Espérance de vie, petit rappel à la réalité

François Ier de France, né le 12 septembre 1494 et mort le 31 mars 1547, a donc vécu 52 ans et 7 mois. Claude de France, sa première épouse, est née le 13 octobre 1499 et a rendu l’âme le 20 juillet 1524 ; elle a donc vécu 24 ans et 9 mois. De cette union sont nés les 7 enfants légitimes du roi. Louise de France, l’ainée, ne survivra pas plus de 3 ans et 1 mois ; Charlotte de France, sa cadette, décèdera à 7 ans et 11 mois ; François III de Bretagne, le fils ainé du roi, survivra 18 ans et 6 mois ; Henri II de France, le quatrième de la fratrie, vivra 40 ans et 4 mois ; Madeleine de France disparaîtra à 16 ans et 11 mois ; Charles II d’Orléans passera l’arme à gauche à 23 ans et 8 mois ; Marguerite de France, enfin, battra le record de sa fratrie en atteignant 51 ans et 4 mois. En moyenne, l’espérance de vie à la naissance du couple royal était donc de 23 ans et 1 mois (1).

Louis XV de France est né le 15 février 1710 et s’éteindra le 10 mai 1774 à 64 ans et 3 mois. Marie Leszczyńska, son épouse, fera mieux encore : née le 23 juin 1703, elle tiendra jusqu’au lendemain de son 65ème anniversaire. De leur union vont naitre les 10 enfants légitimes de Louis XV. Si Élisabeth de France atteindra 32 ans et 4 mois, sa sœur jumelle, Henriette de France, mourra à 24 ans et 6 mois ; Marie Louise, la troisième fille du couple royal, aura encore moins de chance et décèdera à 4 ans et 7 mois ; Louis de France, le premier fils de la fratrie, atteindra 36 ans et 4 mois mais Philippe Louis, son petit frère, ne vivra que 2 ans et 7 mois ; le record de la fratrie revient à Adélaïde de France qui verra le XIXe siècle en atteignant presque les 68 ans ; sa petite sœur Victoire de France s’en sortira bien aussi en vivant 66 ans et 1 mois ; Sophie de France décèdera à 47 ans et 8 mois ; Thérèse de France ne vivra pas plus de 8 ans et 5 mois ; Louise de France, enfin, atteindra l’âge tout à fait honorable de 50 ans et 6 mois. En moyenne, l’espérance de vie à la naissance des enfants de Louis XV et Marie Leszczyńska aura donc été de 34 ans et 1 mois.

Ces deux exemples appellent une remarque : nous parlons de fratries royales et pas n’importe lesquelles, celles des enfants du souverain le plus puissant d’Europe. Ces espérances de vie à la naissance sont donc calculées pour les familles qui disposaient sans doute des meilleures conditions de vie possibles à l’époque : que ce soit du point de vue du logement, de l’alimentation, de la sécurité ou de l’accès à des soins médicaux, il est plus que vraisemblable que les enfants de François Ier et ceux Louis XV étaient de ceux qui bénéficiaient des meilleures chances de survie au XVIe et XVIIIe siècles respectivement.

Et maintenant, un petit graphique tiré du 410e bulletin d’information de l’INED (2) :

Ce graphique illustre l’espérance de vie à la naissance estimée pour l’ensemble de la population française de 1740 à 2004. Sur la deuxième moitié du XVIIIe siècle, vous pouvez constater comme moi que nos ancêtres, les contemporains de la fratrie des enfants de Louis XV et Marie Leszczyńska, vivaient moins de 30 ans en moyenne tandis qu’aujourd’hui, notre espérance de vie à la naissance est supérieure à 80 ans (3). En deux siècles et demi, nous avons gagné plus de 50 années d’espérance de vie.

