Un Suisse, Syrien pour les siècles des siècles

Tribune libre de Fouad A. Kassis

En rentrant en Suisse, avec ma famille, après un long séjour à Damas, l’Officier de la Sûreté à la frontière, après avoir contrôlé minutieusement mon passeport suisse, enchaîne  avec moi la conversation suivante :

Q. : Votre nom n’est pas très Suisse, Monsieur,

R. : En effet je suis naturalisé Suisse mais je suis d’origine Syrienne.

Q. : Comment va la Syrie et quelle solution vous préconisez aux événements ?…

R. : La Syrie va bien car Dieu l’a toujours protégée et il la protégera encore.

Q. : Depuis quand vous vivez avec votre famille en Suisse ?…

R. : Nous vivons en Europe et en Suisse, depuis bientôt trente ans et chaque année nous allons en Syrie pour  voir nos parents et passer nos vacances avec eux.

Q. : Dites-moi Monsieur, lequel des deux, la Suisse ou la Syrie vous aimez le plus ?

R. : J’aime la Suisse comme mon épouse, que j’ai choisie, pour la vie. Je l’aime aussi parce qu’elle m’a donné une réelle opportunité de succès, de sérénité et de paix et je lui resterai très reconnaissant ad vitam aeternam

Mais cela n’empêche que j’aime ma mère-patrie la Syrie comme ma mère que le bon Dieu lui-même m’a choisi…

Mon épouse et moi nous nous aimons profondément et nous savons que nous nous  appartenons l’un à l’autre, jusqu’à ce que le Seigneur nous appelle auprès de lui.

Quant à ma mère je sens que je lui appartiens. Elle m’a porté dans ses entrailles, elle m’a nourri de son cœur, elle m’a appris à marcher, à parler, à lire, à  écrire et à affronter la vie. Je me repose sur sa poitrine tel un bébé dans ses bras et je m’endors à ses pieds, heureux et serein. Elle connait tous mes secrets, toutes mes faiblesses et tous mes défauts, depuis ma jeunesse et jusqu’à ce jour. Mon profond souhait c’est d’être inhumé dans la même tombe que ma mère, sous la sainte terre de ma mère-patrie : la Syrie… Mes enfants et mes petits enfants seront probablement plus Suisses que Syriens… mais c’est leur libre-choix…

Q. : C’est très beau tout cela, mais la Syrie va à la dérive, elle agonise !…

R. : Il est vrai que ma mère-patrie souffre, mais elle ne va pas à la dérive et elle est forte et se bat vaillamment pour sauvegarder sa souveraineté.  Il est vrai qu’elle n’a plus les moyens de s’offrir le luxe des médicaments UE et des fast food USA mais nos ancêtres connaissaient bien tous les secrets des herbes, des légumes et de la terre… pour soigner nos blessures et nos douleurs, pour apaiser les souffrances de nos cœurs, pour sécher nos chaudes larmes, pour continuer à nous offrir une éducation gratuite et pour nous procurer le pain quotidien…

La Syrie n’était-elle pas le grenier de l’Empire Romain ?… Le peuple syrien ne se nourrit-il pas des produits de son sol  et ne s’habille-il pas de ce qu’il fabrique de ses propres mains ?…

Tout au long de l’Histoire, la Syrie a vu passer et disparaitre toutes les civilisations du monde sur son territoire… Elle les a assimilées, elle les a enrichies mais elle a conservé intacte son identité et ses caractéristiques.

Q. : Pourriez-vous me décrire votre pays ?…

R. : Ma mère-patrie, la Syrie n’est pas une jeune blonde aux yeux bleus…

La Syrie est une bien vielle dame âgée de plus de six millénaires…

Ses rides l’ont rendue plus sympathique face à ses interlocuteurs…

Son visage sérieux exprime décision, volonté et amour de la vie…

Ses yeux parlent de son refus de la culture du feu, du sang et de la mort….

Son attitude est de récupérer le retard afin de rejoindre le XXIe siècle…

Elle livre des combats contre la désertification et contre la sécheresse…

La Syrie est très fière d’être la Syrie souveraine, indépendante et libre…

Mais la bataille que lui livrent les Forces des Ténèbres la préoccupe …

Q. : C’est quoi et c’est qui les Forces des Ténèbres, Monsieur ?…

R. : Ce sont ceux qui détruisent pour reconstruire aux frais du pays détruit…

Ce sont ceux qui disent : l’argent fait tout, très bien, beaucoup [1]…

Ce sont ceux qui ont dit : le chaos est créateur d’un monde nouveau [2]

Ce sont ceux qui répètent, tels des perroquets, les dires du Frère Aîné…

Ce sont ceux qui voient et croient : le pétrole et le gaz sont des parfums…

Ce sont ceux qui ont suivi des cours intensifs de lavage des cerveaux

Ce sont ceux qui manipulent les textes sacrés pour justifier leurs erreurs…

Ce sont ceux qui exploitent la situation pour accomplir leurs vils crimes…

Ce sont ceux qui cherchent à se venger des Araméens qui les ont humiliés… [3]

