Rencontre avec Douglas Carswell, le libertarien qui souhaite « sortir » le Royaume-Uni de l’Union européenne

Douglas Carswell est un député britannique conservateur. Quadragénaire n’ayant pas peur de se lancer des défis, il a fait du pouvoir local son cheval de bataille outre-Manche. Nouvelles de France l’a rencontré aux abords de Westminster.

Douglas Carswell, vous êtes très méfiant à l’égard de l’Union européenne. Pourquoi ?

Je souhaite que le pouvoir soit rendu à un gouvernement local. J’ai notamment proposé à la chambre des communes que la TVA soit versée aux autorités locales. Le problème qui se pose est que la plupart des mesures qui vont dans ce sens sont contraires aux traités européens. Dans ma circonscription, le ramassage des déchets est organisé par une directive européenne…

L’Europe a pu dominer le monde car elle a toujours su éviter la centralisation. Aujourd’hui nous subissons la centralisation, notamment du fait de l’Union européenne alors que tous les pays en développement, y compris la Chine, ont bien compris qu’il fallait éviter cet écueil. La solution est la suivante : soit nous révisons les traités européens, soit nous sortons de l’Union européenne.

Croyez-vous réellement qu’il soit possible pour le Royaume-Uni de quitter l’Union européenne ?

Oui, d’ailleurs cela va arriver et pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les gens sont très sceptiques envers l’Union européenne. De plus, les promesses économiques qui ont, aux yeux de certains, légitimé notre adhésion, ne sont plus là. Lorsque j’ai été élu à la Chambre des communes en 2005, il y avait encore quelques membres du Parlement qui demandaient une intégration plus forte à l’Union européenne. Aujourd’hui, à Westminster, il n’y en a plus aucun qui la réclame. Depuis les scandales politiques au Royaume-Uni, les gens se méfient de cette classe politique qui les a entraînés dans l’Union européenne. Et puis, les gens réalisent aujourd’hui qu’un référendum est possible. Enfin, les « énarques » (en français dans l’entretien, ndlr) de Grande-Bretagne sont complètement à côté de la plaque lorsqu’il s’agit de négocier les traités. C’est un peu comme si vous mettiez Mr. Bean pour décider des clauses d’un traité européen…

Que pensez-vous des décisions du Danemark et de la Norvège, qui font pourtant partie de la zone Schengen, de rétablir un contrôle partiel aux frontières ?

Les autres pays européens devraient faire la même chose. Et pour revenir à l’Union européennes, les règles qu’elle édicte pourraient être le fait des gouvernements respectifs des Etats membres.

Vous êtes le promoteur de ce qu’on appelle le « localim », outre-Manche, pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

C’est la subsidiarité car celle prônée par l’Union européenne est un mensonge. Pour elle, le pouvoir vient d’en haut alors que la plupart des décisions devraient être prises localement. Considérez par exemple les pays les plus riches du monde, vous y trouverez Singapour, la Suisse ou encore le Liechtenstein… la plupart sont de petit Etats. Certains vous diront qu’il s’agit simplement d’endroits où il n’y a que très peu de taxes mais s’il y a si peu de taxe là-bas, c’est peut-être qu’il y a également moins d’Etat. L’Etat n’arrête pas d’intervenir au Royaume-Uni et je suis sûr que c’est la même chose en France ou en Italie.

En effet… Quels sont les secteurs principaux que vous aimeriez « décentraliser » ?

Je pense par exemple à l’éducation. On devrait permettre aux parents de personnaliser l’éducation de leurs enfants. Ce sont les pouvoirs locaux qui devraient organiser cette décentralisation. Cela permettrait de créer un peu de différences. En Grande-Bretagne, les maisons sont tellement similaires qu’on a l’impression que tous les architectes sont passés par les mêmes écoles. En 2011, ce n’est pas au gouvernement de nous dire comment construire nos maisons. De plus, la plupart des parents souhaitent que leurs enfants aient une éducation plutôt conservatrice telle qu’un apprentissage rigoureux de la lecture et de la langue. Les élites, au contraire, veulent détruire les valeurs traditionnelles à l’école.

Que pensez-vous de ces personnes à qui l’on fait un procès parce qu’elles ont refusé de louer une chambre à un couple homosexuel par convictions religieuses ?

Je pense qu’ils ont fait les choses bêtement mais je pense en libertarien et comme tel je crois que les gens ont le droit de faire ce qu’ils veulent même si je pense qu’ils se trompent.

Croyez-vous pouvoir être entendu par le gouvernement ?

En 2005, nous avions fait des propositions qui n’ont pas été suivies. Le Parti conservateur (aujourd’hui au pouvoir, ndlr) devrait être contre le centralisme même si cela n’a pas été le cas pendant longtemps. Aujourd’hui nous essayons de renverser la tendance et je crois pouvoir affirmer que nous y arrivons. Les mentalités au sein du Parti conservateur ont évolué, vous savez ! Et si la coalition avec les libéraux-démocrates fonctionne, c’est un peu grâce à ce type de propositions ! En mai nous avons organisé un référendum suite auquel il a été décidé que les représentants de la police locale devraient désormais être élus.

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