Des musiques, des conflits

La chasse aux flics est fermée ? Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, porte plainte contre le rappeur Jo Le Pheno qui distille sa haine de la police dans ses enregistrements : « Où sont les condés ? On va les taper », « Les condés, c’est des petits c… qui méritent de se faire plomber », « Je pisse sur la justice et sur la mère du commissaire », « Il faut se défouler sur la flicaille ». Pourquoi seulement ce groupe ? Dans le genre, il y a affluence avec NTM du pacifique Joe Starr, LIM qui chante impunément « Bande de p’tit merdeux j’enc… la BAC », Minister AMER et son Sacrifice de poulets, ou Brigitte femme de flic, ou encore Face à la police de 113 sorti en 1999, déjà dans l’autre siècle…

Cette plainte marque aussi l’entrée du ministère de l’Intérieur dans la campagne présidentielle, puisque le calamiteux Hollande croit pouvoir se faire réélire. L’appel aux électeurs est encore dans le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté adopté en juillet en première lecture, qui veut aggraver les quotas dans les médias en introduisant le critère des langues régionales en usage en France. Elles devront constituer au minimum 4 % des œuvres d’expression française entendues sur les radios et chaînes de télévision. Le projet a aussi entendu la demande du CSA pour introduire des critères de diversité dans l’audiovisuel où, selon lui, il n’y aurait pas assez de personnes « perçues comme non blanches ». Bientôt Taubira présentatrice du 20 heures de TF1 ?

Exacerber les clivages
En déracinant les jeunes issus de l’immigration, le rap les instrumentalise avec la complicité des institutions. Il n’est pas question de leur permettre de retrouver leurs origines culturelles et musicales, mais d’exacerber les clivages entre leurs communautés et le pays d’accueil. Avec d’autres musiques, ce constat est valable pour les populations originaires d’Afrique du nord. Magyd Cherfi, chanteur du groupe Zebda issu de la banlieue toulousaine, semble espérer l’affrontement : « Puisqu’on n’a pas les codes, puisqu’on n’est pas Français, puisqu’on n’est pas Blancs et que les Français ne nous veulent pas, ils vont vaincre, mais au moins on va leur péter les dents. On a perdu d’avance, mais on va faire des dégâts. »

Si la musique est un outil identitaire privilégié, propre à entretenir les liens collectifs dans les communautés, elle est aussi un outil de communication et de rayonnement, certains l’utilisent pour leurs revendications (on l’observe avec le rap, mais les chansons de la Révolution avaient la même fonction), elle peut aussi être un outil de rassemblement. La musique européenne, celle des compositeurs du baroque, continue de fasciner la planète, joyau musical sans équivalent dans l’histoire de l’humanité. Au lieu de continuer d’exploiter cet outil pacifique de dialogue entre les peuples, on observe une espèce d’acharnement à le détruire. On connaît l’état déplorable de l’enseignement musical en France. En 2013, l’Espagne a carrément supprimé les cours de musique des programmes scolaires obligatoires. Depuis la rentrée, au Québec, les parents musulmans ont décrété que la musique était « haram » (impure) et qu’ils ne permettraient pas à leurs enfants d’assister aux cours. S’il existe une musique céleste, il ne peut en exister en enfer, et c’est sur terre que certains veulent apparemment l’installer.

Thierry Bouzard – Présent

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