Les confusions de Monseigneur Benoist de Sinety (Vidéo)

Jean-Pierre Maugendre, président de Renaissance catholique, a fait l’effort de lire l’ouvrage pro-immigration de Mgr de Sinety, évêque auxiliaire de Paris, que nous avions déjà évoqué ici et là. Son analyse montre que l’évêque a les idées bien confuses. Avant que des voix s’élèvent, encore faudrait-il que la pensée s’élève… :

Vicaire général de Paris, ancien curé de Saint-Germain-des-Prés, Mgr Benoist de Sinety est un homme important. Présenté par La Croix comme le bras droit du nouvel archevêque de Paris Mgr Aupetit, il s’est fait connaître du grand public à l’occasion de l’homélie qu’il a prononcée lors des funérailles de Johnny Hallyday. Nous avons été heureux d’y apprendre que malgré sa vie, disons un peu chaotique, nous n’avions pas de souci à nous faire sur le sort posthume du défunt, non plus que sur le nôtre d’ailleurs, ce qui est toujours une bonne nouvelle.

Nous sommes des enfants gâtés

Modestement intitulée Il faut que des voix s’élèvent, et sous-titrée Accueil des migrants, un appel au courage, la copieuse épître – en fait un petit livre de 130 pages – de Mgr de Sinety a le mérite de la simplicité. Les catholiques français « petit club d’enfants gâtés…et cyniques » ont l’impérieuse obligation morale d’accueillir tous les immigrés qui se présentent à eux. Combien ? 1, 10, 100 millions ? Nul ne sait. Quand on aime, on ne compte pas ! Ceci parce que « chez l’individu, c’est l’éthique de conviction qui doit prévaloir » et parce que c’est le seul moyen de rester fidèle à « nos valeurs – liberté, égalité, fraternité » et à notre vocation de « patrie des droits de l’homme ». Voici une bien curieuse synthèse de l’Évangile. Cette obligation catégorique ne supporte ni limites ni réserves ! Mélange d’impératif moral kantien, par nature indiscutable, et de posture gaullienne : « L’intendance suivra » !

Cette statue du commandeur est cependant mise à mal par de fâcheuses omissions et d’étranges affirmations.

De fâcheuses omissions

Ainsi, les mots islam ou musulman ne sont pas employés une seule fois. N’est-ce pas, malgré tout, une partie de la difficulté ? De même, la réalité que constitue l’utilisation de ces flux de migrants par des terroristes islamistes n’est à aucun moment évoquée.

Mgr de Sinety ne tarit pas d’éloges sur la générosité de la chancelière Angela Merkel, accueillant en 2015, en quelques mois, un million de migrants. Il n’est fait aucune mention des 1500 agressions sexuelles commises par des clandestins la nuit du Nouvel An 2016, principalement à Cologne, ni de celles perpétrées par des réfugiés lors de festivals Pop en Suède en 2017. Depuis, madame Merkel a sensiblement révisé sa position.

Des prélats, et non des moindres comme le cardinal guinéen Robert Sarah, dénoncent cette immigration massive : « Vous êtes envahis par d’autres cultures, d’autres peuples, qui vont progressivement vous dominer en nombre et changer totalement votre culture, vos convictions, vos valeurs ». Les lecteurs de Mgr de Sinety n’en sauront rien.

D’étranges affirmations

Benoîtement, le vicaire général de Paris affirme sans rire : « Nous n’avons rien fait pour accueillir les migrants » et« Les migrants en situation irrégulière n’ont aucun droit, aucun salaire minimum, aucune couverture sociale ». Quelques faits réfutent ces jugements à l’emporte pièce : l’AME (Aide Médicale d’Etat) réservée aux clandestins coûtera un milliard d’euros en 2018. Tout demandeur d’asile bénéficie de la CMU (Couverture Maladie Universelle). Un réfugié en attente d’une place dans un centre d’hébergement bénéficie d’une ATA (Allocation Temporaire d’Attente) de 340 € par mois. Une AMS (Allocation Mensuelle de Subsistance) variant entre 91 et 718 € par mois peut compléter le pécule, etc. La situation est à ce point dramatique pour les migrants qui souhaitent nous rejoindre, que leur flot ne tarit pas et qu’ainsi, par exemple en 2017, 262 000 titres de séjour ont été accordés.

Mgr de Sinety ne répugne pas à l’énoncé des lieux communs les plus éculés. Ainsi : « Cette terre (la France) a toujours été celle des migrations ». Nous savons depuis les travaux de Jacques Dupâquier (Histoire de la population française) que l’apport des étrangers dans la composition de la population française a été marginal, par rapport aux populations autochtones, jusqu’à la fin du XIXesiècle.

