Opus Dei, confidences inédites, Monseigneur de Rochebrune et Phlippe Legrand

« Opus Dei ». Le seul nom fait fantasmer. Sa signification est pourtant infiniment simple, infiniment belle : œuvre de Dieu. Dans un livre-entretien intitulé Opus Dei, confidences inédites, Monseigneur de Rochebrune, responsable de l’Opus Dei en France, répond au journaliste Philippe Legrand (Quotidien de Paris, RMC).

Précisons-le d’emblée, pour couper court à tout soupçon de collusion secrète – « soupçon » et « secret » étant deux mots qui collent, il faut bien le dire, à l’Opus Dei comme un vieux scotch -, je n’appartiens pas à l’Opus Dei, je ne suis même pas « coopérateur », comme l’on appelle – je viens de l’apprendre en lisant ce livre – les sympathisants de l’Opus Dei.

Comme tout le monde, bien sûr, j’en connaissais les on-dit peu bienveillants, et le rôle de « Docteur No » que lui prête le célèbre Da Vinci Code. Comme moins de monde, peut-être, j’avais croisé certaines personnes – dont on me disait en baissant la voix qu’elles « en » étaient – qui se caractérisaient en général par des pieds solidement ancrés sur terre et une tête résolument tournée vers le ciel. Dois-je le dire, enfin, il est des procès en sorcellerie qui donnent un capital sympathie, sans même que l’on soit complètement au fait des pièces du dossier, simplement parce qu’on en connaît trop les procureurs et les méthodes.

Ces pièces, Monseigneur de Rochebrune les livre dans cet entretien, se soumettant de bonne grâce à toutes les questions – création, organisation, argent, influence, rapports avec le Vatican, personnalité de Josemaría Escrivá -, même les plus inquisitrices ou insultantes : franquisme, dolorisme, ésotérisme, pouvoir occulte, emprise sectaire, scandales divers mêlant de près ou de loin tel individu proche de l’Opus Dei. On sent qu’il a été décidé de prendre le taureau par les cornes. Déballons tout sur la table, répétons à haute voix les persiflages pour que l’on dégonfle la baudruche une bonne fois.

Et Philippe Legrand y va avec le marteau-piqueur. Les réponses sont simples, pacifiques, sans détours. On en ressort presque déçu : ce n’était que ça ? Pas de mystères mais des prières. Pas de complot, rien que du « catho ». Comme le prouvent, du reste, le statut de prélature personnelle et la canonisation, en 2002, de son fondateur.

Pas de fumée sans feu, direz-vous : d’où vient ce climat de non-dit qui alimente les fantasmes ? De la vocation propre de l’Opus Dei, voulue par son fondateur, qui est la stratégie du bernard-l’ermite : s’enfoncer dans le monde pour faire son œuvre. « Se cacher et disparaître pour que seul Jésus brille », disait Josemaría Escrivá. Les numéraires sont, dans le monde, plus insérés et moins visibles que des religieux ordinaires. Et dans notre monde déchristianisé où tout doit être réensemencé, nul ne pourrait nier l’utilité, pour l’Église, de ce travail silencieux en profondeur. Pour Monseigneur de Rochebrune, « être catholique, c’est avoir une influence bienfaisante, naturelle. Comme vous voyez, rien à voir avec le culte du secret, mais plutôt une attitude guidée par l’humilité. »

Une interrogation, cependant : selon lui, l’Opus Dei, « de cette façon-là, prend position contre un certain catholicisme (aujourd’hui, nous dirions identitaire) – être dans une confrérie, défiler dans une procession, porter des insignes, etc. » Mais loin d’être exclusives l’une de l’autre, ces deux formes de catholicisme ne sont-elles pas complémentaires, l’une pour contrer une sécularisation tentaculaire, l’autre un islam conquérant, qui tiennent en tenaille ce monde ?

Gabrielle Cluzel – Boulevard Voltaire

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