René Dosière dénonce un «recul important des pouvoirs de contrôle des députés»!

Le député socialiste s’indigne de l’allongement du délai de réponse du gouvernement aux questions des élus, dénonçant la «désinvolture» de l’exécutif.
René Dosière ne décolère pas. Le député socialiste dont les travaux sur le train de vie de l’Elysée et des ministères défraient régulièrement la chronique, s’inquiète de la «désinvolture» croissante de l’exécutif à l’égard des questions écrites de la représentation nationale. A commencer par les plus gênantes, qui, faute d’avoir reçu une réponse par la voie normale, lui sont retournées bardées de l’étiquette «questions signalées». Une procédure sans laquelle les investigations de Dosière au sommet de l’Etat «n’auraient, dit-il, pas été possibles». Or, au grand dam du socialiste, loin de résoudre le problème, le nouveau règlement de l’Assemblée, qui doit être adopté mercredi soir, risque de freiner encore son délicat travail de collecte de l’information.

Un paradoxe alors que Claude Bartolone prétend, lui, œuvrer pour «améliorer l’efficacité du travail parlementaire». C’est que, pour dégripper les liaisons entre députés et ministres, le président de l’Assemblée nationale s’est attaqué au plus pressé : l’inquiétante prolifération des questions écrites «normales» déposées par ses ouailles. Ces questions qui réclament une réponse du ministre dans les deux mois, les députés en raffolent, d’autant plus que les sites de classement les retiennent comme critère de l’activité parlementaire : de 13 377 au cours de la session 1995-1996, le nombre de questions écrites est passé à 26 906 au cours de la session 2013-2014…

Difficile, dans ces conditions, de s’étonner du peu d’allant de l’administration : de 96% durant la législature 1993-1997, son taux de réponse est tombé à 68%, seul un quart des questions des députés étant traité dans les délais. Pour rétablir le dialogue, Claude Bartolone a donc pris le parti d’en plafonner le nombre au début de chaque session ordinaire. «Une non-réponse du gouvernement sera d’autant moins justifiable, plaide son entourage. Notre objectif, c’est que le gouvernement réponde à toutes les questions, et pas seulement aux questions signalées.»

DES RÉPONSES DE PLUS EN PLUS TARDIVES

Un argumentaire qui ne convainc pas Dosière. «L’inflation des questions écrites, ce n’est pas nouveau !, se récrie le député. C’est bien pour cela que Philippe Seguin avait créé en 1995 la procédure des “questions signalées”.» Au terme de cette procédure, les présidents des groupes politiques sélectionnent chaque semaine parmi les questions écrites restées sans réponse, celles qui leur paraissent le plus dignes d’intérêt. L’incontinence n’est cette fois pas de mise : le nombre des questions signalées est plafonné à quelque 800 par an.

En contrepartie de cette tempérance, le gouvernement se doit de répondre dans les dix jours. Une obligation morale à laquelle il s’est scrupuleusement tenu de 1995 à 2009, avec 8 600 questions signalées et pas un seul jour de retard. Au point qu’en 2009, la procédure est officiellement inscrite dans le règlement de l’Assemblée. «Cette année-là pour la première fois, les délais n’ont pas été respectés pour certaines de mes questions concernant la présidence de la République», reconnaît Dosière qui n’obtient alors satisfaction qu’après protestation directe auprès du ministre chargé des relations avec le Parlement.

Pourtant, le dysfonctionnement se confirme. Et même s’accentue après 2012. Sur la session 2013-2014, les retards touchent le tiers des questions signalées. Et c’est en vain que plusieurs députés à l’instar du chef de file des communistes, André Chassaigne, dénoncent «l’indifférence», voire le «dédain», des ministres à leur endroit. «La moitié des 187 questions signalées aujourd’hui en instance attendent une réponse depuis plus de 3 mois !», souligne René Dosière. «C’est un recul important dans les pouvoirs de contrôle et d’investigation des députés.» Une plainte que Bartolone a choisi d’ignorer : le nouveau règlement de l’Assemblée porte officiellement de dix à quinze jours le délai imparti au gouvernement pour répondre aux questions signalées.

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