L’indigénat occidental

On nous a plusieurs fois fait le coup du respect pour les coutumes indigènes : je me suis déchaussé pour visiter le Grand Palais de Rama Ier à Bangkok, comme j’ai proféré Salam aleikum en entrant dans le vestibule du chef peul de Rey Bouba (Cameroun).

J’ai toujours trouvé cela parfaitement normal et facile de respecter us et coutumes (je m’étais renseigné auparavant), pour autant qu’on respecte les miennes. C’est un fait que le tourisme – flot de dollars – peut devenir une agression, plus ou moins lourde et insupportable : certains jours les trottoirs de la rue Lepic à Montmatre sont impraticables ! La buée exhalée par la respiration de milliers de visiteurs est un danger pour beaucoup d’édifices de la capitale. On y a déjà paré à Lascaux !

Je n’ai jamais regardé, sans honte, ces hordes de débraillés visiter un calvaire breton, circuler dans un temple bouddhiste comme le Wat Phra Kaeo ou le Wat Pho à Bangkok ou entrer en mini-shorts dans l’abbaye Sainte Madeleine du Barroux, tout en pérorant lors d’un office…

Je ne me suis jamais mêlé aux foules  qui vont bééer à toutes occasion, sans souci de gêner telle ou telle population. L’idée que des hôtels aient envahi le site du Macchu Pichu ou encerclent la base d’Ayers Rock en Australie me hérisse et je fuis, bien que parisien, les escaliers du Sacré Cœur comme la nef de Notre Dame où, les croyants se retrouvent parqués entourés de touristes. Vivant outre-mer et voyageant souvent, je me suis quand même soumis aux rites touristiques pour admirer sans retenue (mais ce sont des pierres) Prambanan, Sambisari ou Borobudur où, une espèce de visiteur trouvait hilarant de se hisser sur une statue de Bouddha et un autre de coiffer telle divinité de son chapeau de touriste.

Respectant profondément mon patrimoine, j’ai toujours respecté celui des autres, aussi maigre soit-il et comme archéologue, je n’ai jamais fouillé  tel endroit que les villageois considéraient sacré ou tabou. Si on se fâche – à juste titre – du nombre de crétins grimpant sur Uluru (Ayers Rock), sans respect pour le prix que les Aborigènes attachent à leur belle montagne sacrée, nous – indigènes de France – devons nous élever, haut et fort, contre les innombrables agressions que subissent les édifices chrétiens, même les plus humbles.

Je trouve ridicule que certains se précipitent – en totale ignorance de l’histoire – dans la repentance occidentale, sous les tropiques et dans l’indifférence ou l’agression matérielle contre leur propre indigènéité.

 

Charles Chaleyat

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