La bonne mine de Vincent Peillon

Tribune libre de Christian Vanneste*

Vincent Peillon est impayable. Je suis saisi d’admiration lorsqu’avec une mine superbe, de sa voix calme, et d’un ton professoral, le philosophe condescend à révéler la vérité qu’il possède mais dont il veut généreusement faire profiter le monde ignorant. Il y a mûrement réfléchi, et sans devoir passer par cette embarrassante concertation qui gène le progrès d’une réforme inspirée par la raison et sans même avertir ses collègues ni le premier d’entre eux, le voilà qui sort sa pépite de la mine, cette idée qui brille comme un diamant. Les élèves français bénéficient de vacances trop longues en été. C’est mauvais pour les apprentissages. Les pays sérieux comme l’Allemagne ont des années scolaires plus longues avec des horaires plus légers. Des rythmes scolaires plus étalés seront meilleurs pour la communauté éducative. Et le ministre d’affirmer que six semaines de vacances, c’est suffisant et que la création de deux zones serait possible. Ces précisions laissent entendre que la réforme est prête. Le gaffeur récidiviste aura beau rétropédaler avec l’énergie du désespoir, souligner que la mise en place des quatre jours et demi dans le primaire est assez difficile pour ne lancer la réflexion sur les vacances d’été qu’après son aboutissement, c’est-à-dire en 2015,  il est déjà trop tard. Le mal est fait. Toutes les frustrations se réveillent. Matignon recadre en rappelant qu’il ne s’agit, cette fois encore, que d’une piste. Les syndicats d’enseignants, vexés, soulignent qu’ils ont leur mot à dire sur cette question si sensible du temps de travail. L’opposition tient un discours de la  méthode et crie à l’improvisation et à l’amateurisme.

Sur les pistes de l’éducation Vincent Peillon sème ses mines. Elles explosent « allègrement » jusqu’à ce que lui-même ne saute un jour comme son indépendant prédecesseur, grand chasseur de mammouths. Toujours en avance d’une réforme, sans palabre ni beaucoup de cohérence, notre nouveau ministre a brûlé la politesse à Matignon en annonçant les quatre jours et demi dès son arrivée, puis l’allongement des vacances de la Toussaint et enfin la diminution des vacances d’été. En fait, si les enseignants protestent car ils n’aiment pas être bousculés, les parents d’élèves comprennent assez la logique du ministre qui est de concevoir une école faite pour les enfants plutôt que pour les professeurs. Moins heureuse a été son annonce du recrutement de 40 000 nouveaux enseignants alors que l’État est astreint aux économies. Carrément à contre-sens fut sa sortie sur la dépénalisation du cannabis qui jurait pour le moins avec sa relance d’une morale laïque. Pour le coup, les parents se sont demandé qui était le suprème responsable de la formation de leurs enfants.

Cette nouvelle gaffe de Vincent Peillon sur les vacances d’été appelle trois observations. Lorsque j’entends les critiques des Fillon, Le Maire et autre Bertrand, je les reçois comme des points positifs pour notre ministre. Avec une grande fatuité, nos ex-ministres donnent des leçons sur la forme au débutant. Pas un mot sur le fond, en revanche, alors que précisément les gouvernements précédents ont été incapables de mettre en œuvre les réformes structurelles dont la France avait besoin. Par exemple, qu’a fait Fillon lorsqu’il a été en charge de la rue de Grenelle ? Rien ! Quant au dernier, Chatel, outre les suppressions de postes, on lui doit l’entrée de la stupide théorie du genre à l’école ! Ils devraient faire preuve de plus de modestie !

Deuxième observation : sur le fond, précisément, l’adaptation des rythmes scolaires aux besoins des enfants, non à ceux des enseignants, ni à ceux des professionnels du tourisme, ni même à ceux des parents qui confondent école et garderie, doit être la priorité de l’aménagement du temps scolaire. Une année plus longue avec des journées plus courtes et un temps gagné pour le sport et la culture sont un objectif salutaire, lequel, dans ce pays rétif à la réforme nécessaire, mettra donc un mandat présidentiel et plus, si tout va bien, à être atteint.

