Manifeste pour une bonne sortie de l’euro

Nous, citoyens, qui sommes les sempiternels dindons de la farce monétaire ;

Nous, qui n’avons pas les moyens de nous protéger de la hausse des prix qui ronge insidieusement notre pouvoir d’achat ;

Nous, les anciennes victimes d’un franc qui a perdu plus de 99% de sa valeur au 20ème siècle ;

Nous, qui avons en mémoire le Franc Germinal, auquel pas un milligramme d’or n’avait été ôté depuis sa création en 1803 jusqu’à sa disparition en 1914 ;

Nous, les victimes actuelles de l’euro qui ronge nos économies et nourrit le marasme ;

Nous, qui ne voulons plus utiliser une monnaie qui ne se maintient aujourd’hui que soutenue par la Chine – une dictature féroce qui veut étendre son empire jusqu’à l’Europe aux anciens parapets.

Nous, qui sommes conscients de l’imposture de la monnaie européenne. En effet, fabriqué à partir de monnaies factices, l’euro ne peut qu’avoir les défauts de ses constituants. De plus, sa construction est viciée dès l’origine. Une monnaie unique appliquée à des économies divergentes devait aboutir forcément aux drames que nous connaissons maintenant. Aucune des promesses qui avaient été faites à sa naissance n’a été tenue. L’Euro-zone est une zone de basse croissance et de chômage élevé, plusieurs de ses Etats sont menacés de faillite. Le risque d’explosion n’est pas nul !

Nous, donc, nous réclamons et exigeons des faux-monnayeurs qui nous gouvernent qu’ils abolissent le cours légal de l’euro, cause aujourd’hui de la ruine de l’Europe.

Ce qui veut dire que nous ne voulons plus être obligés ni de payer nos dettes en euro ni d’accepter l’euro qu’on nous présente pour rembourser nos créances. Par exemple  le boulanger pourra accepter l’euro en paiement de son pain, mais il pourra aussi dire : je ne veux pas de votre euro, merci beaucoup, mais je préfère du dollar ou de la livre sterling, ou du franc suisse, etc. De même nous pourrons dire à nos patrons : “s’il vous plaît, payez-nous autrement qu’en euro”.

Ainsi sera ouverte une libre concurrence entre les monnaies. Si la concurrence est bénéfique pour l’économie, on ne voit pas pourquoi elle ne le serait pas pour la monnaie.

L’anglais Edmund Burke, dans ses Réflexions sur la révolution en France, remarque excellemment : « Notre papier-monnaie [en Angleterre] a de la valeur dans les transactions commerciales parce que, précisément, il n’a pas de valeur légale ; il est puissant à la Bourse parce qu’il est sans force à Wesminster Hall » –  symbole du pouvoir politique. En d’autres termes, une bonne monnaie n’a pas besoin de cours légal pour circuler. Si elle s’appuie sur un cours légal, c’est qu’elle est une mauvaise monnaie – d’autant plus pernicieuse que, jouissant de ce privilège, elle tend à chasser la bonne monnaie. Jusqu’en 1870, les billets de la Banque de France n’avaient pas de cours légal (sauf entre 1848 et 1850) et ils étaient acceptés.

Au cours légal les Etats ajoutent une fiscalité spécifique sur toute transaction en or qui dissuade les citoyens d’utiliser autre chose que du papier étatique. L’abolition du cours légal n’aboutira à une véritable concurrence entre les monnaies que si elles sont placées fiscalement sur un pied d’égalité.

Nous réclamons donc aussi la suppression de cette fiscalité inique et confiscatoire.

L’abolition du cours légal aura une autre conséquence : tout un chacun doit être libre de conclure des contrats libellés en or. Par conséquent, tout un chacun doit aussi pouvoir ouvrir à la banque des comptes courants ou à terme en or.

La liberté ne se divise pas. Nous demandons donc de franchir un pas de plus par le rétablissement de la liberté de frapper des monnaies-or dans les ateliers existants.

A ce stade, une monnaie-or entrera en compétition avec les euros, dépourvus, rappellons-le, de cours légal. Et plus la Banque Centrale Européenne fabriquera des euros, comme elle le fait aujourd’hui contrairement à ses propres règles, pour venir au secours des banques et des Etats en difficulté, plus la monnaie-or sera recherchée – ce qui, déjà, inspirera plus de sagesse au gouverneur de la Banque Centrale Européenne qui triche avec les Traités européens. En l’absence de cours légal, la bonne monnaie chasse la mauvaise.

Les différentes banques centrales seront alors amenées à remettre en circulation les tonnes d’or qu’elles ont en réserve depuis qu’elles les ont confisquées à ceux qui les lui avaient confiées en août 1914, quand ont été déclarées inconvertibles les monnaies des pays belligérants.

Evidemment, cet or monnayé pourra circuler non pas seulement physiquement, mais aussi sous forme de billets ou de comptes courants bancaires, convertibles à 100% en or.

Pour les petites transactions, le métal argent sera introduit et utilisé exactement dans les mêmes conditions. Il faudra éviter tout rapport fixe entre monnaie-argent et monnaie-or – comme c’était le cas dans beaucoup de régimes « bimétalliques » et ce qui les a rendus inefficients. Là, encore, le jeu libre du marché sera chargé d’établir au jour le jour les rapports entre ces deux monnaies.

Les banques centrales seront désormais dépourvues de ce pouvoir monétaire dont elles ont tant abusé en régime d’inconvertibilité. En fait, elles n’auront plus de raison d’être dans ce Gold Standard d’un nouveau genre où la quantité de monnaie en circulation est déterminée par le jeu du marché. Du même coup, les Etats ne pourront plus utiliser les banques centrales pour financer leurs déficits avec de la fausse monnaie.

Même introduite dans un seul pays, la nouvelle monnaie-or sera capable d’attirer à elle l’ensemble des pays européens, et non pas une partie d’entre eux comme c’est le cas pour l’euro. Si seulement deux pays à l’intérieur de l’Union européenne adoptent les mesures que nous préconisons, la monnaie-or devient leur commune unité  de compte, sans aucune intervention étatique, simplement par le libre choix des individus. C’est bien ce qui s’est passé entre Florence et Gênes, puis Venise à la fin du 13ème siècle.

Ce processus pourra être aisément étendu non seulement aux autres membres de l’Union européenne qui hésitent aujourd’hui à entrer dans l’Euroland comme la Pologne ou la Tchéquie, mais aussi à des pays européens qui n’en veulent pas comme la Grande-Bretagne. Il n’est pas interdit d’espérer que des pays non européens adoptent à leur tour cette monnaie – et sera rétabli ainsi, peu à peu, le Gold Standard qui a fait la fortune du 19ème siècle, mais sous une nouvelle forme, décentralisée – un Gold Standard à l’abri des « grands coups d’autorité » qui l’ont ruiné, puisque les réserves d’or seront disséminées dans des millions de poches ou de coffres.

Le règne abusif et dangereux de l’étalon-dollar, qui permet aux Etats-Unis de financer leurs « déficits sans pleurs » depuis 1944 (accords de Bretton-Woods), sera enfin terminé.

Dans un tel univers à monnaie unique, ni guerre commerciale ni guerre monétaire ne seront plus possibles.

> Ce manifeste lancé par Philippe Simonnot, économiste et penseur libertarien, est ouvert à la signature de tout un chacun qui l’approuve. Pour le signer, contacter : e.martin[at]ndf.fr

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