Comme l’exemple des deux familles royales l’illustre, la faible espérance de vie de l’époque préindustrielle s’explique notamment par une mortalité infantile très élevée. Au milieu du XVIIIe siècle, c’est pratiquement un enfant sur trois qui ne fêtait jamais son premier anniversaire (environ 30%) ; aujourd’hui, cette probabilité est tombée à moins de 0,4%. Mais ce n’est pas tout : jusqu’au milieu du XXe siècle, l’espérance de vie d’un homme ayant atteint son 60e printemps ne dépassait pas 13 ou 14 ans ; selon les derniers chiffres de l’INED, il leur reste désormais plus 22 années à vivre. Là où Adélaïde établissait un record familial en atteignant l’âge canonique de 68 ans, une française ayant dépassé le cap des 60 ans peut désormais espérer vivre encore 27 années.

À part ça, en effet, il semble que Charlemagne ait vécu plus de 70 ans…

> le blog de Georges Kaplan

1. Certaines sources évoquent la naissance d’un huitième enfant, Philippe, qui n’aurait pas survécu à sa première année.
2. Gilles Pison, France 2004 : l’espérance de vie franchit le seuil de 80 ans (2005).
3. Un peu plus de 78 ans pour les hommes et presque 85 ans pour ces dames au dernier pointage.

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5 Comments

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  • olrik , 11 juillet 2012 @ 9 h 21 min

    Adam a vécu 900 ans (après avoir été provisoirement immortel). Quand Caïn a tué Abel, ses petits-enfants avaient 80 ans. Les patriarches ont vécu plusieurs siècles. C’est à la suite du déluge que la durée de la vie a été raccourcie, en raison notamment de la modification des conditions atmosphériques.

  • morin , 12 juillet 2012 @ 13 h 39 min

    certes les enfants de la famille Royale et ceux de la haute noblesse avaient plus de chance de vivre vieux, car mieux nourris et pas fatigués, usés par les tâches ingrates. Mais ne pas oublier le fort pourcentage de consanguinité dans ces milieux, le mariage avec des cousins germains étaient courant, cela a t il une incidence sur a capacité a résister aux maladie exemple l’hémophilie du tsarévitch. l’église normalement demandait aux paroissiens de dénoncer ces unions pouvant avoir des conséquences graves sur la viabilité des enfants naissants de ce type d’accouplements, j’ai pu constater chez certains individus produits de ce genre d’accouplements des conséquences graves (enfants anormaux ou ayant des disgrâces physiques très invalidantes), lancer une étude la dessus ne serait pas dénué d’intéret

  • Fikmonskov , 12 juillet 2012 @ 14 h 23 min

    Que veut montrer/prouver cet article, dont le titre semble vouloir dire que ces faits sont niés ?

  • c , 12 juillet 2012 @ 15 h 14 min

    Ceux qui font la généalogie de leur famille, et même issue de famille de paysans (et pas de bourgeois, ni de nobles) et c’est très possible dans certaines régions de France quand les registres ont été conservés, sans difficultés jusqu’au milieu du XVIème , peuvent s’apercevoir que certains de leurs ancêtres de cette époque sont morts à quatre vingts ans révolus à l’époque de François 1er ou de Louis XV pour reprendre les exemples de l’article, même si effectivement il y avait une importantes mortalité infantile (mais beaucoup d’enfants!) et la mortalité des épouses en couche. Les familles françaises malgré les pestes au Moyen Age, les guerres civiles, guerre de cent ans, guerre de religions, etc, ont permis que la France soit le pays le plus peuplé d’Europe à la veille de la Révolution et ceux avec un apport très très minimum de population venue de l’extérieur.
    Donc il y a eu de tous temps des personnes à la longévité certaine. Les familles royales ne sont pas forcément un modèle tout comme aujourd’hui certaines familles de la “haute” désormais républicaine, bien sûr!
    La progression de la longévité de la deuxième partie du XXème siècle et notamment en France, ne va pas forcément est la même au XXIème siècle. Il n’est pas évident que l’on puisse faire des courbes statistiques correctes. Mais c’est comme la théorie des climats…

  • K. , 12 juillet 2012 @ 17 h 34 min

    L’auteur de l’article oublie de présenter plusieurs courbes.
    Si l’espérance de vie à la naissance est un point intéressant, il faut aussi la donner à différents âges, en effet, si l’espérance de vie à la naissance est fortement plombée par la mortalité infantile, l’espérance de vie à 10 peut être très très accrue.

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