« Vincent Lambert, martyr du racisme anti-humain »

Interview de Bernard Antony.

— Vous avez été le premier à lancer, en tant que président de l’AGRIF, le qualificatif de « meurtre d’Etat » si Vincent Lambert devait être mis à mort. C’est fait. Comment réagissez-vous ?

— Avec douleur et avec rage. Avec douleur car il n’est pas nécessaire, comme c’est mon cas, de connaître Viviane et Pierre Lambert pour mesurer la souffrance atroce qu’on leur a infligée : « Veuillez accepter la loi, veuillez accepter l’autorité de l’Etat, la vie de votre enfant handicapé n’a que trop duré. » Viviane et Pierre, comme Marie au pied de la croix, sont auprès du corps de leur enfant que rien ne justifiait de maintenir enfermé, séquestré durant neuf longues années, innocent abominablement condamné et mis à mort. Avec rage à l’égard des tièdes, des lâches, des Ponce-Pilate. Pour défendre la vie de Vincent et de ceux, par milliers comme lui, déjà dans les couloirs de la mort, se sont levés en effet – en première ligne face au Léviathan totalitaire – deux hommes admirables, non seulement par leur talent, mais par leur cœur, leurs souffrances partagées avec les parents, leur acharnement à lutter jusqu’au bout, jusqu’à leurs dernières cartouches de défenseurs des droits de la personne humaine et innocent : Jean Paillot et Jérôme Triomphe. Il leur a hélas dramatiquement manqué le renfort de ceux qui auraient pu efficacement peser pour la vie de Vincent et de ceux que l’on mettra à mort après lui.

— A qui pensez-vous plus particulièrement ?

— Je pense à certains magistrats, en privé si benoîtement catholiques… Je pense aux évêques et aux dignitaires des autres religions qui, ensemble, ont longuement, « filandreusement », « moralistement », exprimé enfin leur souci de défendre la vie, mais au lendemain de l’assassinat de Vincent ! Certes, de cela on ne leur tiendra pas macroniquement rigueur à l’Elysée… Bien sûr il y a eu heureusement quelques évêques, pas beaucoup, pour dire fermement leur opposition à cette nouvelle avancée dans la culture de mort. Mais force est de constater, hélas, qu’avant la mort de Vincent aucune voix dans la hiérarchie catholique ne s’est exprimée, comme je l’ai écrit alors, à la hauteur du professeur d’éthique médicale Emmanuel Hirsch contre « la légalisation de la mort donnée ». Quant aux réactions après la mise à mort de Vincent, celle de l’écrivain Michel Houellebecq, qui n’est pas particulièrement religieux, l’emporte par cent à un sur tout le tiédasse blabla des mitrés.

— Est-on passé du serment d’Hippocrate et du Décalogue à une société barbare qui tue les enfants dans le ventre de leurs mères et élimine sauvagement les vieillards, les handicapés, les « trop » malades, les « gêneurs » ?

— Cela me semble évident. C’est la barbarie moderne du « meilleur des mondes ». Elle est bien pire que les barbaries primitives en ce sens que ces dernières n’étaient barbares que du fait de leur ignorance et de leur force brutale avant que d’épouser les modèles de la civilisation gréco-latine et chrétienne qu’elles n’avaient pas entièrement détruites et qui, très vite, les fascinaient. Notre barbarie, c’est la justification du massacre des innocents. Hérode au moins et les tyrans de l’Antiquité ne s’encombraient pas de cela… C’est pour cette raison que j’ai orienté l’AGRIF, au-delà des nécessaires combats contre les racismes anti-français et anti-chrétiens, contre ce que j’ai désigné comme le racisme le plus absolu : le racisme anti-humain, de plus en plus développé dans le plus total mépris matérialiste du respect de la vie innocente. Vincent Lambert aura été un martyr de ce racisme anti-humain.

Alain Sanders – Présent

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