György Budaházy : «J’ai passé plus de temps en prison sous le gouvernement conservateur que sous la direction socialiste»

Hongrie. Lionel Baland a rencontré György Budaházy et l’a interrogé sur sa situation actuelle. Lors de la période d’incarcération de György Budaházy, Lionel Baland avait interrogé des membres de sa famille.

György Budaházy est un militant nationaliste hongrois qui s’est fait connaître en réalisant des actions de protestation spectaculaires, en particulier contre le pouvoir socialiste, en Hongrie à partir de 2002. György Budaházy a été ensuite faussement accusé de terrorisme et jeté en prison, où il est resté en détention préventive dans des conditions extrêmement difficiles durant deux ans et quatre mois : il a été traité comme un terroriste international de la plus haute dangerosité (sur cette vidéo, les forces de l’ordre gèrent sa sortie de la salle du tribunal). György Budaházy est devenu le prisonnier politique le plus célèbre de Hongrie.

Quels sont les problèmes que vous avez avec la justice depuis que vous êtes sorti de prison ?

Je suis sorti le 11 septembre 2011 de prison. Le procès se poursuit. J’étais en préventive. Je ne sais pas ce qui va se passer. Je peux encore être condamné à plusieurs années de prison. Je dois respecter les ordres de la Cour, sinon je retourne en prison.

Lorsque je suis sorti de prison, après y avoir passé deux ans et quatre mois, j’ai été assigné à résidence durant un an. Ensuite, j’ai pu quitter ma maison mais j’ai dû rester dans la petite ville au sein de laquelle je vis. Depuis janvier 2013, je peux quitter la petite ville et je peux me mouvoir au sein du Comté de Pest. Il m’est interdit de me rendre à Budapest ou de sortir du Comté de Pest. Je trouve cela inadmissible car je ne peux pas participer à une manifestation à Budapest. Cette situation reste valable jusque la fin de l’année.

Les autres accusés ont-ils les mêmes problèmes ?

Au total, 18 personnes sont suspectées. Une est toujours recherchée. Parmi les 17 autres, deux ne sont pas allées en prison. Les 15 autres sont passés par la prison. Ceux-ci sont sortis au fil du temps, sauf trois qui ont été maintenus plus longtemps en prison bien que les autorités n’ont pas d’éléments en plus contre eux. Puis, une des trois personnes a été libérée et, finalement, les deux derniers (Endre Szász et moi-même) l’ont été ensemble.et sont tenues de rester dans leur ville. Les autres sont complètement libres de circuler.

L’accusation concerne le terrorisme. Le but est de dire qu’il y a quelque chose et de permettre à la justice de ne pas perdre la face. L’absurdité est complète : j’étais accusé d’être le chef qui donne les ordres, tout en n’ayant rien fait. Ceux à qui j’étais supposé donner des ordres sont libres, et je suis toujours empêché de circuler alors que je suis accusé seulement d’avoir donné les ordres et ceux qui sont accusés de les avoir effectués sont libres.

Quand vous êtes restés un an à la maison, en assignation à résidence, comment étiez-vous mentalement ?

Voici la façon dont la prison hongroise fonctionne : 23 h en cellule de 7m² et une heure en plein air. Le fait d’être à la maison a été une amélioration considérable, en particulier pour ma vie de famille [György Budaházy est père de trois jeunes enfants].

Une des quinze personnes qui ont été relâchées une année avant moi a été confinée durant deux ans au sein d’un petit appartement situé au 7ème étage d’un bâtiment sans pouvoir travailler alors qu’elle n’avait pas d’argent. Cette personne est brisée.

Le commerce familial des Budaházy est tenu par ma sœur Edda.

Pourquoi avez-vous ces problèmes ?

Ils veulent être débarrassés de moi. Je les dérange car j’ai dénoncé des affaires, mais la principale et plus importante raison de ces persécutions est qu’ils sont effrayés car je suis le seul à pouvoir obtenir du peuple qu’il se révolte. Si je dis aux gens de se battre, ils le feront. Je suis le seul dirigeant charismatique de ce point de vue.

Le changement de gouvernement a–t-il modifié la donne? 

Non. Lorsque le Parti conservateur Fidesz est arrivé aux affaires en Hongrie, tout le monde disait que je devais être relâché. Le changement de gouvernement n’a rien modifié. J’ai d’ailleurs passé plus de temps en prison sous le gouvernement conservateur que sous la direction socialiste du pays.

Avez-vous reçu l’aide d’organisations nationalistes ?

