Daech, naissance d’un État terroriste

Étudier les rouages de l’organisation État islamique (EI), ou comment une “start-up du terrorisme” s’est élevée en quelques années au rang de “multinationale du terrorisme” : tel est l’objet d’un saisissant documentaire qui sera diffusé le 10 février sur Arte.

Réalisé par Jérôme Fritel (réalisateur notamment de “Goldman Sachs, la banque qui dirige le monde”, et de “Mittal, la face cachée de l’empire”), le documentaire de 52 minutes “Daech, naissance d’un État terroriste” a été tourné en un mois en Irak et à la frontière turque.

Au départ, l’EI était “une start-up du jihadisme”, raconte Jérôme Fritel à l’AFP. Mais les Américains sont partis d’Irak en 2011 “en laissant des braises mal éteintes, qui ont été ravivées par la guerre civile syrienne, et dont les flammes ont contaminé l’Irak. En quelques années on est passé à une organisation qui aujourd’hui contrôle un territoire grand comme la moitié de la France”.
Grâce à la contrebande de pétrole brut à laquelle elle se livre, l’organisation peut gagner entre 500 000 et 1 million d’euros par jour, estime le réalisateur, qui a interviewé plusieurs experts irakiens et français, mais aussi des trafiquants à la frontière turque, très perméable.

L’équipe de tournage ne s’est pas rendue directement dans les territoires contrôlés par l’EI mais à ses frontières, en Irak et en Turquie, explique le réalisateur. Elle a notamment filmé des scènes étonnantes à un poste frontière créé en Irak par l’EI, où des populations civiles entrent et sortent pour aller faire leurs courses ou toucher leurs salaires de fonctionnaires toujours versés par l’État irakien.

Le recours aux images diffusées par l’EI sur Internet a été volontairement limité “pour mieux décrypter leur propagande, pour essayer de faire comprendre qu’elle fait partie intégrante de leur fonctionnement: à la fois pour attirer les combattants étrangers et pour faire régner la terreur”, précise le réalisateur.
Des images tournées clandestinement par des résistants en Syrie ont également été utilisées.

Le principal enseignement qu’a retiré Jérôme Fritel de son tournage, c’est que l’EI n’est “pas uniquement composé d’égorgeurs barbares : il y a derrière une organisation militaire, mais aussi une organisation administrative”, qui bénéficie également “d’une assise populaire d’une partie de la communauté sunnite”.
Outre le pétrole, elle dispose aussi de réserves de gaz naturel et de phosphates, ainsi que d’une partie du grenier à blé de l’Irak, et pèse ainsi “à peu près 15% du PIB irakien, c’est-à-dire environ 35 milliards d’euros, ce qui correspond à peu près au budget de la défense de la France”, souligne Jérôme Fritel.

Il s’est également rendu compte à quel point l’organisation État islamique arrive à diffuser sa terreur au-delà des territoires qu’il contrôle: “Les gens ne veulent pas parler et ont peur de se retrouver à leur tour sous le contrôle” de l’organisation.

 

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