Macronix, prix du meilleur illusionniste de l’année!

Qui a eu cette idée folle de décerner le prix Charlemagne à Emmanuel Macron ? L’histoire ne nous le dit pas et qu’importe, après tout. Un joli prix de consolation qui vient à point nommé après les mauvaises notes – pour ne pas dire le bonnet d’âne – obtenues sur la scène internationale de notre premier de la classe. Car résumons les résultats scolaires du premier de cordée durant ces dernières semaines : frappes en Syrie en dehors de tout droit international et dans un splendide suivisme atlantiste qu’on n’avait sans doute pas vu depuis la IVe République, échec à convaincre Trump – malgré une danse du ventre à la limite de l’indécence – de ne pas jeter au panier l’accord sur le nucléaire iranien. Certes, de belles images pour les magazines people. Et après ? Rien. Nada. Comme quoi il ne suffit pas d’avoir la raie bien comme il faut le jour de la photo de classe pour obtenir le prix d’excellence.

Mais revenons au prix Charlemagne, ou plus exactement au prix international Charlemagne d’Aix-la-Chapelle. Un prix fondé en 1949, au sortir du second conflit mondial, pour récompenser ceux qui sont engagés dans l’unification européenne. Son premier lauréat fut le très curieux comte Richard Coudenhove-Kalergi (1894-1972) qui, dès 1922, lançait un appel à l’unité de l’Europe. Cet aristocrate austro-hongrois (japonais par sa mère) avait des idées pour le moins étranges. Ainsi, il prophétisait ce que pourrait devenir une Europe métissée : « La race du futur, négroïdo-eurasienne, d’apparence semblable à celle de l’Égypte ancienne, remplacera la multiplicité des peuples par une multiplicité des personnalités. » Il prônait, par ailleurs, l’émergence d’une nouvelle aristocratie, fondée sur une sorte d’eugénisme : « Plus un homme sera ensuite parfait dans le physique, le psychique et le spirituel, plus le nombre de femmes parmi lesquelles il pourra choisir sera grand. Seule sera libre l’alliance des hommes les plus nobles avec les femmes les plus nobles, et inversement – les personnes de valeur moindre devront se satisfaire de personnes de valeurs moindres. Ainsi le mode d’existence érotique des personnes de valeur moindre et médiocres sera l’amour libre, celle des élus : le mariage libre. La nouvelle noblesse de reproduction du futur n’émergera donc pas des normes artificielles de la culture de castes humaines, mais plutôt des lois divines de l’eugénisme érotique » (in Idéalisme pratique. Noblesse, technique, pacifisme, 1925). Coudenhove est considéré par certains comme l’un des pères fondateurs de l’Europe. Et l’on dit qu’on ne choisit pas ses parents…

Mais nous n’allons pas faire ici le panégyrique des cinquante-huit lauréats qui ont précédé Emmanuel Macron. On ne sera cependant pas étonné de trouver dans ce martyrologe des personnages comme Jean Monnet, Robert Schuman, Simone Veil, François Mitterrand, Jacques Delors, Valéry Giscard d’Estaing, Jean-Claude Juncker, Angela Merkel, Jean-Claude Trichet, Martin Schulz et le pape François. Le général de Gaulle, qui pourtant fut un acteur clé du rapprochement franco-allemand, ne reçut pas ce prix. Il est vrai qu’il défendit toujours l’idée d’une Europe des nations.

Un prix, c’est fait pour récompenser un travail, une œuvre. Quelle est donc, alors, l’œuvre d’Emmanuel Macron, un an à peine après son élection ? On le sait doué et vouloir aller vite. Mais à ce point ! C’est la chancelière Merkel qui nous donne la réponse : « C’est le vainqueur du prix car depuis qu’il a pris le pouvoir, il amène à l’Europe une nouvelle dynamique, un élan et de l’espoir. » Ça, c’est pour la galerie. La réalité ? Emmanuel Macron a réussi le tour de force de faire croire que les Français avaient voté pour son projet résolument européiste dont les grandes lignes furent tracées par la suite dans son discours de la Sorbonne. Or, n’oublions jamais que le pourcentage des « eurosceptiques » (de gauche comme de droite) avoisina les 50 % au premier tour de l’élection présidentielle de 2017. Si Emmanuel Macron mérite un prix, c’est celui du meilleur illusionniste de l’année.

 

Georges Michel – Boulevard Voltaire

 

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