura-t-il un ou des représentants de ma croyance ? D’une autre ? De plusieurs autres ? Qui ? Comment ?

Tous vos questionnements et retours d’expériences sont bienvenus, dès qu’ils s’inscrivent dans le désir de faire progresser le projet, même si vous n’avez aucun désir personnel de le rejoindre physiquement.

*Pierre-François Ghisoni (blog) est écrivain et éditeur.

partie 1 / partie 2 / partie 3 / partie 4

Pour bien comprendre le projet, lire :
La France ailleurs et toujours : la possibilité d’une île, par Éric Martin
Sécession, An I, par Pierre-François Ghisoni
La France, Louis de Bonald et l’émigration : la vraie patrie, par Philippe de Lacvivier
La possibilité d’une île : la question monétaire, par Jonathan Schramm

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25 Comments

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  • 0 / 10
  • blanche54 , 8 mai 2013 @ 20 h 19 min

    La charité chrétienne a du bon, le FN aussi…

  • Pierre-François Ghisoni , 8 mai 2013 @ 20 h 34 min

    Bonjour autre Gérard,

    Nous partageons beaucoup plus de choses que certains peuvent croire, et vous posez un problème de fond. La réflexion la plus compliquée est là. Très brièvement (ce n’est qu’un commentaire), la nécessité de liberté la plus profonde est celle qui se dévoile lorsqu’on est prisonnier. Tout prisonnier sent au fond de lui la pulsion de s’échapper, qu’il le puisse ou non, qu’il ait mérité son emprisonnement ou non, qu’il s’échappe physiquement ou spirituellement, qu’il fasse entrer des explosifs ou qu’il joue la carte de la fausse bonne conduite.

    Autrement dit, nous devons chaque jour, même si nous nous croyons libres, observer le travail d’enfermement de la société dans laquelle nous vivons, et agir en conséquence.

    Et c’est ici que la pensée de l’île apparaît. Même si ce projet ne donne jamais lieu à la découverte physique de cette île (mais faisons tout pour) son émergence spirituelle existe déjà.
    Et bien entendu, c’est la transposition de cette pensée à un gouvernement — disons à une organisation — qui doit nous guider.

    Maintenant, pour revenir à un point très pratique dérivé du commentaire de Castiglione, et très personnel, le retour à la pleine nature et à ses contraintes physiques (et morales) m’est impossible, aussi impossible que la course mortelle de notre société de la technique (au sens où Heidegger le décrivait). Je pense ne pas être le seul dans ce cas. Il faut donc trouver ou essayer un moyen terme, toujours remis en question.

    Bienvenue sur notre rivage.

  • Pierre-François Ghisoni , 8 mai 2013 @ 20 h 37 min

    Tirebouchon

    Si vous saviez comme je vous comprends…

  • Frédérique , 8 mai 2013 @ 21 h 13 min

    @Pierre-François Ghisoni
    Observer le travail d’enfermement de la société dans laquelle nous vivons, pour ce qui est de la grande majorité des lecteurs de NDF, le travail est déjà fait, c’est d’ailleurs, ce qui nous réunit bien que de milieux sociaux différents. Agir en conséquence, là, je crois que ce n’est plus possible dans la société actuelle, car nous nous sommes réveillés complétement désarmés et encerclés par l’ennemi. Nous ne disposons guère que de notre bulletin de vote, et encore dans un système falsifié, où même le résultat d’un référendum est complétement ignoré. C’est en formant une communauté que vous auriez une chance de contrer le système avec vos idées, pas tout le système évidemment, mais l’union fait la force, et si vous ne trouvez pas votre île, pourquoi pas un test dans le pays?

  • Daniel , 9 mai 2013 @ 0 h 49 min

    Voici un aspect que j’apprécie dans ce projet que j’ai pris en cours: la liberté retrouvée grace à l’idée proposée d’une ile. Ce qui permet d’oser l’espoir, lequel est refoulé depuis trop longtemps au point d’un défaitisme acquis qu’il serait bon d’analyser pour la suite de l’histoire.
    En effet, les références à Jeanne d’Arc et aux différentes barbaries de l’Histoire de France nous montrent à quel point la liberté a nécessité de courage pour aller défendre sa liberté avec autant de risques d’en mourir rapidement en passant par des souffrances raffinées. Il y a en apparence une incohérence entre les risques (physiques) réels très limités d’une lutte aujourd’hui, les injustices supportées, le sentiment de destruction de la civilisation et les actes de résistance effectivement posés. Il manque un maillon essentiel pour avoir non pas une réaction épidermique aux injustices mais une action fondée au niveau des causes profondes qui ont engendré cet immense gaspillage humain. La forme matérielle rend visible une conséquence. Mais l’erreur est à rechercher sur le fond qui est toujours de nature spirituelle chez nous les humains. C’est même ce qui nous caractérise. C’est notre nature.

