La justice polonaise dévoile le financement des associations de planning familial par l’industrie de l’avortement

En février 2009, sur la chaîne polonaise d’information en continu TVN24, la journaliste catholique Joanna Najfeld a reproché à Wanda Nowicka, de la « Fédération pour les femmes et le planning familial », une fédération d’associations qui demandent la libéralisation de la loi sur l’avortement, d’être « sur la liste de paye de l’industrie de l’avortement et de la contraception ». La militante « pro-choix » a intenté un procès contre la journaliste pour diffamation. Procès qu’elle a perdu en première instance en septembre dernier et en appel cette semaine. Le verdict est désormais définitif. Dans les deux instances, le tribunal a considéré qu’il n’y avait pas eu diffamation : Joanna Najfeld a dit vrai puisque la fédération des associations « pro-choix » polonaise bénéficie de financements d’entreprises pharmaceutiques et de fabricants de matériels utilisés pour les avortements et que Wanda Nowicka touchait une rémunération de la part de l’organisation qu’elle dirigeait.

Mme Nowicka avait demandé que le procès se tienne à huis clos mais l’hebdomadaire « Gość Niedzielny » a publié en novembre des fragments du jugement auquel il avait eu accès. Un jugement édifiant dont voici des extraits qui illustrent les motivations financières des militants pour le droit d’avorter au mépris du droit à la vie et le lobbying des entreprises pharmaceutiques, et ce pas seulement en Pologne :

(…) « L’organisation dirigée par Wanda Nowicka (la Fédération pour les femmes et le planning familial, en polonais Federacja na Rzecz Kobiet i Planowania Rodziny, ndlr) percevait des subventions de la part de nombreuses entités, parmi lesquelles les société G… (le nom complet de la société figure dans le jugement, ndlr) et G… (le nom complet de la société figure dans le jugement, ndlr) qui font partie du groupe pharmaceutique international G… (le nom complet de la société figure dans le jugement, ndlr) produisant des produits de contraception, ainsi que de l’organisation non gouvernementale I… (le nom complet de la société figure dans le jugement, ndlr) dont l’objectif est entre autres d’améliorer l’accès à la santé reproductive, y compris à l’avortement en sécurité, et qui a parmi ses activités la production et la distribution d’aspirateurs et de canules, des instruments destinés aux interruptions volontaires de grossesse. La Fédération pour les femmes et le planning familial (appelée ci-après « la Fédération ») perçoit ces subventions sur la base de contrats signés avec ses donataires. D’après les écritures comptables, la Fédération pour les femmes et le planning familial a reçu entre 2004 et 2009 de la société G… (le nom complet de la société figure dans le jugement, ndlr) la somme de 97 600 zlotys et de l’organisation I… (le nom complet de la société figure dans le jugement, ndlr) 37 003,00 zlotys en 2005 et 138 253,25 zlotys en 2007. »

Et aussi :

« Les preuves en la possession du tribunal montrent de manière univoque que la Fédération pour les femmes et le planning familiale dirigée par la requérante a perçu à de nombreuses reprises des subventions de la part de nombreuses entités parmi lesquelles figure la société pharmaceutique G… (le nom complet de la société figure dans le jugement, ndlr), fabricant d’un produit de contraception (…) et de l’organisation I… (le nom complet de la société figure dans le jugement, ndlr) qui produit et distribue des instruments utilisés dans les interruptions volontaires de grossesse. Il ne fait aucun doute que l’activité de la Fédération pour la femme et le planning familial a été financée entre autres par ces entités. L’argent perçu a été affecté à différents objectifs dont l’organisation de formations, la préparation de matériaux et l’activité courante de l’organisation. Ces fonds n’ont pas été une source directe du financement de la rémunération de Wanda Nowicka, mais elles ont eu un impact sur la situation financière globale de la Fédération et ont eu au moins des conséquences indirectes sur la rémunération des salariés de la Fédération ne serait-ce que par le fait que les autres fonds ne devaient pas nécessairement être utilisés pour financer l’activité courante et pouvaient donc être affectés aux salaires (W. Nowicka était salariée de la Fédération, ndlr) ».

Ainsi, Mme Nowicka bénéficiait bien de sommes données par des entreprises qui font du profit sur le meurtre d’enfants à naître.