Oui, le Jobbik, qui est le parti nationaliste hongrois, m’a aidé. Au sein du mouvement national, des collectes d’argent en m’a faveur ont eu lieu. Les avocats nationalistes m’ont apporté une aide et le Député du Jobbik Tamás Gaudy-Nagy m’a soutenu. Il est mon avocat pour certains cas juridiques et pour d’autres affaires judiciaires il m’apporte une aide juridique indirecte.

Avez-vous encore des problèmes en ce moment avec la justice ? Certains cas sont-ils encore pendant devant les tribunaux ? 

Depuis 2002, j’ai dû faire face à 15 affaires différentes devant les tribunaux. L’accusation de terrorisme est la plus grave. Plusieurs affaires judiciaires sont toujours en cours. Une est à Strasbourg. L’affaire de la plaque du monument soviétique qui a été enlevée en 2006 [durant les émeutes nationalistes de l’automne 2006, un monument à la gloire de l’Armée Rouge situé Place de la Liberté à Budapest a été endommagé par les nationalistes] n’est pas encore jugée. La plupart des cas ont été perdus pas le parquet.

György Budaházy arrêté arbitrairement le 15 mars 2009 par 40 policiers

Une autre affaire est liée à mon arrestation le 15 mars 2009, lors des commémorations de la révolution de 1848. J’ai été arrêté par quarante policiers et après cela j’ai été accusé d’avoir attaqué un représentant de l’État. C’est ridicule. Je suis accusé d’avoir résisté à l’arrestation alors que cette arrestation est illégale. Ils m’ont arrêté illégalement sans accusation et disent que je les ai attaqués. Il s’agit d’une comédie absurde. Lors de cette arrestation, j’ai été aussi accusé d’avoir mis un coup de boule à un policier casqué. Un autre policier a filmé la scène et n’a rien pu prouver car ce n’est jamais arrivé. Cette affaire va être traitée cette année par la justice. J’espère qu’elle sera rapidement clôturée

Dans le cadre de l’accusation de terrorisme, ils n’ont pas pu trouver quoi que ce soit. Mais tout est possible. Ces cas et l’affaire de terrorisme sont toujours en cours.

Chaque fois que le parquet perd une procédure à mon encontre, je lui fais un procès pour offense. Ces cas sont également toujours en cours.

Un cas est amusant. Lors d’une manifestation contre l’entrée de la Hongrie au sein de l’Union européenne, j’ai été poursuivi et des tracts ont été confisqués. J’ai pu les récupérer après mon acquittement, mais ces tracts ne servent plus à rien car la Hongrie est entrée entretemps au sein de l’Union européenne. Plus on en sait sur ces affaires judiciaires, plus on se rend compte que c’est aberrant.

Vous est-il interdit de faire de la politique ?

Non. Je peux faire ce que je veux car je ne suis pas condamné. Par contre, je ne peux pas quitter le comté car je pourrais tenter de m’échapper.

Quelle a été la réaction des médias lors de toutes ces affaires ?

Les médias ont prétendu que je suis un terroriste. Depuis que je suis sorti de prison, toute cette affaire de terrorisme est apparue comme ridicule. Les médias n’en parlent plus. C’est comme si je n’existais pas. Cette affaire n’intéresse plus les médias.

Faites-vous encore de la politique ?

György Budaházy avec son avocat le député Tamás Gaudi-Nagy

Oui. Nous devons agir dans l’intérêt de la nation. Je pense que tous les politiciens sont des traîtres. En 2002, je suis devenu quelqu’un de connu, dans le mauvais sens du terme, par la population car les médias ont parlé négativement de moi. En 2006, j’étais recherché et la presse a parlé négativement de moi. Jusqu’à ce que je sois incarcéré, j’étais connu de manière négative par la population. Les médias ont parlé contre moi. Lors du procès, de plus en plus de personnes ont constaté que ces accusations sont fausses. La population sait maintenant que mon cas est politique et que je ne suis pas un terroriste, ce dont ils étaient convaincus au départ. Grâce aux nationalistes qui propagent la vérité, maintenant, beaucoup de gens savent.

Êtes-vous autorisés à avoir des contacts avec d’autres membres du groupe ?

Oui. La seule manière de m’empêcher de parler avec eux serait de me remettre en prison.

Avez-vous quelque chose à ajouter ?

Je pense que si vous avez un vrai idéal et que si vous êtes déterminé, c’est plus facile de survivre que sans idéal. « Ce qui ne vous détruit pas, vous renforce. » Désormais, je ne crains plus ce qui peut m’arriver.