Ce sont ceux qui aspirent à la légalisation de leur existence par leurs voisins…

Alors l’Officier me rend mon passeport disant :

« Je regarde tous les jours le télé-journal, mais je ne vois que destruction, mort et désolation dans votre pays… »

R. : C’est justement là le lavage des cerveaux  que pratiquent les mass-médias…

Mais ne croyez-vous pas, Monsieur l’Officier, que la destruction, la mort et la désolation sont le fait des Forces des Ténèbres ?…

Ne croyez-vous pas, Monsieur l’Officier, que tout État a le devoir de défendre sa souveraineté, ses institutions et ses citoyens, contre les Forces des Ténèbres ?…

Ne croyez-vous pas, Monsieur l’Officier, que les religions prônent la charité et le  respect  du prochain, tout en condamnant la culture de la mort ?…

Ne croyez-vous pas, Monsieur l’Officier, que les États, à civilisation chrétienne, ont le devoir d’être équitables et de ne pas utiliser les deux poids et deux mesures ?…

Ne croyez-vous pas, Monsieur l’Officier, que l’État qui abrite, sur son sol, les deux villes saintes de l’islam, ne devrait pas oublier Jérusalem et détruire Damas ?…

Pour quel raison les Forces des Ténèbres aident-elles, arment-elles et soutiennent-elles les escadrons de la mort, sinon que pour leurs propres intérêts géopolitiques  ?…

Pour terminer, Monsieur l’Officier, je voudrais vous  rappeler que :

Détruire ma Patrie signifie détruire 6000 ans d’Histoire de la civilisation humaine,

Détruire Damas, c’est assassiner l’Apôtre Paul, qui a porté la Bonne Nouvelle à l’Occident, après y avoir été instruit, par Saint Anania, le chef des chrétiens de Damas.

Détruire Damas, c’est oublier à tout jamais le Saint Sépulcre et l’Église de la Nativité, c’est oublier la Mosquée Al-Aqsa, c’est oublier Jérusalem, Bethléem, Nazareth…

Détruire Damas, c’est oublier que les Umayyades ont transmis à l’Occident, à travers l’Andalousie, toutes les sciences humaines d’alors.

Détruire Damas, c’est détruire la mosquée des Umayyades et le mausolée de Yahya, Saint Jean, qui a vu le pape Jean-Paul II s’y recueillir, lors de sa visite en Syrie en 2002.

Détruire Damas, c’est démolir l’école de l’islam modéré, c’est abattre l’existence du véritable islam coranique, c’est renier la cohabitation pacifique des communautés.

Détruire Antioche, notre capitale religieuse, c’est détruire le premier Saint Siège de Simon-Pierre, le premier Pape successeur de Jésus, à la tête de son Église,

Détruire Antioche, c’est dire à toute l’Orthodoxie du monde entier : « La capitale que vous glorifiez a été sacrifiée sur l’autel des intérêts des Forces des Ténèbres. »

Détruire ma capitale Damas, c’est détruire les trois premières villes du christianisme : Jérusalem, Damas et Antioche, dont deux font partie de la Pentarchie…

Le grand écrivain Alphonse Daudet a divinement décrit la bataille que La Chèvre de M. Seguin a combattue contre le loup… Elle avait juré de se battre jusqu’à l’aube avant de se laisser dévorer… En effet, le loup n’a eu gain de cause, qu’après une longue bataille avec cette courageuse chèvre…

La Syrie, par contre, a juré de défendre sa souveraineté, ses institutions et ses citoyens, ad vitam aeternam , contre le loup, les Forces des Ténèbres… Elle a juré de se défendre unguibus et rostro, comme disaient les Romains, avec ses ongles et ses dents, pour que renaisse la nouvelle Syrie, plus forte et plus souveraine que jamais.

La Syrie plie mais ne romps pas, pour se redresser par la suite, tel le roseau de la Fable de feu La Fontaine : le chaîne et le roseau.

Les Syriens croient fermement que :

Sourya Allah Hamiha  سورية الله حاميها    La Syrie est protégée par Dieu

Monsieur l’Officier, permettez-moi d’espérer, que ma patrie d’adoption la Suisse, soit toujours avec le droit, la vie, la légalité, la construction et contre la destruction.

1. C’est le slogan des adorateurs du Dieu Mammon.
2. Allusion à la prophétie de C. R. proclamée en 2005 à Beyrouth.
3. Voir Ancien Testament, Livre des Rois II, chapitre 3/3 à 24

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16 Comments

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  • 0 / 10
  • feeloo , 13 décembre 2012 @ 23 h 55 min

    Vraiment d’accord. Parfois, je me demande ce que je fais à encore traîner sur ce site. C’est vraiment rare – partout d’ailleurs -la “liberté” de penser.

  • feeloo , 14 décembre 2012 @ 21 h 03 min

    WTF???

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