Une phobie française de Thomas Thévenoud

Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. » C’est pourtant l’exercice auquel vient de se livrer Thomas Thévenoud, éphémère secrétaire d’État au Commerce extérieur de François Hollande, et néanmoins toujours député de Saône-et-Loire, à travers un livre intitulé Une phobie française, publié chez Grasset.

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Dans leur journal, les Saône-et-Loiriens ont, en effet, eu la surprise (bonne ou mauvaise ?) de découvrir, il y a quelques jours, en avant-première, quelques morceaux choisis de l’ouvrage. Écrit sur un ton guilleret et léger, un peu comme on raconte une blague de potache, l’ancien ministre revient sur ses déconvenues avec le fisc, et sur les conséquences qu’elles eurent pour lui.

Sur le fond, le parlementaire, qui avoue faire un retour progressif à l’Assemblée nationale, ne change pas de ligne de défense. De la négligence, encore de la négligence, toujours de la négligence ! Il confesse, toutefois, avoir « depuis toujours un rapport particulier à l’argent ». De le dépenser même lorsqu’il ne l’a pas. De le voir filer, impuissant, entre ses doigts. Et de repousser les échéances difficiles, dont font apparemment partie les impôts dont chaque contribuable doit s’acquitter.

L’intérêt de ce livre, outre qu’il constitue sans doute pour son auteur un des moyens préfiguratifs de son retour en politique – 2017 sera vite là -, est riche d’enseignements. Comme d’apprendre, par exemple, que grâce à M. Thévenoud, « les phobiques administratifs n’ont plus peur. Ils peuvent sortir de chez eux la tête haute », et qu’ils lui écrivent pour le lui dire. Il n’y a plus qu’à conseiller à notre député d’ouvrir un cabinet de thérapeute et de poursuivre ainsi l’œuvre bienfaitrice qu’il a commencée. Pour les autres (celles et ceux qui paient leurs impôts), ils continueront d’aller voir… le percepteur.

Mais plus fort encore. Notre phobique administratif en chef, en fin psychologue qu’il est, a remarqué que certains de ses collègues du palais Bourbon le bâtaient froid désormais. Il « voit bien que certains lui en veulent d’avoir été le révélateur de leurs turpitudes ». À cause de lui, « ils ont dû aller voir leur percepteur, régulariser leur situation en urgence, en finir avec des années de retard et de mauvaises déclarations ». Mais heureusement, parmi tous ces êtres rancuniers, parmi tous ces députés d’une ingratitude sans nom pour celui qui les a sauvés, il en est au moins un qui, un jour, lui a dit merci.

Après une telle lecture, nombreux seront celles et ceux qui ne sauront s’ils doivent rire ou pleurer. Rire des dérives de cette République bananière qui aurait fait le bonheur de La Fontaine ou de Voltaire, eux qui ont si bien su dépeindre les excès de leur temps. Ou pleurer, tant les valeurs les plus élémentaires, celles que tout parent tente d’inculquer à ses enfants, sont aujourd’hui foulées aux pieds par des personnages indignes des fonctions que le peuple leur délègue.

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