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Mise à jour de Lionel Baland : Suite au commentaire déplorant le manque d’informations au sujet de György Budaházy, voici en annexe la biographie traduite en français de Budaházy, issue de son site Internet (http://budahazy.org/fr/biographie). Elle a été rédigée durant son incarcération, ce qui explique l’emploi de la troisième personne.

Patriotes, compatriotes hongrois, chers intéressés,

Je suis György Budaházy et je vous souhaite la bienvenue sur mon site Internet.

Vous trouverez ici tous mes écrits, discours, articles de presse me concernant, vidéos et enregistrements audio. Toutes les sources nécessaires pour se faire une idée de ma personne, de mes activités publiques et de mes travaux se trouvent ici.

Je vous souhaite une lecture agréable en parcourant mon site.

György Budaházy

Biographie

György Budaházy, né en 1969 à Budapest, est appelé par ses amis « le sans peur ». Du côté de son père, son arbre généalogique est connu jusqu’en 1266 et remonte à une famille noble des régions de Budaháza et Veskóc.

L’un de ses ancêtres est István Budaházy qui prit part en 1552 à la défense d’Eger et fut blessé lors d’une sortie ratée. Il est cité nommément dans le roman Les étoiles d’Eger de l’écrivain Géza Gárdonyi ; de plus, son nom figure sur la plaque commémorative au château d’Eger. Lors des combats contre les Turcs, István Budaházy était le commandant des deux places-fortes d’Ónod et de Murány.

Un autre de ses ancêtres est János Budaházy XVI (1652-1678) qui rejoignit à 19 ans les Kuruc (les Hongrois luttant contre les Habsbourg) de Zemplén où il obtint le grade d’officier. Après avoir pris part à la bataille perdue de Györke en 1672, il fut banni jusqu’à sa mort.

Le jeune frère de son grand-père, Miklós Budaházy, fut l’un des officiers de la légendaire « Garde Rongyos » (qui lutta en 1921 contre l’annexion de la région de Sopron par l’Autriche).

Son oncle du côté paternel fut résistant en 1956 et dut – après la victoire des communistes – fuir en Australie, où il vit depuis.

György Budaházy a grandi à Kelenföld, où il est allé à l’école. Il a fréquenté le lycée Budai Nagy Antal de Budafok et a obtenu un diplôme d’ingénieur avec un mémoire intitulé “Az alumíniumkémény csőszerkezetek T-idomainak ellenállásáról” en 1992, mais n’a jamais travaillé dans ce domaine. György Budaházy y voit plusieurs raisons : d’une part, la théorie l’intéresse plus que la pratique, d’autre part la construction mécanique était à l’époque un domaine économique en régression en Hongrie. C’est ainsi qu’il a décidé de poursuivre ses études à l’Académie des Affaires de Budapest où il a suivi une formation en organisation économique.

Ensuite, il s’est mis à son compte dans le domaine de la gastronomie et a fait du commerce à Diósd. Il s’est marié en 1997 et est aujourd’hui père de trois enfants.

Il a commencé à s’intéresser à la politique en 1990. Il a fait son apparition cette année-là en relation avec les blocus des taxis alors qu’il manifestait contre les chauffeurs de taxi qui s’opposaient au gouvernement de centre-droit d’Antal (MDF).

Deux ans plus tard, il adhère au MDF où il n’a occupé aucune fonction. À partir de la moitié des années 90, il s’éloigne du cercle du parti.

Sa vie publique commence en 2001 lorsqu’il fonde avec quelques camarades un mouvement appelé « Magyar Reviziós Mozgalom » (Mouvement Révisionniste Hongrois) qui propage l’irrédentisme hongrois et a rendu celui-ci public par des manifestations de rues (il s’agit d’un irrédentisme réclamant la révision des frontières du Traité de Trianon, qui a dépecé la Hongrie en 1920 après la Première Guerre mondiale)

À la fin des années 90, il a fait la connaissance des jeunes patriotes qui fondèrent par la suite le parti Jobbik. Il a aussi fait la connaissance de László Toroczkai à cette époque et s’est lié d’amitié avec lui. Sa participation au blocus du pont Elisabeth en 2002 le fit connaitre dans tout le pays et en fit un « leader ». Ses co-manifestants ont été impressionnés par son courage.

Procès de l’affiche de la campagne anti-EU du référendum d’adhésion de la Hongrie en 2003. Le texte dit : “Il est également possible de dire NON”

Il s’est placé à la tête du mouvement citoyen qui s’est organisé pour réclamer un recomptage des voix à la suite des fraudes électorales. À partir de ce moment, il apparait toujours en opposition au pouvoir et devient une personnalité connue dans la sphère politique. Il a notamment participé à la campagne contre l’adhésion de la Hongrie à l’UE, ainsi qu’au combat pour le démontage du monument soviétique situé Szabadság Tér (Place de la Liberté) à Budapest et pour la restauration de la place (comme elle l’était avant la période communiste).

