Un cauchemar nommé Macronix

Par Edmond Furax

Il est rare que je me souvienne de mes rêves mais au petit matin, j’ai fait un tel cauchemar que je me réveillai en sursaut.

En fait, j’avais été projeté dans une BD qui, case après case, narrait l’ascension fulgurante d’un freluquet, dangereux et arrogant, nommé Macronix.

Il s’agissait d’une marionnette robotisée que le président de la République sortant d’Hexagonie et des vampires capitalistes, tous à la solde de forces occultes redoutables, avaient  décidé de mettre au pouvoir, pour conserver les prébendes afférentes soit,  un candidat à l’identique du président mais avec un packaging différent… A cette fin, ils allaient mettre en oeuvre tous les moyens techniques existants en matière de communication, de manipulation, d’informatique, des moyens extraordinaires comme il n’en existe que dans les livres d’anticipation.

Il avait été choisi selon des critères précis: jeunesse, obéissance absolue aux Maîtres du monde, une ambition hors du commun et une présomption qui lui faisait répéter en boucle: “je suis le maître des horloges”.

Plutôt que de continuer en de fatigants exercices de pressions et lobbying, qui certes marchaient bien avec les anciens dirigeants de l’Hexagonie, Mondialix, Europix, Kapitalix, Libéralix, ses principaux “sponsors” étaient convaincus qu’en unissant leurs forces et techniques, ils parviendraient en deux ans à le hisser au sommet, sans qu’il fut jamais élu par ailleurs. Il y avait longtemps déjà que de collusions en collusions, d’accords négociés dans le dos et contre les citoyens, la démocratie avait été vidée de son contenu.

Cependant,  une majorité d’Hexagoniens commençait enfin à se déciller et  à se révolter contre une envolée des prix injustifiée, la misère croissante, l’accaparement du pouvoirs et des finances publiques par une caste de prédateurs qui vidait les caisses, multipliant les  malversations et menant, aux frais de l’esclave contribuable, un train de vie somptuaire.

Depuis des décennies, les gouvernements successifs  faisaient envahir le pays par des étrangers hostiles, auxquels, ils donnaient tous les droits, qu’ils traitaient en enfants gâtés, lesquels se comportaient en terrain conquis, semant la pagaille et la terreur et pour qu’ils puissent venir plus facilement et en plus grand nombre, les dirigeants avaient même supprimé les frontières…

Ils avaient apporté avec eux un culte effroyable, en opposition aux valeurs du pays, qui, entre autres,  anéantissait et maltraitaient les femmes, allant jusqu’à les obliger à sortir habillée en fantôme.

Pour célébrer leur  dieu, la majorité d’entre eux avaient exigé et obtenu des édifices particuliers  et il s’en construisait un tous les deux jours, tant et si bien, qu’il y en avait partout sur le territoire.

En deux ans, des tueurs se réclamant de ce même culte avait sauvagement assassiné deux cents cinquante personnes et fait des milliers de blessés, au nom de leur dieu.

A chaque fois, les Hexagoniens pleuraient beaucoup, déposaient des peluches, des petits coeurs et des bougies sur les lieux des tueries puis oubliaient, se réveillant à la suivante pour répéter ce rituel en psalmodiant: “padamalgam, padamalgam, padamalgam”.

Gavés d’inventions télévisées débilitantes, d’informations orientées ou fictives, subissant  des programmes scolaires et universitaires affligeants, abreuvés de théories fumeuses et malsaines, de propagandes à répétition, avec un  QI en baisse  de plus trois points, beaucoup d’Hexagoniens étaient décérébrés.

La plupart semblait donc supporter plutôt bien ces meurtres et massacres réguliers. Ils s’y habituaient. Comme ils s’habituaient à ce que  la majorité s’appauvrisse de plus en plus, sans raison objective autre que la trahison des élites, une corruption galopante, des lois toujours plus iniques, instaurant une forme de dictature qui censurait avec violence ceux qui osaient s’opposer, au nom d’un art de vivre ensemble en harmonie totale.

