Quand Poutine critiquait la volonté des Etats-Unis d’imposer leurs valeurs aux autres! (Vidéo)

Il y a dix ans, Vladimir Poutine a prononcé à Munich un discours sur les perspectives de développement de la politique mondiale dans lequel il a critiqué les États-Unis pour leur conception d’un monde unipolaire et leur volonté d’imposer leurs valeurs à d’autres pays. Ces dix années écoulées ont confirmé que le président russe avait raison.

L’expert militaire Vassili Kachine analyse pour Sputnik l’actualité des idées exposées à Munich par Vladimir Poutine.

Il y a dix ans, le président russe a déploré le fait que les États-Unis et leurs alliés aient opté pour une politique unilatérale à partir de positions de force encourageant la course aux armements et la prolifération des armes nucléaires. Il a constaté l’échec de la stratégie des États-Unis visant à établir une hégémonie globale et a appelé à mettre en place un nouveau système de sécurité mondiale basé sur un nouvel équilibre des forces et reflétant le rôle croissant des grands pays émergents.

Un discours prononcé à la charnière de deux époques

Son discours a été prononcé à une époque historique qui a pris fin. La crise financière mondiale de 2008-2009 n’avait pas encore commencé et, avec elle, une grande récession mondiale dont les conséquences n’ont pas encore été surmontées. En 2007, l’avenir de l’économie mondiale semblait optimiste. La Russie était en pleine croissance économique (+8,5 %). La Chine traversait une période où les exportations montaient en flèche et rien n’annonçait la fin de ce processus. Les États-Unis étaient sûrs de l’intangibilité de leur système économique et politique en dépit des premiers indices d’une prochaine crise.

Poutine a-t-il changé l’ordre mondial?
La situation générale a beau avoir changé, les principales idées et estimations formulées par Vladimir Poutine à Munich restent justes. Les visées hégémoniques des États-Unis ont conduit à la déstabilisation de l’ordre mondial et ont aggravé la crise qui y avait déjà éclaté. Les actions des États-Unis au Proche-Orient et en Afrique du Nord caractérisées par une irresponsabilité croissante et un défaut de cohérence se sont soldées par une suite de défaites catastrophiques.
En 2008, la Russie porte son premier coup dur au prestige américain

En 2008, la Russie a porté un coup dur au prestige américain. La Géorgie, partenaire proche des États-Unis, qui espérait être protégée par ses relations privilégiées avec Washington, a attaqué l’Ossétie du Sud et les casques bleus russes qui y étaient déployés conformément au mandat des Nations unies. La riposte militaire de la Russie a mis en échec cette opération douteuse lancée par le président géorgien Mikhaïl Saakachvili : le partenariat avec les États-Unis a cessé d’être une garantie d’impunité.

Malheureusement, la politique extérieure américaine empreinte de dogmatisme et idéologisée à outrance a empêché la Maison Blanche de prendre au sérieux la position de la Russie sur l’avenir de l’organisation du monde et le discours de Munich du président russe. Dans une grande mesure, cela tenait au dogme enraciné aux États-Unis d’après lequel la Russie était une puissance en déclin.

Steinmeier: l’élection de Trump est la fin de l’ordre mondial du XXe siècle
Depuis les années 1990, la politique américaine est fondée sur le postulat du déclin irréversible de la Russie. Par conséquent, tout succès de la Russie revêt un caractère provisoire. Washington estime que les États-Unis doivent se contenter de patienter et contenir la Russie sur certains axes pour que le problème russe soit résolu de lui-même.

La Russie est loin d’être une puissance en déclin

L’histoire post-soviétique de la Russie est parsemée de nombreux problèmes. Cependant, la réalité objective est telle qu’entre 1999 et 2015, le PIB russe a augmenté de 86 %. L’indicateur semble être relativement bas par rapport à la croissance chinoise, mais il est largement supérieur à la moyenne mondiale. En 2012, la Russie est parvenue à un accroissement naturel de sa population. Sa puissance militaire connaît un essor depuis 2009. La Russie a devancé les États-Unis en matière de modernisation de son arsenal nucléaire.

Poutine: les tentatives de créer un monde unipolaire ont échoué, la balance se rétablit
Toutefois, les États-Unis continuent à s’en tenir à l’idée du « déclin de la Russie ». Cette obstination a rendu impossible un compromis américano-russe raisonnable et a prédéterminé une nouvelle série de crises ayant eu un impact négatif sur les positions américaines dans le monde. La Russie a mis en échec les projets américains d’intervention en Syrie en 2012-2013 et a réagi d’une façon efficace au soutien américain du coup d’État en Ukraine en 2014. Un an plus tard, en 2015, la Russie s’est engagée avec succès dans le conflit syrien, mettant en échec les projets américains relatifs à ce pays. Plus encore, Alep, cette ville clé sur le théâtre des opérations en Syrie, a été prise par l’armée syrienne avec le soutien de la Russie malgré les tentatives américaines pour l’empêcher.
Une confrontation avec les USA? Non, la défense de ses intérêts légitimes

Pendant cette période, la Russie n’a pas cherché une confrontation avec les États-Unis. Tout ce qu’elle entreprenait était en réaction à la violation grossière et non dissimulée de ses intérêts légitimes et aux tentatives de porter atteinte à sa sécurité. Comme en 2007, la Russie se fixe pour objectif la mise en place d’un système de relations égales en droits et stables avec les principales puissances mondiales dans l’intérêt de sa sécurité et de son développement.

Le système de domination unipolaire touche-t-il à sa fin?
A présent, il reste à espérer que les changements radicaux dans la politique intérieure des États-Unis ouvriront la voie au dialogue recherché depuis si longtemps.
Le directeur de l’Institut des relations internationales et de développement régional auprès de l’Université pédagogique de Chine orientale Feng Shaolei a exposé à Sputnik sa vision du discours de Vladimir Poutine.

« Je tiens à noter l’actualité de tout ce que le président russe a vivement critiqué lors de la Conférence sur la sécurité de 2007, à savoir l’élargissement de l’Otan à l’est de l’Europe, le retrait unilatéral du Traité sur la défense anti-missile, ou la politique américaine à sens unique. Trump exprime l’espoir d’une normalisation des relations avec la Russie, mais l’élargissement de l’Otan à l’est et la politique extérieure des États-Unis restent des points douloureux », a-t-il signalé.

L’expert du Centre des relations internationales auprès de l’Institut linguistique de Pékin Jia Lieying lui fait écho.

« A mon avis, les thèses de l’intervention de Vladimir Poutine lors de la Conférence sur la sécurité internationale de Munich restent à l’ordre du jour. Dix ans se sont écoulés, mais personne ne dirait que ses paroles ont perdu leur actualité. Il a critiqué un monde unipolaire, faisant valoir le concept de multipolarité. Aujourd’hui, le monde multipolaire peut être considéré comme un objectif à atteindre », a signalé l’expert, ajoutant que le nouveau président des États-Unis devrait prendre connaissance du discours prononcé par Vladimir Poutine il y a dix ans car son contenu n’a rien perdu de sa valeur.

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