Le principe de non contradiction n’était sans doute pas au programme des études de monseigneur le vicaire général qui affirme : « Le devoir des immigrés de s’intégrer dans le pays d’accueil ne consiste pas à leur demander de devenir des “ gens comme nous ” ». Et « en même temps » : « Chacun de ces déracinés souhaite partager notre vie, espère que nous lui ferons un peu de place après un si long voyage pour qu’à son tour, lui aussi puisse vivre comme nous ». Comprenne qui pourra. Quant au souhait unanime des migrants de devenir « comme nous » sans doute serait-il bon que les sources de cette précieuse information soient mieux précisées ! On peut en effet s’interroger sur le fait de savoir si, vivre « comme nous », signifie adopter nos us et coutumes ou bénéficier de notre niveau de vie.

Un plaidoyer compassionnel

En fait, ce texte, plus qu’un raisonnement argumenté est non pas un appel au courage comme l’indique le titre mais un plaidoyer émotionnel. Rien n’est épargné pour faire pleurer Margot : le cadavre du petit Eylan sur une plage de Turquie, les « migrants qui ont traversé la mer sur des embarcations de fortune, bravé des déserts, vécu l’esclavage », etc. Mgr de Sinety évoque avec des trémolos dans la voix ses paroissiens retraités qui ont changé leur voiture pour acquérir un monospace afin de mieux véhiculer leurs migrants… Bene. Recte. Optime. Il y a cependant une catégorie de pauvres qui échappe à la compassion de Mgr de Sinety : les « petits blancs » de la France périphérique décrite par Christophe Guilluy qui survivent à Roubaix, Trappes, Bollène ou Béziers dans un univers culturel qu’ils ne reconnaissent plus. Il ne s’agit pas de nier la pauvreté et la misère des migrants, comme si on faisait un tri entre les miséreux, mais de souligner que les encourager à rester sur un continent dont les capacités d’intégration sont saturées c’est, aussi, les condamner à figurer en tête des statistiques de chômage, criminalité, illettrisme, etc.

Portant son cœur en écharpe, Mgr de Sinety élude les questions qui sont pourtant au cœur de la crise migratoire que nous vivons :

Existe-t-il un droit du peuple français à la continuité historique ?
La notion de civilisation est-elle pertinente où les hommes ne sont-ils tous que des consommateurs ou des producteurs interchangeables ?
Pourquoi existe-t-il des civilisations qui créent de la richesse et d’autres qui ne produisent que de la misère ?
Existe-t-il un projet d’islamisation de l’Europe par certains musulmans susceptibles d’utiliser, au service de cet objectif, les flux migratoires ?
Un taliban afghan est-il aussi « intégrable » qu’un napolitain catholique ?
Est-ce que le désir crée le droit ?
Si Mgr de Sinety cite abondamment le pape François, à aucun moment il ne cite le § 2241 du Catéchisme de l’Église Catholique qui est pourtant clair sur le sujet :

« Les nations mieux pourvues sont tenues d’accueillir autant que faire se peut l’étranger en quête de la sécurité et des ressources vitales qu’il ne peut trouver dans son pays d’origine. Les pouvoirs publics veilleront au respect du droit naturel qui place l’hôte sous la protection de ceux qui le reçoivent. Les autorités politiques peuvent en vue du bien commun dont ils ont la charge subordonner l’exercice du droit d’immigration à diverses conditions juridiques, notamment au respect des devoirs des migrants à l’égard du pays d’adoption. L’immigré est tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d’accueil, d’obéir à ses lois et de contribuer à ses charges »
Il est bien question de nécessité vitale et non pas de droit absolu de chacun à s’installer où il le souhaite.

Un travail en apesanteur intellectuelle

Tout cela laisse la désagréable impression d’un travail mené à la va-vite (« Les révolutions industrielles battaient leur plein » (sic)) dans lequel le sentiment, a priori généreux, tient lieu de réflexion. Sur un tel sujet, on aurait aimé que soient abordées les solutions politiques à mettre en œuvre au regard des vertus morales de force, prudence, justice et tempérance. Et cela en partant de l’observation de la réalité, de toute la réalité. En lieu et place, Mgr de Sinety nous accable d’un discours pour dames patronnesses dénuées d’un minimum de bon sens mais au « cœur gros comme ça ». Il nous fait honte pour les curés de Paris et porte atteinte à la crédibilité de l’Église. À moins qu’il ne soit en mission pour envoyer à la société civile un message « de gauche », coup de balancier en sens inverse après le marquage » à droite » de l’épiscopat français à l’occasion de la Manif pour tous ? Ce ne serait guère plus glorieux et tout aussi misérable. Laissons le mot de la fin à Jacques de Guillebon citant Cicéron : “Ceux qui font tort aux uns pour se montrer généreux envers les autres sont aussi coupables d’injustice que s’ils s’appropriaient le bien d’autrui. Il y a en effet beaucoup de gens qui, avides d’éclat et de gloriole, prennent aux uns pour faire largesse aux autres”.

 

Lu sur Riposte Catholique

 

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