David-Olivier Reverdy : « À Marseille, il existe des familles qui se battent pour des territoires »

David-Olivier Reverdy est secrétaire adjoint du syndicat Alliance police nationale pour la zone méditerranée. Homme de terrain, il a répondu aux Nouvelles de France afin d’expliquer l’état de la délinquance à Marseille.

Quelle a été votre réaction suite aux déclarations de la sénatrice PS Samia Ghali, qui demande l’intervention de l’armée dans les quartiers nord de Marseille?

Ma première réaction a été la stupéfaction.

Pourquoi ?

La France n’est pas en guerre. Je ne vois pas pourquoi l’armée interviendrait alors que la police est là pour maintenir l’ordre public et lutter contre le trafic de stupéfiants. Nous disposons de services compétents qui produisent des résultats.

Les résultats semblent pourtant marquer le pas…

Laissez-moi vous exposer quelques chiffres. Durant les 5 premiers mois de l’année 2012, à Marseille, la délinquance a diminué de 5%, les vols à main armée de 30% et on a compté autant de saisies d’armes que durant toute l’année 2011. On peut donc dire que les résultats sont bons mais les médias n’en parlent pas parce que l’utilisation de la kalachnikov fait davantage peur.

Pourquoi Marseille est-elle une ville à ce point touchée par la criminalité ?

Il y a des raisons “historiques”, si je peux m’exprimer ainsi. En effet, Marseille, comme Paris dans les années 70 ou comme Grenoble il y a quelques temps, a toujours été une ville un peu “glauque” dans la mesure où le tissu du banditisme est assez présent. Le fait que Marseille soit un port est un élément important. De plus, il y a une forte concentration de cités dans l’agglomération marseillaise, 70 environ. Imaginez, si vous déplaciez les cités de Seine-Saint-Denis à Paris, vous verriez les chiffres de la délinquance croître considérablement. De plus, à Marseille, il existe des familles qui se battent pour des territoires. Les règlements de compte sont d’ailleurs, le plus souvent liés au trafic de drogue.

Comment expliquer l’emploi si fréquent de kalachnikovs ?

La kalachnikov est un phénomène de mode en quelque sorte à Marseille. Beaucoup sont arrivées des Balkans après l’éclatement du bloc soviétique et aujourd’hui la plupart proviennent d’Afrique du Nord et notamment du stock d’arme libyen qui a été découvert et éparpillé. Il s’agit d’une arme qui n’est pas très chère et il est facile de se la procurer.

Combien coûte une kalachnikov aujourd’hui ?

Vous pouvez en trouver une pour 500 euros environ avec son chargeur. Les armes de poing utilisées auparavant par le milieu sont plus difficiles à trouver.

Comment lutter contre cette prolifération d’armes de guerre ?

Il faut couper les réseaux d’approvisionnement même si le travail est déjà très bien fait par ceux qui en ont la charge. Il faut également renforcer la coopération internationale sur ce point.

Le métier de policier est-il devenu plus dangereux à Marseille ?

Un collègue a été tué à la kalachnikov l’an dernier. Nous faisons cependant du mieux que nous pouvons.

Que vous faut-il pour être plus efficace ?

Ce que l’on demande, ce sont des moyens pour développer les renseignements ainsi que les services d’investigation afin de démanteler des réseaux. Il nous faudrait également davantage de moyens “visibles” tels que des CRS ou des personnes en uniforme de manière à gêner les trafiquants.

La police a-t-elle peur d’aller dans les cités ?

Il n’y a pas vraiment de peur mais parfois nous prenons des précautions en nous montrant prêts à intervenir lorsque nous nous rendons dans certaines zones. Nous y allons en masse, par exemple…

Qu’en est-il des riverains qui vivent dans ces cités ?

Ils n’ont pas la vie facile mais pour l’avoir, il faut réaliser des efforts collectifs. Je pense aux témoignages sous X même si les gens ont peur alors qu’ils ne risquent rien. L’Éducation nationale devrait également nous avertir en cas de déscolarisation des jeunes qui sont susceptibles de traîner dans les rues et donc de se livrer à des trafics. Enfin la justice doit également être à la hauteur.

Comment cela ?

A entendre notre nouveau ministre de la Justice, on peut douter de son efficacité. Avec la suppression des peines planchers, c’est un signe d’impunité envoyé aux délinquants. On l’a vu à New York, avec une impunité 0, les résultats sont là. Quand on sait que lorsque l’on s’attaque à un représentant de l’ordre, on sera condamné, on envoie un signal ferme aux délinquants. Le discours de fermeté doit être celui de l’ État ainsi que celui de la justice.

