Le prélèvement à la source est une arnaque !

 

Impôt sur le revenu : pour Boulevard Voltaire, Vincent You* analyse les effets néfastes du prélèvement à la source, en particulier pour ce qui concerne la prise en compte décalée des déductions fiscales.

Le gouvernement est en train de mettre en œuvre le prélèvement de l’impôt à la source. Vous vous êtes récemment fendu d’une tribune pour manifester votre opposition à ce mode de prélèvement.
Pourriez-vous nous expliquer pour quelle raison ?

Car c’est une arnaque ! Le gouvernement nous promet la simplicité et le maintien de tous les crédits d’impôt qui permettent des déductions (travaux, emplois familiaux, don aux associations, etc).
Or, dire que les déductions sont maintenues sur l’année N+1 comme aujourd’hui est en fait un mensonge par omission.
Lorsqu’on regarde dans le détail, c’est beaucoup plus compliqué que cela.
Ceux qui ont investi dans le Pinel ou dans d’autres dispositifs fiscaux de ce type-là, ceux qui embauchent quelqu’un chez eux pour le ménage, pour la garde d’enfants ou pour s’occuper de leurs vieux parents ou encore ceux qui donnent aux associations bénéficient de cette déduction dès le mois de janvier.
Avec cette nouvelle réforme, ce ne sera plus le cas. Il faudra bien souvent attendre le mois de septembre. Sous couvert de simplicité, Bercy a tout simplement trouvé un système pour que les Français prêtent leur trésorerie à l’État. Et il y aura de la casse.

Allons-nous vivre le choc de simplification annoncé ?

Ce ne sera pas du tout un choc de simplification. Il y aura en revanche un vrai choc.
Il est très difficile d’avoir des propos clairs sur des questions de technique fiscale. Les Français les regardent en général d’assez loin. Pour être très synthétique, le gouvernement applique les rêves des technocrates de Bercy. Ils ont toujours considéré que plus le système était simple, plus l’impôt rentrerait. Or, ils basent leur raisonnement sur les revenus. Ils considèrent que l’impôt doit suivre directement la variation des revenus. C’est en effet l’intérêt principal du prélèvement à la source. Si vous changez de revenus d’une année sur l’autre, le changement fiscal est direct. C’est un changement important, mais je ne sais pas s’il est si majeur que cela.
En revanche, ce n’est pas le regard du contribuable. Les gens regardent ce qu’ils leur reste à dépenser à la fin du mois. Quand on fait partie de la classe moyenne, on n’a pas d’excédents permettant de vivre sans regarder son compte en banque. Lorsqu’on regarde son compte en banque, on se dit éventuellement que le mois prochain ou le trimestre prochain, on va pouvoir bénéficier d’un peu plus d’heures de ménages à la maison ou soutenir telle association pour telle ou telle cause.
À partir du moment où on ne bénéficie plus pendant les premiers mois de l’année des déductions fiscales, on se retrouve à payer l’impôt à plein et à devoir attendre le mois de septembre pour avoir un retour. Je pense qu’il y aura moins d’emplois à domicile et moins de dons aux associations. Pour ceux engagés dans des travaux, cela va leur faire très mal, car ils vont devoir avancer des montants très importants à l’État.

Plutôt qu’un énième changement, ne fallait-il pas plutôt baisser les impôts ?

Sous couvert de simplification, on nous fait des usines à gaz. Et les Français vont être mis davantage à contribution. Ils vont être face à des choix économiques difficiles pour maintenir un équilibre familial très compliqué. Finalement, les contribuables seront perdants.
La vraie mesure de simplification serait de baisser les impôts.
C’est toujours un rêve technocratique d’avoir quelque chose de mirobolant.
L’autre rêve technocratique qui me pose problème est l’argument fallacieux du mimétisme face à l’étranger. On nous le sort chaque fois que nous ne sommes pas d’accord : « tous les autres pays le font ». J’en ai assez de cet argument.
C’est déjà ce qu’on nous a servi pour le quinquennat : « Tous les autres le font, il faut des mandats plus courts que le septennat ». Je pense que beaucoup de Français souhaiteraient que l’on revienne sur un septennat, peut-être non renouvelable.
Qu’on arrête de vouloir forcément faire comme les autres. On nous a dit que les primaires, c’était magnifique pour pouvoir gagner des élections. Je n’ai pas trouvé que la démonstration ait été si convaincante. Soyons fiers d’être Français !
Nous avons une vieille tradition autour de cet impôt sur le revenu. Je pense qu’il faut le réformer pour qu’il y ait davantage de Français qui soient mis à contribution. Il y a une part symbolique nécessaire de contributions au projet national. Il faut avoir une vraie réforme fiscale de relâche et arrêter de faire les poches des citoyens par tous les moyens. Là en l’occurrence, il s’agit vraiment d’un moyen détourné. On va pomper la trésorerie de ceux qui n’en ont pas forcément.

 

 

*Adjoint au maire d’Angoulême, vice-président de GrandAngoulême et porteur de la clause Molière.

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