Malgré des impôts écrasants, tous les services publics se précarisaient pour avoir le prétexte de les privatiser, à l’instar du délabrement des services de santé… Après avoir touché d’énormes subventions pour créer des emplois,  les multinationales délocalisairnt le travail… et les SDF mouraient abandonnés dans les rues faute de secours,  les gouvernants préférant entretenir les envahisseurs plutôt que soutenir les Hexagoniens. Un agriculteur se suicidait tous les deux jours…

Telle était la situation quand les Maitres du monde firent surgir Macronix de l’ombre à la lumière. Pour le tester, on lui confia divers postes, de plus en plus importants, jusqu’à le nommer Trésorier du pays et le faire mieux connaître du peuple, qui ne l’apprécia pas, exécrant  sa suffisance et ses mesures précarisant plus encore le statut des travailleurs.

L’oppression battait son plein, la justice n’était plus qu’un mot s’appliquant avec férocité et iniquité sur les plus démunis ou les opposants, plus que très laxiste avec les violents, les truands, surtout s’ils appartenaient à l’oligarchie.

Donc un avant avant l’élection présidentielle, on  fit démissionner Macronix et on lui monta un parti politique sur mesure, L’Association du Grand centre, pour séduire le plus possible et y recycler   les caciques et copains des partis moribonds qui risquaient de perdre leurs privilèges.

Evidemment, on lui donna des moyens financiers hors du commun. On mit au service de son hagiographie quotidienne  la totalité des médias et journalistes du pays, tous étant achetés par subventions interposées.

Pour soulever les foules, ses shows étaient millimétrés à grands frais par les plus grands pros de la com et du marketing mondial.

Pourtant, il disait souvent n’importe quoi: ” pensez printemps, l’argent ne se mange pas,  je vous aime farouchement”, etc.

Pire encore, il expliquait aux Hexagoniens qu’il n’avait pas de culture propre, que leurs ancêtres avaient commis des crimes contre l’humanité, il appelait les tueries de masse des “impondérables”…

Et plus, Macronix tenait de discours ridicules, creux, hallucinants, déconnectés, inacceptables,  plus il avait de groupies qui fonctionnaient un peu comme une secte dont il aurait été le gourou, le parant de qualités dont il était dépourvu, par exemple le trouvant beau…

Outre des bataillons de conseillers diversifiés, l’enfant-roi  était toujours accompagné de Macronella, une sorte de maman-mentor, quelque peu inquiétante…  qu’il disait être son épouse. Il parlait tout le temps de sa famille et de Macronella: cela procédait de sa stratégie de communication, voulant se montrer équilibré, fidèle à la même femme, au contraire des précédents présidents. Il jouait la droiture. Macronix portait une alliance à chaque main et l’on ne savait pas avec qui il était uni de la main droite… Des bruits avaient couru, vite étouffés, comme tout ce qui  et aurait pu abimer son image. Le freluquet avait été promu Intouchable, presque saint.

Certes, beaucoup riaient, se moquaient de lui, le dénigraient, ne le prenaient pas vraiment au sérieux, évoquant une bulle médiatique.

Quand après nombre de magouilles, astucieusement orchestrées, l’on vit se fracasser son principal adversaire, advenir des alliances improbables et l’Association du Grand Centre, chaque jour, rejointe par de célèbres vieux prévaricateurs, élus de la nation…

Malgré une mobilisation sans précédent en sa faveur et généralisée, tel un ordre impératif à voter pour Macronix, grande partie des Hexagoniens continuait à ricaner, y compris le soir où il fêta sa victoire avec quatorze jours d’avance.

Rira bien qui rira le dernier…  Comme les scénaristes de Macronix avaient voulu pousser la fable et la réflexion très loin, la BD s’achèvait sur une grande case occupant toute une page où, devenu Pharaon, pour être plus que président, dos à une pyramide éclairée par le haut, le coiffant presque d’une auréole,  après avoir chanté l’hymne hexagonien une main sur le coeur à  l’américaine, le héros discourut avec à ses pieds dix-huit millions d’individus aux yeux crevés, pieds et poings liés, hurlant des slogans à la gloire du demi-dieu Macronix.

C’est alors que je m’éveillais en sursaut.

Heureusement, ce n’était qu’un cauchemar.

En France, jamais tel drame ne pourrait advenir.

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