Résistance au meilleur des mondes d’Eric Letty et Guillaume de Premare

Éric Letty, éditorialiste au journal Monde & Vie, et Guillaume de Prémare, délégué général d’Ichtus et ancien président de la « Manif Pour Tous », viennent de signer Résistance au meilleur des mondes. Après la publication par Laurent Obertone de La France Big Brother en janvier dernier, l’essai à quatre mains de Prémare et Letty confirme, non pas tant un soudain engouement pour les romans d’anticipation que le constat que les utopies d’Orwell et Huxley sont en train d’advenir.

Résistance au meilleur des mondes aurait pu s’appeler « Géographie du meilleur des mondes » puisque l’essentiel de l’essai est consacré à la description et l’analyse de la révolution transhumaniste qui s’opère sous nos yeux. Les auteurs s’appuient sur les travaux de penseurs aussi variés que Jacques Attali, Mgr Schooyans, le docteur Jean-Pierre Dickès, Samuel Huntington ou Mgr Tony Anatrella et offrent un beau travail de synthèse sur l’analyse des différentes facettes de la postmodernité développées par ces spécialistes. L’individu asexué, fabriqué de toutes pièces dans un placenta artificiel, le cerveau humain « connecté » et augmenté mais aussi la disparition de la famille, l’abdication totale de la souveraineté des peuples au profit d’un pouvoir mondial… L’inimaginable se prépare dans le silence des laboratoires et des think tanks. Big Brother contrôlera tous les hommes conçus dans les entrailles de Big Mother, matrice universelle de la transhumanité.

Cette révolution a un nom : le Nouvel Ordre Mondial. Elle a un but : créer un individu augmenté entretenu dans une illusion de bonheur qui le rendra parfaitement docile à Big Brother. Cette révolution a un chef, hydre aux multiples têtes : une poignées de puissants, politiques, penseurs, patrons de multinationales et journalistes autorisés.

Letty et Prémare verseraient-ils dans la théorie du complot ? Ils se refusent, en tout cas, à penser que l’Histoire est une fatalité et l’idéologie progressiste inéluctable. Ils se refusent à croire – parce que l’ignorance serait tellement plus confortable ! –, que la destruction programmée de la nation, de la famille, et de la personne elle-même puisse être la faute à pas de chance. Qui affirmerait qu’un puzzle de mille pièces s’assemble par hasard ? Le transhumanisme, a fortiori, procède d’une volonté établie.

L’Avènement de l’utopie est orchestré par une élite affamée de pouvoir et d’argent. Les puissants légifèrent non plus en vue du bien commun mais pour satisfaire leurs propres désirs. Eux qui, pour la plupart, vivent au sein de familles éclatées, organisent ce désordre et s’offrent jusqu’au luxe de pouvoir mourir « dans la dignité » pour le jour où, ayant sucé l’os du pouvoir jusqu’à la moelle, ils n’auront plus rien d’autre à faire que de se donner la mort.

Au-delà du terrible constat qu’il dresse, Résistance au meilleur des mondes est un hymne à la famille comme ultime organe de résistance au totalitarisme, un appel à l’optimisme. Non pas l’optimisme béat et inconscient (volontairement ou non) du consommateur biberonné par Big Mother, mais l’optimisme nourri par l’espérance de celui qui résiste au meilleur des mondes.

« Résister, c’est défendre ! », écrivent Éric Letty et Guillaume de Prémare qui ne sont pas de ceux qui comptent assister, impuissants, au désastre. Ils voient dans la « Manif Pour Tous » le début d’un vaste mouvement de résistance qui va bien au-delà de la seule loi Taubira pour appeler à renouer avec notre humanité. Il s’agit, en somme, de renouer avec le réel, avec tout ce qu’il comporte de souffrances et de finitude, mais condition de la liberté et, in fine, d’un bonheur authentique. Pour les auteurs, l’échec de la mobilisation contre la loi Taubira n’enlève rien au réveil des consciences suscité par la mobilisation et qu’il faut continuer d’encourager.

Un énième livre « anti-système » ? Ce qu’appellent de leurs vœux les deux auteurs n’est pas une guerre sanglante contre les penseurs du transhumanisme ; ils n’offrent pas non plus de « solution miracle » à la postmodernité. Mais, en offrant une analyse du Nouvel Ordre Mondial, Letty et Prémare invitent à une résistance qui est d’abord un devoir de savoir, de s’informer. C’est également le devoir d’incarner, à temps et à contretemps, le monde que nous voulons au sein des familles et de la société.

Éric Letty et Guillaume de Prémare, Résistance au meilleur des mondes, Éditions Pierre Guillaume de Roux, 224 p., 19 €.

Lu sur L’Homme nouveau

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