L’énigme du Mary Céleste…

4 décembre 1872. Le navire-fantôme Mary Celeste vogue sans équipage au milieu de l’Atlantique…
Le 4 décembre 1872, le Dei Gratia, commandé par le capitaine David Reed Morehouse, fend joyeusement les flots de l’Atlantique. Ce brigantin canadien a quitté New York quelques jours plus tôt pour l’Europe. La première partie de la traversée a été calme. Rien à signaler. Vers 13 heures, John Johnson, qui est à la barre, voit apparaître à l’horizon un brick-goélette à la course erratique. Les voiles sont mal bordées, l’une claque dans le vent. Bizarre. La nouvelle patronne des Verts, Emmanuelle Cosse, serait-elle à la barre ?
Johnson appelle le second maître John Wright, puis le capitaine Morehouse. Ce dernier braque sa lunette sur le brigantin. Il le reconnaît. C’est le Mary Celeste, parti une semaine avant le Dei Gratia de New York, commandé par son ami Benjamin Spooner Briggs. “Je ne vois pas d’homme à la barre !” s’exclame-t-il, stupéfait, avant de donner ordre de mettre le cap sur lui. À 15 heures, le Dei Gratia est à moins de 400 mètres du mystérieux navire. Tous les marins le scrutent, rien ne bouge à bord. Morehouse le hèle à plusieurs reprises. Aucune réponse. Un frisson passe dans le dos de tous les hommes. Finalement, le capitaine décide d’envoyer un canot avec Johnson, Wright et un troisième marin nommé Oliver Deveau. Wright et Deveau montent à bord. Personne ne vient à leur rencontre. C’est aussi désert qu’un congrès de l’UDI de Borloo…

Rien ne manque, sauf l’équipage

Durant une heure, les deux marins explorent le Mary Celeste de la poupe à la proue. Il est vide de toute présence humaine. Les voiles sont mal bordées, les gréements emmêlés, la drisse de la grand-voile est coupée, la barre à roue tourne dans le vide, l’habitacle de cette dernière gît, brisé à terre, la trappe principale menant à la cale est bien en place, mais certains panneaux d’écoutille gisent, démontés. Il y a trente centimètres d’eau dans la cuisine, six mois de provisions dans le magasin, dont une partie est gâtée, et de l’eau potable en quantité. Bref, rien ne manque à bord, sauf l’équipage. Qu’est-il devenu ? Aucun indice ne l’indique. Le Mary Celeste n’est pas sur le point de couler, il reste parfaitement manoeuvrable. Il n’y a donc aucune raison apparente pour l’avoir abandonné. Le mystère est complet. Dans la cabine du capitaine, Oliver Deveau trouve le journal de bord. La dernière entrée date du lundi 25 novembre : “À cinq heures, l’île de St Mary à l’ESE.” C’est l’île Santa Maria des Açores.

En fouillant bien, les deux hommes constatent encore qu’il manque plusieurs instruments de navigation : le chronomètre, le sextant, ainsi que le contrat de transport maritime, le livre de navigation et une petite yole. L’équipage l’a-t-il empruntée pour s’enfuir ? Mais pour fuir quoi ? Qu’est-ce qui a pu conduire un capitaine et ses hommes à abandonner le Mary Celeste, apparemment en parfait état de naviguer ? Quelle raison peut bien expliquer ce geste désespéré pris normalement en dernier ressort, avant un naufrage ? Le bijoutier de Sézanne a-t-il débarqué avec une arme à la main ? Le capitaine Morehouse et son équipage s’interrogent longuement sans trouver de réponse. Finalement, ils décident de piloter le voilier fantôme jusqu’à Gibraltar pour réclamer la part de marchandise due aux découvreurs d’une épave en mer. Les cales du Mary Celestesont remplies de tonneaux d’alcool !

Navire maudit

L’enquête ultérieure permettra d’en savoir un peu plus sur le brigantin et son équipage. Construit en 1860 en Nouvelle-Écosse, il entame sa carrière maritime sous le nom d’Amazon. Dès ses premiers milles en mer, il semble maudit. Son premier capitaine meurt immédiatement, puis il enchaîne les propriétaires qui font faillite les uns après les autres. Aucun n’oubliant de partir avec sa retraite-chapeau… En octobre 1872, le navire a changé de nom. Il s’appelle désormais le Mary Celeste et se trouve à New York, amarré au quai 44. Son nouveau capitaine Benjamin Spooner Briggs est un sévère puritain anglais de 37 ans, copropriétaire du bateau. Albert Richardson en est le premier maître. Un marin, probablement d’origine danoise, Andrew Gilling, est le second maître. Aucune raison de douter de sa compétence. Les cinq autres membres d’équipage, hormis le cuisinier, sont allemands. Le capitaine Briggs est accompagné de son épouse, Sarah, et de sa fille, Sophia Matilda, âgée de deux ans.