Troisième observation : la France était fière de son système éducatif. Elle l’est moins lorsqu’elle observe son recul dans les classements internationaux, le nombre d’élèves sortis de la formation sans diplôme qualifiant , voire le niveau de l’illettrisme. Ce n’est pas la modification des rythmes scolaires qui va renverser la situation. Il faudra pour cela une réforme en profondeur sur trois niveaux. D’abord, tuer le mamouth, c’est à dire, sur la base d’objectifs et de programmes nationaux, libérer l’école en la régionalisant et en ouvrant davantage la voie à l’iniative privée, qui fait déjà ses preuves, mais que les gouvernements précédents ont maintenue endiguée dans le carcan des accords conclus par ce cher Jack Lang. Il faudrait, par exemple, instaurer le chèque scolaire qui permettrait aux parents de choisir vraiment leur école comme c’est le cas en Suède. Ensuite, briser les méthodes éducatives inscrites dans les prétendues sciences de l’éducation dont le jargon dissimule mal l’absence de véritable scientificité.  Le recul persistant de la France au PISA par rapport aux pays asiatiques, notamment, est préoccupant et devrait induire une remise en cause des méthodes pédagogiques utilisées. Enfin, et surtout, redonner un esprit au processus éducatif. Celui-ci ne peut réussir que dans la discipline et le respect de l’autorité des maîtres. Celle-ci implique à son tour que les maîtres aient une claire conscience des buts de l’éducation de l’École à l’Université : non pas former des spectateurs critiques comme le souhaite Vincent Peillon, mais des acteurs lucides, autonomes, créatifs et performants de l’avenir d’un pays qu’ils auront appris à aimer.

*Christian Vanneste est un ancien député UMP du Nord.

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23 Comments

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  • westie51 , 27 février 2013 @ 16 h 09 min
  • TRIVIDIC , 27 février 2013 @ 18 h 46 min

    Vous avez parfaitement raison. C’est ce que j’ai fait en son temps pour mon fils qui est né en 1981. Il est rentré en CP en sachant lire écrire et compter.

    Cela lui fut bien bénéfique je puis vous l’assurer.

    Un conseil si je puis me permettre : rester dans le centre ville

  • TRIVIDIC , 27 février 2013 @ 18 h 47 min

    On ne peut que saluer vos propos

  • MarcS , 1 mars 2013 @ 15 h 57 min

    Ne pas oublier yaki que la motivation essentielle de la vocation des enseignants tient à trois raisons : juillet ,août, septembre !!!….

  • MarcS , 1 mars 2013 @ 16 h 05 min

    Non conneriephobe tous les ministres de l EN n’ont pas été des guignols Jean Pierre Chevènement et Claude Allègre ont essayé de faire quelque chose d interessant mais mal leur en a pris !!!

  • Yaki , 1 mars 2013 @ 18 h 33 min

    pas de vacances en septembre, donc plutôt juillet août, novembre décembre février avril.
    Et payés des milles et des cents, avec logements de fonctions, voiture de fonction, serviteurs…
    Mais si leurs métier est si facile que ça, allez-y. Donnez des cours à 35 enfants…

    Les profs ne souhaitent pas leur 2 mois de congés: ils savent bien que les enfants ne seront difficiles à remettre en ordre de marche. Les professionnels du tourisme tiennent bien plus à ces 2 mois. Il faut aussi savoir pourquoi historiquement il y a 2 mois de vacances l’été.

    Sans compter que les professeurs, ayant plus de congés que les autres sont payés en conséquence : salaire annuel calculé sur 10 mois de travail, lissé sur 12 mois.

  • bern , 18 avril 2013 @ 9 h 58 min

    V.Peillon est un exalté, fou d’orgueil et de prétention révolutionnaire. Un comble en plein XXI siècle, d’être un fanatique de cette sorte. Il pourra peut-être faire beaucoup de mal, mais son sadisme est d’avance un irrémédiable échec. Pas plus que le mariage pour tous, un phénomène de foire au même titre que la femme à barbe ou l’homme à trois bras, sa réforme ne passera l’épreuve du temps. Une puissante contre-culture est née, celle des médias alternatifs, et rien ni aucune idéologie ne pourra plus jamais museler les voix de la vérité et du bon sens.
    Et de grâce, ne confondons pas la relativité qui appartient au domaine de la physique et la soit disant relativité des cultures. Toutes les cultures ne se valent pas ; il y en a des bonnes et des mauvaises, car le bien et le mal existent ; le mal est d’ailleurs et souvent un bien qui n’est pas à sa place. Messieurs les adorateurs du soi-disant relativisme, faites un peu d’épistémologie !

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