    Pour ma part, j’ai été amplement piétiné professionnellement dans mon entreprise par notre beau système pendant toute ma carrière et comme j’ai toujours maintenu et revendiqué mon idéal de chrétien indépendant d’esprit face à l’administration aux mains des FM (ici dénués de scrupules) , j’ai appris à mes frais à en comprendre les rouages et les perversions… mais aussi les faiblesses et mieux, les fragilités humaines des hommes sans Dieu, avec comme conséquences leur pitoyable inefficacité technique, et les multiples formes de compensations qui constituent des buts à leur vie vide de sens.
    J’en ai tiré une analyse assez complète qui s’avère d’un usage très efficace quels que soit le type de désordre en provenance du système, y compris les lois de la République.

    Je ne peux faire trop long. Je prends donc un exemple datant de 6 mois: je fais un courrier à une caisse où je refuse de payer des cotisations rendues obligatoires par la loi ou j’explique gentiment résumé en 4 pages:
    – que l’égalité de droits n’est pas respectée, que leur demande n’est ni morale, ni légale,
    – qu’elle relève d’un procédé raciste puisque visant à appauvrir des catégories définies, ceci au profit d’autres catégories au pouvoir définies comme bénéficiaires selon des lois illégitimes. Idem via les impôts augmentés sans fin, ce que tout imbécile peut faire,
    – que leurs procédés s’avèrent criminels et tuent (morts prématurées provoquées) des centaines de milliers de personnes qu’on peut aujourd’hui compter.
    Je rappelle certains procédés précis et identiques déjà utilisés par les Nazis contre des catégories, les Juifs entre autres, avant d’évoluer vers les fours, plus efficaces. A quel stade eux mêmes ont-ils prévu d’arrêter?
    – J’accepte leurs excuses d’en avoir été jusqu’à présent inconscients.
    Je rappelle qu’en refusant de payer, je choisis de ne pas être le collabo d’un tel système criminel.
    – Je leur explique que l’irresponsabilité par le biais d’un statut est la reconnaissance implicite des limites mentales de celui qui choisit cette voie de pouvoir et/ou de privilège mais que ces limites mentales ne sont pas compatibles avec les prétentions affichées en termes de rémunérations et de pouvoir politique.

    Je rappelle que la dette de la France est à assumer par ceux qui se sont servis dans la Caisse et qu’il pourrait leur être rapidement demandé des comptes, que la signature de Pompidou n’engageait pas la France puisque la loi par laquelle il vendait la France n’était pas conforme à la Constitution, et que les professionnels qui l’ont suivi n’ont fait que la vendre un peu plus,
    etc…. ( 4pages: est ce que je continue ????)

    Résultat par retour de courrier du Directeur: “VOUS NE DEVEZ RIEN”!…
    et j’ai bien d’autres exemples.
    C’est simple, c’est facile, c’est efficace, c’est pas cher et je suis seul, vieux, pauvre, je n’ai aucun réseau puissant en dehors du soutien et de l’estime de mes enfants et mes petits enfants. Alors, entre les mains d’un groupe conscient que l’intérêt privé est indissociable de l’intérêt de l’ensemble, on peut agir efficacement à grande échelle.
    Comme quoi la France que vous chérissez a de beaux jours devant elle, et même des jours d’une qualité qu’elle n’a jamais imaginé donc jamais espéré.
    C’est sur le fumier que poussent les plus belles fleurs. L’idée d’une ile est une belle graine de liberté que vous avez semée.
    Je commence un livre. Il me serait agréable d’avoir votre avis et votre soutien sachant que mes arguments peuvent être ressentis comme très durs jusqu’à provoquer des réactions physiques profondes. Vous avez mon adresse mail.

  • Pierre-François Ghisoni , 9 mai 2013 @ 9 h 25 min

    Daniel,

    Votre action soutenue par une pensée, ou votre pensée menant à une action, est une graine d’espoir. Bien sûr, cela ne marche pas à tous les coups. Beaucoup de clous et beaucoup de coups de marteau sont nécessaires, et même comme cela…

    Mais vos arguments sont fondamentaux et rejoignent les nôtres. Fondamental, cela signifie nécessaire à une fondation, ou refondation. D’où le projet de l’île. Sa réalisation la plus organique serait une île indépendante. Sa dérivée la plus spirituelle, une île à cultiver en soi-même (pas toujours facile non plus). Et dans un cas comme dans l’autre, tempêtes extérieures et intérieures à prévoir.
    Raison de plus pour avancer sérieusement.

    Pour votre texte ; il faut écrire, et encore écrire. Ne pas perdre la civilisation de l’écrit (sans négliger ni parole ni image). Mais écrire avec des critères de qualité. Directeur des éditions numériques Lettropolis, je peux vous donner mon avis, si vous le souhaitez. Nous sommes déjà une sorte d’île dans l’univers éditorial.

  • Clairon , 9 mai 2013 @ 18 h 04 min

    Envoyez un article à NDF sinon. N étant pas parisien, je ne peux être à ces réunions.

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