Journalistes, la confiance perdue ?

Le syndicat national des journalistes (SNJ) tenait son congrès à Nantes depuis le 5 octobre. Très marqué à gauche, le SNJ est adhérent à la confédération Solidaires-SUD proche du mouvement trotskyste. Il pèse très lourd dans la profession (48 % des suffrages aux élections pour la carte d’identité des journalistes). Il organisait dans le cadre du congrès un débat public sur le thème : « Journalistes, la confiance perdue ?- Une profession en mal être ? » Un sujet très actuel.

La première intervenante Dominique Pradalié, journaliste à France télévision et secrétaire générale du syndicat, déclare tout de go que la crise de sa profession est due au « climat général » marqué par « la montée de l’extrême droite et des populismes ». Le ton était donné.

Le second, Hervé Kempf directeur du site écologiste « Reporterre «  et de sa publication, mérite l’intérêt. Selon France Inter : « Depuis 1998, il assurait la chronique Ecologie du quotidien national Le Monde. Mais en septembre 2013, il en démissionne car il ne peut y réaliser les reportages qu’il souhaite sur le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Depuis il se consacre entièrement au site Reporterre ». Un site qui a consacré plus de 90 articles depuis le début de l’année à NDDL et aux zadistes dont l’un appelle même au sabotage dans l’édition du jour. Comme Hervé Kempf déclare « vivre de Pôle emploi », il ne doit pas consacrer beaucoup de temps à la recherche d’un emploi.

Pour lui on ne doit pas parler de « maintien de l’ordre » mais de « politique de répression ». Il affirme que : « Le mal être des journalistes est celui du système » et dénonce son responsable, la main mise de la finance sur la grande presse : « les 4/5 appartiennent aux banques, aux grandes entreprises et à celles de la téléphonie ». Cela conduit à la servilité des journalistes qui dans un rapport dominants/dominés deviennent des domestiques.

Jean-Christophe Boulanger est président du Syndicat de la presse d’information en ligne ( SPIIL) qui revendique 150 adhérents. Pour lui le Web est « plus pratique et permet de faire de la meilleure qualité que le print » et avec le web « le journaliste n’ a plus le monopole de fournir de l’info ». Il reconnait que « les gens n’ont plus confiance dans la presse » mais cite le journal La Croix avec bienveillance. Pour lui, l’information est un métier qui a sa propre déontologie, les blogueurs n’en ont pas.

Le dernier intervenant Patrick Eveno est le président de l’Observatoire de la déontologie de l’information (ODI) dont le but est : « d‘effectuer une veille en matière de déontologie journalistique, en s’attachant à déceler les causes de dysfonctionnements et les bonnes pratiques de l’information ». Ce qui n’empêche pas Eveno de déclarer que : « le droit de vote ne sert à rien si le public n’est pas éclairé par des journalistes » et de s’étonner de l’importance donnée par les médias à « la chemise déchirée du DRH d’Air France » alors qu’on ne parle pas « des jeunes blessés par la police dans les banlieues ». Curieuse déontologie.

Face au mal être des journalistes, les invités du SNJ devaient trouver « des raisons d’espérer ». Il n’y en eut guère. On continua à dénoncer « le raidissement du capitalisme » et « le pouvoir policier ». On parla de journalisme coopératif, de mondialisation de l’information, de mutation technologique sans rien proposer de précis.

Les références au modèle Mediapart, à Politis, à Acrimed ou à la nantaise Lettre à Lulu suffisaient-elles à faire croire que « le public est là quand il y a de la bonne info » ? Si le principe des aides à la presse n’est pas remis en cause, on souhaite les conditionner au respect par les propriétaires de journaux de la législation sociale et de la déontologie dont le contenu apparaît pour le moins flou.

Le débat du SNJ devait être un temps fort de son congrès. Ce fut un vrai flop. La parole fut monopolisée par les journalistes.. FR 3 Pays de la Loire en annonçant le débat écrivait : « L’exigence légitime de rigueur, de qualité et d’équilibre de l’information passe par une prise de conscience » Ce ne fut pas le cas.

Les vraies causes de la désaffection du public pour la presse subventionnée, les raisons de la perte de confiance dans les journalistes ne furent ni étudiées ni même évoquées

Il leur restait pour se consoler le plantureux buffet offert avec l’argent des contribuables, par Johanna Rolland, Présidente de Nantes Métropole. Elle leur devait bien ça !

Photo : DR
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Regagner la confiance

Résolution finale du 98e congrès national du SNJ

Le Syndicat National des Journalistes, réuni en congrès à Nantes du 5 au 7 octobre, condamne le vote de la loi Bloche par le Parlement, après une procédure accélérée. Sous couvert de “renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias”, cette loi éclate l’éthique professionnelle, en imposant autant de chartes de déontologie que d’entreprises, élargit les compétences du CSA -instance qui n’est pas indépendante du pouvoir politique – à la déontologie des rédactions, et fragilise la protection des sources.

Le SNJ regrette que cette loi ne s’attaque pas aux maux qui rongent la profession : la concentration dans les médias et la fragilisation des équipes rédactionnelles, la dégradation des conditions de travail liée aux évolutions numériques et à la généralisation de l’info en continu sur tous supports.

Par ailleurs, le SNJ dénonce le recours à l’auto-entreprenariat par des entreprises de presse ou de l’audiovisuel pour un travail de journaliste. Ce régime, le plus souvent imposé par l’employeur, prive le journaliste de l’ensemble de ses droits.

Le SNJ met en garde les pouvoirs publics contre la tentation de soutenir en l’état le projet de directive européenne visant à créer un droit voisin au profit exclusif des éditeurs de presse écrite. Son adoption aurait immanquablement pour effet d’affaiblir le droit d’auteur des journalistes, tel qu’il a notamment été consacré par la loi du 12 juin 2009.

A deux ans de son centenaire, le SNJ appelle la profession à se mobiliser pour regagner la confiance du public, et se donner les moyens de produire une information libre, pluraliste et de qualité.

Source SNJ

La collusion  du politique et du financier et leur intrusion dan les médias  met en péril la liberté de la presse: témoignage d’Aude Lancelin , ex n°2 de L’Obs!

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