Le propriétaire allemand de deux sucreries françaises veut les fermer pour faire remonter les cours

Le groupe allemand Südzucker refuse de vendre deux des quatre usines de sa filiale française Saint Louis promises à la fermeture. Objectif : réduire la capacité de production en Europe pour faire remonter les cours, quitte à sacrifier 130 emplois.

«Saint Louis Sucre ne vendra pas ses sites de production. Nous n’arrêtons pas la production de sucre pour la proposer à d’autres acteurs, mais bien pour retirer des capacités du marché», a asséné le président du directoire de Südzucker, Wolfgang Heer, dans un communiqué publié ce 23 mai.

Les prix du sucre européen ont chuté d’environ 30% sur l’année, dans le sillage de la baisse des cours mondiaux du sucre qui a suivi la levée des quotas sucriers en Europe fin 2017. Südzucker, propriétaire de Saint Louis Sucre qui a publié ses résultats annuels le 16 mai, enregistre pour sa branche sucre une perte de 239 millions d’euros sur l’exercice 2018/19.

«Le projet de reprise des sites de Cagny [Calvados] et d’Eppeville [Somme] débattu dans la presse par la CGB (association des planteurs de betteraves) ne résoudra pas le problème de surproduction», ajoute Südzucker dans son communiqué.

La semaine passée, après une séance de négociation avec les planteurs d’Allemagne du Sud (VSZ), qui détiennent une participation majoritaire (57%) au capital de Südzucker, le président de l’association des planteurs de betteraves avait assuré à la presse que la porte n’était pas fermée à une reprise des deux sucreries Saint Louis Sucre.

«Südzucker a accepté de recevoir notre offre de reprise par écrit. Nous proposons 30 millions d’euros pour la reprise des deux usines», avait indiqué le président de la CGB, Franck Sander. Les betteraviers français espéraient ainsi maintenir 130 emplois dans les deux sucreries ainsi que la culture de la betterave dans les bassins de production autour de ces sites, où travaillent 2 300 planteurs. Mais le président de VSZ, Hans-Jörg Gebhard, avait déclaré à l’issue de cette rencontre qu’ «il serait irresponsable, pour Saint Louis Sucre, de céder des sites», fermant la porte à des négociations.

Retirer des capacités de production

Südzucker n’a pas hésité à expliquer que le but de l’opération était de «retirer des capacités de production du marché européen», faisant valoir que «la France représente un marché excédentaire [qui] produit deux fois plus de sucre qu’elle n’en consomme».

Selon la CGB, le rachat aurait permis à Südzucker d’économiser 100 millions d’euros sur les 200 millions qu’il dit avoir provisionnés pour couvrir la fermeture, le plan social et la dépollution de cinq sites appelés à fermer en Europe (les deux en France, ainsi qu’un en Pologne et deux en Allemagne).

Filiale depuis 2001 de Südzucker, premier sucrier européen qui possède 29 usines en Europe, Saint-Louis Sucre emploie 770 salariés en France et travaille avec 4 733 planteurs de betterave sucrière. Il a prévu de conserver ses sucreries françaises à Etrépagny (Eure) et à Roye (Somme), et ne va pas fermer totalement les sites de Cagny et d’Eppeville, dont il juge essentiel de maintenir les capacités de stockage afin de «renforcer la situation de Saint Louis Sucre pour l’avenir », selon le communiqué.

Les salariés accusent le groupe de faire une restructuration en arrêtant totalement la production de sucre, mais en gardant juste du stockage dans les usines, afin de contourner la loi Florange, qui impose à tout employeur d’une entreprise d’au moins 1 000 salariés qui envisage de fermer un établissement et de procéder à des licenciements économiques de rechercher un repreneur.

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