Vidéo / Saint Laurent de Bertrand Bonello

Bertrand Bonello dépeint Yves Saint Laurent face à ses démons, effilochant son propos dans un grand livre d’images.

Yves Saint Laurent, ses petites mains, ses grands tourments. Pour s’emparer du mythe, Bertrand Bonello a fait le choix de se concentrer sur une vie entre ombre et lumière, teintée d’élégance mais, aussi, hantée par la décadence. Construit autour de ce paradoxe, le projet avait-il vraiment de quoi embarrasser Pierre Bergé, qui a refusé de le soutenir alors qu’il y paraît avant tout protecteur, conciliant habilement tendresse et business sous les traits de Jérémie Renier?

Le film révèle comment, au mitan de seventies plutôt libertines, son génial célèbre compagnon échappa à leur vie bien réglée pour aller s’abîmer dans les bras de Jacques de Bascher (Louis Garrel), amant magnétique et amateur de perditions en tous genres… Accro à des drogues qui coûtent la vie à son chien et lui embrouillent les neurones, le couturier frôle la déchéance.
Cette histoire forte, sorte de dangereux tourbillon, Bonello ne la fait vivre qu’au cœur du film, comme si on l’avait insérée dans une reconstitution interminable et courue d’avance, à l’esthétique léchée mais sans véritable élan, plutôt tapissée d’évidences.

Ainsi, il faut d’abord suivre une longue mise en place où Betty Catroux et Loulou de la Falaise, les muses de Saint Laurent, font l’effet de jolies snobs vides et choyées, souvent muettes. Lorsque l’intrigue se noue enfin, elle débouche curieusement sur une apothéose ennuyeuse en forme de défilé de mode historique (la collection Opéra Les Ballets Russes, en 1976), dépourvue d’enjeux dramatiques. Quand Saint Laurent réapparaît une dernière fois, reclus et malade sous les traits de Helmut Berger, c’est pour mieux disparaître, nimbé des mystères de son être et de son inspiration, lisant Voici et ne rêvant que d’une chose : avoir la même couleur de cheveux que Johnny Hallyday.

Musicien de formation, Bertrand Bonello est l’invité du Centre Pompidou jusqu’au 26 octobre, où il présente une expo sur les rapports entre image et son, et une sélection des films qu’il aime.

Avec  Gaspard Ulliel, Louis Garrel, Jérémie Renier. 2h30.

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