Qui a fait assassiner Marien Ngouabi, le président marxiste du Congo?(Vidéo)

Le 19 mars 1977. l’annonce est faite sur la radio officielle congolaise. Un commando-suicide à la solde de « l’impérialisme aux abois » a tiré à bout portant sur le « camarade Ngouabi ». Moins de 12 heures après sa mort, un comité militaire du Parti congolais du travail, la formation marxiste-léniniste que Ngouabi a fondée en 1969, s’est octroyé les pleins pouvoirs. Composé de 11 personnes, ce comité porte à la tête de l’État le ministre de la Défense, le commandant Denis Sassou-Nguesso.

Le jeune officier devient chef de l’Etat – du moins pendant quelques jours. Ce qui, en pleine Guerre froide, inquiète le Quai d’Orsay. La garde personnelle de Denis Sassou-Nguesso est composée de militaires cubains. Il passe pour prosoviétique. Il est réputé être « radical ».

« Ce que nous savons de la personnalité du commandant Sassou-Nguesso laisse prévoir une nouvelle radicalisation d’un pouvoir qui se préparait à revenir à la modération, soutient une note du Quai d’Orsay du 25 mars 1977. La ligne générale politique du pays ne devrait cependant pas subir de modification fondamentale. On peut simplement craindre un accroissement de la présence soviétique et cubaine. »

Même si l’économie congolaise connaît des difficultés (dues à la chute de la production pétrolière et à la fin de l’exploitation des mines de potasse, notamment), beaucoup de Congolais pleurent un chef d’État qui jouit d’une véritable popularité. D’origine modeste, ce militaire préférait les treillis aux tenues d’apparat, les casquettes en toile aux képis. Il lui arrivait même de travailler aux champs.

Dans les cercles du pouvoir, toutefois, Ngouabi ne faisait pas l’unanimité. Il a dû déjouer une dizaine de tentatives de coup d’État et a même échappé à un accident d’hélicoptère.

Il n’était pas, non plus, en odeur de sainteté à Paris. Cet ancien chef de bataillon, bien que formé en France, ne cessait de dénoncer le « néocolonialisme ».

Chasse aux sorcières

Au lendemain de son assassinat, les nouvelles autorités mettent en cause un commando qui aurait eu des complices au sein de la garde présidentielle. Soupçonné d’être de mèche avec les assassins, l’ancien président Alphonse Massamba-Débat est vite arrêté. Le défenseur du « socialisme bantou » — à la différence du « socialisme scientifique » prôné par Ngouabi — reconnaît avoir trempé dans une cabale, toujours selon la thèse officielle. Ses « aveux », qui donnent la curieuse impression d’être lus, sont même diffusés à la radio.

« Il s’agit en fait d’un montage de déclarations […] qui ne peut convaincre aucun observateur de bonne foi et laisse une impression pénible », rapporte l’ambassadeur de France, Bertrand Dufourcq, le 24 mars 1977.

Massamba-Débat sera sommairement jugé par une cour martiale et fusillé. Son ancien Premier ministre, Pascal Lissouba, lui aussi arrêté, sera condamné à mort, une peine qui sera commuée en détention à perpétuité. Il sera libéré deux ans plus tard.

Quelques jours après la mort de Ngouabi, le cardinal Émile Biayenda est lui aussi assassiné.

 

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