En Pologne, l’avortement est interdit par la loi sauf dans trois cas de figure :

  1. Lorsque la grossesse met en danger la vie ou la santé de la femme enceinte (tant que le fœtus serait incapable de survivre de manière naturelle hors du corps de sa mère).
  2. Si les examens prénataux ou d’autres symptômes médicaux montrent qu’il existe une forte probabilité de déficience grave et incurable du fœtus ou de maladie incurable mettant sa vie en danger (tant que le fœtus serait incapable de survivre de manière naturelle hors du corps de sa mère).
  3. S’il existe une présomption forte que la grossesse est le fruit d’un acte interdit par la loi (viol, inceste…) (jusqu’à la 12e semaine de grossesse).

L’année dernière une initiative citoyenne visant à restreindre les situations où il est possible de procéder à une IVG aux seuls cas où la grossesse met en danger la vie ou la santé de la femme enceinte a recueilli plus d’un million de signatures (dans un pays de 38 millions d’habitants) mais il a été rejeté par la Diète. À titre de comparaison une autre initiative lancée l’année dernière par des associations féministes et de gauche pour libéraliser l’avortement n’a pas pu recueillir les cent mille signatures nécessaires pour contraindre le Parlement à examiner un projet de loi citoyen : elle n’en a obtenu que trente mille malgré l’engagement de près de trente organisations.

Une majorité de députés considèrent que la loi actuelle est un bon compromis. On constate pourtant de graves abus au niveau de la compréhension de la notion de déficience ou de handicap grave puisque certains hôpitaux acceptent, sans être inquiétés, de procéder à une IVG au seul prétexte que l’enfant est trisomique, une situation qui n’empêche pourtant pas de bien vivre comme en témoignent de nombreuses familles. Les avortements légaux représentent quelques centaines d’IVG chaque année, des IVG pratiquées en grande majorité sous couvert d’un handicap ou d’une maladie grave et incurable de l’enfant à naître. Au début des années 90, avant l’entrée en vigueur de la loi actuelle (qui date de 1993), c’est-à-dire lorsque l’avortement était autorisé pour des motifs « sociaux » ou sur simple choix de la femme enceinte, il y a eu, selon les données du ministère de la Santé publiées sur le site de Human Life International – Pologne, 59 417 IVG en 1990, 30 878 en 1991 et 11 640 en 1992, contre 130-140 000 par an dans les années 80, la baisse étant sans doute liée à la chute du régime communiste qui avait été le deuxième régime à autoriser (et aussi à banaliser) l’avortement sans raisons médicales dans ce pays. Le premier régime à l’avoir fait, c’était l’occupant nazi pour les femmes non allemandes.

Les sondages font aujourd’hui apparaître qu’une imposante majorité de Polonais sont contre une libéralisation de l’avortement et l’exemple de la Pologne montre qu’une politique visant à limiter fortement le nombre d’enfants avortés peut être efficace pour faire évoluer les mentalités de manière positive. Les partis qui souhaiteraient légaliser l’avortement pour des motifs sociaux (le SLD et le Mouvement Palikot dont Wanda Nowicka est maintenant députée à la Diète) n’ont recueilli ensemble que 18 % des voix aux dernières élections législatives.

De notre correspondant permanent en Pologne.

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2 Comments

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  • Agnieszka G. , 3 février 2012 @ 11 h 57 min

    J’espère que dans un avenir très proche, le sujet de l’avortement cessera d’être un problème trop délicat pour en discuter en France. Il faut être vraiment malhonnête pour banaliser la situation où une grossesse sur trois est interrompue, où les enfants trisomiques n’ont plus la chance de naître parce que leurs parents et la société souhaitent leur éviter des difficultés potentielles de la vie liées à leur handicap.
    Je suis polonaise et je sais que la mentalité peut évoluer vite. Moi, dans mon entourage, je ne connais plus personne pour qui un avortement est une simple question de choix ou un droit inaliénable d’une femme. Personne, à part quelques féministes très présentes dans les médias polonais contrôlés par les milieux de gauche comme Magdalena Sroda (qui en plus parle très bien français et est souvent cité par les grands médias francophones) ou Wanda Nowicka, mais qui ne représentent qu’un petit groupe d’activistes gauchistes. Par contre le niveau de débat à ce sujet en France (y compris dans les médias dits conservateurs) me donne des frissons dans le dos. Il y a du boulot à faire, chers journalistes de droite. Je vous remercie d’autant plus pour cet article.

  • Robert , 3 février 2012 @ 21 h 02 min

    Agnieszka,
    Merci de vos encouragements!

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