Bien qu’il n’ait pris part ni comme meneur, ni dans les premiers rangs, au « siège » de la télévision hongroise en septembre 2006, il fut néanmoins poursuivi par le régime. Au même moment où ce « siège » avait lieu, il prenait part au combat pour le démontage du blason soviétique…

Arrestation de Budaházy lors du blocage du pont

Comme il n’était pas prêt à se rendre volontairement aux autorités, il dut passer dans la clandestinité et se cacher. Il a ainsi continué à se battre pour ses idées dans l’illégalité jusqu’à son arrestation le 15 mars 2007. Tandis que la police le recherchait dans tout le pays, il prit part souvent à des manifestations contre le gouvernement. Il ne s’agissait pas de simples participations, mais il apparut plusieurs fois déguisé en public et tint des discours notamment en présence de la police.

Pendant cette période de clandestinité, il a maintenu le contact avec László Toroczkai qui fut connu en 2006 comme le meneur dudit siège. C’est ensemble qu’ils ont rendu public en janvier 2007 un projet d’État parallèle pour la Hongrie. C’est ainsi qu’ils ont présenté le 21 avril 2007 une Hongrie appelé Hunnia qui se plaçait à l’opposé de la « Nouvelle Hongrie » du premier-ministre de l’époque, Ferenc Gyurcsány. Les combattants, vêtus de chemises camouflage et de masques à gaz, avaient marché au son de tambour sur la Place des Héros (Hősök tere) à Budapest. À ce moment, György Budaházy se trouvait déjà en résidence surveillé et ne put s’adresser aux milliers de manifestants que via un enregistrement audio. La rumeur prétend que Budaházy se tenait déguisé aux côtés de Toroczkai sur la tribune. Les « sans-peur » ont leur propre émission depuis le 2 mai 2007 sur la radio « Szent Korona » (www.szentkoronaradio.com) ; elle porte le nom de « Budaházy ».

György Budaházy a été contrôlé ou appréhendé si fréquemment par la police qu’on ne peut plus en compter le nombre de fois. Il était déjà assigné à domicile le 22 octobre 2007 mais ne s’y tint pas et participa à la manifestation de la Szabadság tér. Il y a même déclaré publiquement « cracher sur les lois de la République ».

Le 17 juillet 2009, il a un rendez-vous au commissariat de police situé rue Teve à Budapest au sujet d’une manifestation à venir. La police judiciaire l’a alors arrêté et placé en détention préventive pendant plus de deux ans ! György Budaházy était d’abord à la prison de Vác et a été transféré le 24 septembre 2010 à la prison de Budapest.

Le 30 septembre 2011, le tribunal l’a condamné à être assigné à résidence en attente de son procès.

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11 Comments

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  • 0 / 10
  • Robert , 25 septembre 2013 @ 20 h 33 min

    Ce genre de personnes sont de vrais rebelles au système, quoiqu’on puisse penser de leurs idées. Et la reductio ad hitlerum systématique finit par être usé jusqu’à la corde.

  • Malt , 26 septembre 2013 @ 2 h 38 min

    Je prends note de votre distentiation de ces authentiques militants d’extrême-droite (pas comme le FN ou l’UKIP à qui on fait des procès en sorcellerie, le Jobbik est VRAIMENT UNE BANDE DE DINGUES). Mais si vous n’êtes pas d’accord avec l’interviewé, pourquoi allez-vous le voir? Pourquoi NDF serait censé râcler toute la chienlit d’extrême-droite d’Europe? En quoi ce personnage et son interview ont-ils quoi que ce soit à voir avec la ligne du site: le libéral-conservatisme?

  • Malt , 26 septembre 2013 @ 2 h 40 min

    Si c’est pour devenir antisémite, mieux vaut encore se tenir au système. Un pas en avant pour trois en arrière, drôle de manière d’aller de l’avant.

  • LIonel Balanc , 29 septembre 2013 @ 2 h 42 min

    @Malt : les conservateurs doivent savoir ce qui se passe sur leur droite. Ils doivent pouvoir gérer le radicalisme et le canaliser. Informer sur un sujet ne signifie pas que l’auteur est d’accord. Rappelez-vous le slogan de la très conservatrice CSU bavaroise : Rien à droite de la CSU.

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