Quand, le 5 novembre, le Mary Celeste s’élance pour rallier Gênes, en Italie, il transporte dans ses cales 1 701 tonneaux d’alcool dénaturé, donc non buvable. La tempête souffle sur l’Atlantique, obligeant le navire à patienter deux jours au large de New York avant de vraiment entamer sa traversée. Le livre de bord ne signale rien de spécial durant les trois premières semaines. Que se passe-t-il donc le 26 novembre pour que les marins se volatilisent ? Des dizaines d’hypothèses seront envisagées. Les unes plus folles que les autres.

Séisme, pieuvre géante et champignons hallucinogènes

Une première théorie accuse l’équipage de s’être enivré avec l’alcool transporté avant d’assassiner le capitaine et sa famille et de s’enfuir à bord de la yole. Impossible ! L’alcool était dénaturé et donc rendu inconsommable. Deuxième théorie : les deux capitaines du Mary Celeste et du Dei Gratia sont de mèche depuis le départ de New York pour réclamer la récompense due à celui qui trouve une épave. Briggs aurait donc tué son équipage, avant d’être recueilli par Morehouse, qui l’aurait débarqué à Gibraltar. Reste qu’en tant que copropriétaire de la cargaison Briggs avait plus à perdre qu’à gagner dans cette combine.

Troisième théorie : Morehouse et l’équipage du Dei Gratia ont pris d’assaut le Mary Celeste, massacré tout l’équipage. Quatrième théorie : le Mary Celeste a heurté le trimaran de Kersauson lors d’une tentative de record du monde. De rage, l’amiral et son équipage ont jeté à l’eau Briggs et son équipage. Cinquième théorie : le deux-mâts a été attaqué par une pieuvre géante et affamée. Sixième théorie, on ne pouvait y échapper : l’équipage est enlevé par une soucoupe volante. Septième théorie : l’eau ou la nourriture est contaminée par un champignon hallucinogène ayant conduit l’équipage à sauter à l’eau. Huitième hypothèse : l’internaute Orbal qui n’aime pas nos “blagues Carambar” a voulu piéger notre histoire… Neuvième théorie : une tornade a emporté tout le monde, présent sur le pont. Dixième théorie : un séisme sous-marin a généré une vague géante qui a balayé le pont du brigantin. Et ainsi de suite…

Peur d’une méga-explosion

Finalement, l’hypothèse la plus crédible est celle d’un équipage fuyant en quatrième vitesse un danger. Les hommes n’auraient eu le temps que d’emporter quelques instruments avant de s’entasser à bord du petit canot de sauvetage. Un coup de vent aurait précipité tout le monde à l’eau, et ils se seraient noyés. Mais quel danger ? Pour James Winchester, copropriétaire du Mary Celeste, le plus probable est la peur d’une explosion de l’alcool transporté. De la vapeur d’alcool aurait pu s’échapper des tonneaux et prendre feu avec des étincelles produites par le frottement des bandes métalliques cerclant les tonneaux. Par peur d’une méga-explosion qui n’est jamais venue, le capitaine aurait pu ordonner l’abandon du navire.

Après une enquête à Gibraltar, les sauveteurs du Dei Gratia reçoivent un sixième de la valeur assurée du navire et de sa cargaison, soit 7 700 dollars de l’époque (environ 120 000 dollars actuels). Le Mary Celeste est rapatrié à Boston par ses propriétaires. Mais la poisse n’en a pas fini avec le brigantin. Le père de l’un des propriétaires se noie lorsqu’il est à bord. Du coup, le navire maudit est vendu. Au cours des treize années suivantes, il change dix-sept fois de mains. Le dernier propriétaire du Mary Celeste est un certain capitaine Parker, un escroc à l’assurance. Le 3 janvier 1885, il jette délibérément le navire sur des récifs près d’Haïti et tente de mettre le feu à l’épave, sans y parvenir. On ne trouve nulle trace à bord des 975 tonneaux de harengs qu’il avait déclarés. L’épave finit par couler.

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