« L’opinion attend des actes… mais se contente trop souvent de paroles ! »

 

♦ Au gouvernement, certains – comme Gérard Collomb à l’Intérieur ou Jean-Michel Blanquer à l’Education nationale – font montre, dans leurs déclarations, d’une fermeté et d’un désir de réforme que l’on pourrait croire inspirés par la droite. 
Pour Jean-Yves Le Gallou, il y a loin de la parole aux actes…


Le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb a décrété qu’il souhaitait plus de moyens pour expulser les clandestins.
 Le gouvernement commence à ressembler à un gouvernement de droite.

Je crois que le gouvernement d’Edouard Philippe commence effectivement à ressembler à un gouvernement de droite. Si l’on considère qu’un gouvernement de droite enfume avec des déclarations bien senties sur certains sujets comme l’immigration, c’est bien le cas.
 Sauf qu’en matière d’immigration, ceux qui décident ne sont ni les ministres, ni les préfets, mais les juges. 
Les juges administratifs, les juges judiciaires ont de facto tous les pouvoirs, à la fois parce que les lois les leur ont donnés, que le Conseil constitutionnel a veillé à ce que les lois leur donnent tous les pouvoirs, et qu’ils interprètent à leur manière, c’est-à-dire d’une manière totalement idéologique, un certain nombre de textes généraux comme la Convention internationale des droits de l’enfant ou la Convention européenne des droits de l’homme. 
Les ministres parlent en matière d’immigration, mais ils ne gouvernent pas, ce sont les juges qui décident aujourd’hui.

Tant qu’on ne touchera pas au pouvoir des juges, on ne fera rien.

Ce serait donc plutôt à la ministre de la Justice d’intervenir sur ce sujet-là ?

Non,  je crois que c’est plus profond que cela.
Il faut changer l’équilibre des pouvoirs. 
Il faut notamment retirer aux juges la possibilité d’interpréter à leur guise et d’une manière purement idéologique un certain nombre de textes généraux qu’on trouve dans la Convention européenne des droits de l’homme ou la Convention internationale des droits de l’enfant, par exemple, ou même l’interprétation tout à fait abusive de la Convention de Genève sur les réfugiés.
 Il faut retirer aux juges le pouvoir de décision, le pouvoir exécutif qu’ils ont acquis aujourd’hui. 
C’est pire que sous l’Ancien Régime.

Cela fait longtemps qu’on n’avait pas entendu un ministre de l’Education parler autant de transmission et de retour à une éducation moins idéologisée. N’est-ce pas une déclaration qui pourrait être qualifiée presque « de droite » ?

Je pense qu’il faut garder l’esprit critique.
Mr Blanquer a été le directeur adjoint du cabinet de Mr de Robien. 
A l’époque, Mr de Robien et les gens qui écrivaient ses discours expliquaient qu’on allait en finir avec la méthode globale ou la méthode semi-globale.
Cela remonte à dix ans. Pourtant, rigoureusement rien n’a changé.
En matière d’Education nationale, ceux qui décident, là non plus, ce ne sont pas les ministres. Les ministres parlent. Ceux qui décident sont les syndicats d’enseignants, les Inspections générales et les groupes pédagogistes. 
Je ne sais donc pas si Mr Blanquer aura, comme ministre, davantage de succès qu’il n’en a eu comme directeur adjoint de cabinet. Ce n’est pas sûr. 
En tout cas, si l’on regarde ce qui se fait de concret depuis la rentrée, on a fermé un certain nombre de classes en milieu rural pour faire des classes à douze élèves en cours préparatoire uniquement dans les banlieues de l’immigration et dans les zones d’éducation dites prioritaires.
 Une fois encore, il y a un décalage entre le discours et la réalité.
 Il ne faut pas oublier que Mr Macron a bénéficié du vote des catégories sociales les plus aisées qui sont sensibles à un discours conservateur en matière d’école.
 On leur sert donc le discours conservateur en matière d’école qui leur va bien.
 L’opinion attend peut-être des actes, mais elle a tendance souvent à se contenter de paroles.

Polémia

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