Que pensez-vous de l’attitude du ministre de la Justice Christiane Taubira à cet égard ?

Nous regrettons les propos de Christiane Taubira et nous les dénonçons. Quand on connaît la réalité du terrain, on ne peut pas y souscrire et excuser des délinquants par des considérations sociales. Il faut comprendre que ces gens là (les trafiquants, ndlr) gagnent à 18 ans 100 fois plus que vous et moi. Il faut arrêter de dire qu’ils ont des excuses sociales.

Ressentez-vous une certaine frustration lorsque la justice se montre trop laxiste vis-à-vis des délinquants ?

Une frustration ? Le mot est faible. Quand vous passez des mois à travailler sur une personne, à la surveiller, que vous avez des preuves évidentes de sa culpabilité et que la justice la remet en liberté ou que sa peine est relativement courte, vous êtes plus que frustré ! Et lorsque l’on entend le ministre de la Justice, qui veut réduire le nombre de prisonniers  en libérant les personnes enfermées pour des courtes peines, c’est décourageant. Il faut comprendre que c’est la petite délinquance qui gène les gens en priorité, certains ont trop tendance à l’oublier.

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17 Comments

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  • 0 / 10
  • domremy , 2 septembre 2012 @ 13 h 28 min

    A ODETTE DE LANNOY, j apprécie toujours de lire vos commentaires, mais là je ne suis pas tellement d accord, lorsque vous accusez le gouvernement actuel;
    pour moi, qui suis de droite j accuse le gouvernement précédent qui a tout absolument tout laisser se dégrader depuis des années, aussi bien dans la police,les écoles,les hopitaux

  • Guihalbert , 2 septembre 2012 @ 14 h 04 min

    Je confirme que ces policiers syndiqués, dont beaucoup de responsables sont membres des loges maçonniques.
    La CFE-CGC en a fait l’expérience amère depuis qu’elle a accueilli cette catégorie de fonctionnaires dans ses rangs…
    Ils se sont reproduits comme des doryphores dans toutes les fédérations de la CFE-CGC ! Pour son plus grand malheur, mais avec tous les encouragements des proches de l’ancien président.

  • BUREAU , 2 septembre 2012 @ 17 h 38 min

    Bonjour,

    Les responsables ? Autant la droite que de gauche e tous ces bobos bien pensants qui n’ont pas de racaille dans leur environnement. Et dire que j’ai cru en Nicolas !
    Le karcher était un bon début de solution !!! Avec Mme TAUBIRA, on est servi !!

    Cordialement

  • Gérard (l'autre) , 2 septembre 2012 @ 19 h 29 min

    Toute la faute en incombe à Chirac qui a pondu le fameux décret du rapprochement familial promulgué par Giscard. A partir de ce jour la moitié du Magrheb en a profité. Les autres ont suivi.
    Le problème n’est pas aujourd’hui le manque de police ou son défaut de prendre le problème à bras le corps. Il vient à mon sens de ce que la Justice ne suit pas parce qu’elle est obligée d’appliquer des textes iniques de Loi mémorielles et antiracistes. Ce sont les politiques qu’il faut changer

  • Françoise , 3 septembre 2012 @ 7 h 29 min

    Les politiques changeront enfin quand nous serons enfin débarrassés du cancer qu’est le cumul des mandats.

  • allavena , 3 septembre 2012 @ 18 h 13 min

    un detail presque sans importance mais que je me permet de relever car tous les commentateurs de radio, tele, ou presse ecrite font la meme erreur.vous dites une kalachnikoff alors que cette arme est un fusil d’assaut. donc qui dit un fusil dit un kalachnikoff.c’est un peu comme si vous disiez en parlant du pistolet une beretta.un detail vous dis je.

  • Le Nouveau Croisé , 3 septembre 2012 @ 21 h 24 min

    Comme tout délégué syndical qui se respecte, ce monsieur de la police ne veut pas qu’on intervienne dans sa sphère !
    La rivalité entre police nationale et gendarmerie est bien connue, quand a faire intervenir l’armée seul organisation de défense intérieure et extérieure c’est une idée importante face aux “petits succés” de la police.
    Il faut que l’armée encercle ces quartiers ou ilots (avec ordre de tirer aux jambes sur tous ceux qui tenteraient de fuir) pour que la police fasse son devoir et joue son rôle de fouilles, de contrôles et d’arrestations.
    Marre de ces délinquants que l’on revoit 48h aprés libres et narguants l’autorité !!!

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