Le guide du scoutisme de Baden-Powell

Lumineuse et courageuse initiative des éditions des Equateurs : rééditer Le Guide du scoutisme, de Baden-Powell, publié pour la première fois en 1918 sous le titre Scouting for boys et dans lequel le fondateur du scoutisme posait les fondements du plus original mouvement de jeunesse du XXe siècle. Les jeunes et les moins jeunes y retrouveront, avec une certaine nostalgie, les règles très simples qui ont fait de ce « jeu sérieux » une école de vie sans équivalent pour des générations de petits Français. Il n’est qu’à songer à la contribution du scoutisme aux vocations religieuses, aux forces armées, aux aventures et explorations, à l’engagement militant, politique ou social, à la vie artistique et intellectuelle. L’intuition majeure de Baden-Powell est qu’on peut exiger le meilleur d’un enfant de treize ans. Qu’en lui se ramassent toutes les potentialités d’un adulte entier, solide, unifié. Intuition prolongée en France par des figures incontournables : le père Sevin, Perig Géraud-Keraod, Michel Menu, les enchanteurs Foncine et Dalens, le talentueux Joubert ou encore, pour l’âge routier, un Jean-Charles de Coligny. On sait aujourd’hui le long déclin des Scouts de France et la résurrection de l’esprit original du scoutisme grâce aux fondateurs des Scouts d’Europe, des Scouts unitaires de France et des mouvements liés désormais aux communautés traditionnelles : Europa Scouts, Scouts et guides catholiques de France, Scouts de Doran…

Un modèle à défendre

Il faut le confesser. Le modèle scout est aujourd’hui menacé, cerné de toutes parts. D’un côté un arsenal législatif qui s’acharne, au fil des années, à réglementer, limiter voire proscrire de larges pans des activités traditionnelles du scoutisme. De l’autre, l’esprit de l’époque qui marque de plus en plus la marginalité du scoutisme, jusqu’à en faire, aux yeux de certains adolescents – et surtout de leurs parents – un archaïsme en tout point exotique. C’est une faiblesse et une force à la fois. Les adolescents saturés de numérique, épuisés psychiquement par les montagnes russes émotionnelles que procure la vie virtuelle, mal à l’aise avec un corps qu’ils éprouvent de moins en moins du fait du confort douillet dans lequel ils sont plongés, ont énormément à trouver dans le scoutisme. Aujourd’hui beaucoup plus qu’hier. Le scoutisme n’est pas réservé à une maigre troupe d’âmes d’élite. Baden-Powell l’avait, dès les années 1910, pensé comme un secours pour la jeunesse désœuvrée de Londres. Mêmes maux, mêmes remèdes, à un âge où tout se joue. Jean Raspail, dont Le Jeu du roi et son imaginaire Patagon ne sont qu’un prolongement des rêves vécus du scoutisme de son enfance, a écrit sur cela des phrases définitives : « Est-ce qu’on imagine encore aujourd’hui ce que c’est, un petit homme de treize ans ? […] Est-ce que tout n’est pas joué, à treize ans, l’homme n’étant que la caricature de l’enfant qu’il était ? » Souhaitons donc que des milliers d’enfants découvrent demain le génie du scoutisme, pour s’y révéler à la hauteur de leur rêve. •

Pierre Saint-Servant – Présent

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