Election présidentielle : « Mieux vaut un sursis qu’une condamnation à mort »

Par Jacques Garello*

Nous, libéraux, n’aurons pas le meilleur, mais nous pourrions éviter le pire.  Je livre à votre réflexion le texte d’une pétition qui a déjà recueilli la signature d’un certain nombre d’économistes qui ont en commun de ne pas appartenir à quelque formation politique que ce soit, et qui se prononcent donc sur « le programme socialiste destructeur ».

« Le programme de François Hollande et de ses amis socialistes repose sur des illusions démagogiques, mais illusoires et destructrices : augmenter le SMIC au lieu de libérer les énergies, punir les riches au lieu d’inciter tout le monde à l’effort productif, dépenser pour stimuler la croissance (en fait pour acheter des clientèles) au lieu d’utiliser au mieux les ressources. Le socialisme n’a jamais réussi, sous sa forme extrême – le communisme – comme sous sa forme plus modérée – la social-démocratie. Il est en effet incontestable que la prospérité est étroitement corrélée au degré de liberté économique.

« Comment peut-on encore, au XXIème siècle, après des décennies et des siècles de réflexion et d’expériences, croire à des recettes qui relèvent plus de la magie incantatoire que de la science ? Comment peut-on croire que l’État peut manipuler l’économie comme le ferait un conducteur de locomotive en poussant quelques manettes ? Comment peut-on imaginer qu’il suffirait de fabriquer ex nihilo des unités monétaires irréelles pour que les hommes se mettent à produire plus ? Comment croire qu’un État peut promouvoir la croissance par le seul fait qu’il dépense plus, sans se rendre compte qu’il prélève par l’impôt ou par l’emprunt les ressources nécessaires à ses gaspillages et à ses dépenses démagogiques ?

« La croissance ne se décrète pas, elle est le résultat non planifiable des décisions et des actes innombrables d’individus capables d’efforts et d’imagination. Mais pour cela il est indispensable de ne pas freiner leurs élans par des contraintes réglementaires paralysantes ou des impôts spoliateurs. C’est dire que la politique socialiste qu’un François Hollande ferait si, malheureusement, il accédait au pouvoir suprême, avec le soutien de ses alliés inévitables – communistes et écologistes – ne pourrait produire que la stagnation économique, un chômage et une pauvreté accrus, un endettement public insupportable.

« Il est tragique de penser qu’on peut améliorer le sort de certains en punissant et en spoliant les autres. Nous sommes tous solidaires dans une société humaine et il est dans l’intérêt de tous d’inciter chacun à donner le meilleur de lui-même.La France souffre depuis des décennies – et plus particulièrement depuis la désastreuse élection de François Mitterrand – d’une faible croissance, d’un chômage élevé, mais aussi du manque d’espoir qui frappe en particulier les plus jeunes. Malheureusement, nous ne sommes pas sortis du socialisme, des socialistes de droite ayant succédé aux socialistes de gauche. Pour rendre l’espoir aux Français, il n’y a qu’une solution : sortir du socialisme. Y rentrer plus profondément ne pourrait être qu’une funeste erreur…

« Les signataires s’engagent en tant qu’économistes professionnels et n’appartiennent à aucun parti politique ». 

Certes, cette déclaration peut conduire certains à s’abstenir, parce qu’ils se diront que tant qu’à avoir un socialisme autant qu’il soit fait par des socialistes et qu’il dise son nom, alors que depuis quelques années, il est de bon ton de passer au débit de « l’ultra-libéralisme » ce qui est en fait le « socialisme de droite » que vise le texte. Mais s’abstenir, dans l’arithmétique électorale actuelle, c’est voter Hollande, c’est pratiquer la politique de la terre brûlée. Faute du meilleur, voulons-nous avoir le pire ?

Je déteste en tous cas l’indécente agressivité à l’égard de ceux qui ont voté « autrement » ou qui se sont abstenus au premier tour. Beaucoup l’ont fait pour des raisons fort nobles et respectables. Certains ont fait savoir qu’ils n’ont rien trouvé de libéral dans la politique de Sarkozy, ni même dans l’essentiel de son programme. Certains ont affirmé leur attachement aux valeurs morales et chrétiennes de la France, qui sont plus réelles que celles « de la République » dont on nous rebat les oreilles. Certains ont exercé un « devoir de mémoire » pour toutes les victimes de la dramatique perte de l’Algérie Française. Il ne s’agit donc pas de Français de seconde zone, indignes de participer à un choix qui engage leur sort pour les cinq ans à venir – et cinq ans, c’est bien long.

Mieux vaut un sursis qu’une condamnation à mort. Encore une minute, monsieur le bourreau. Pendant ces cinq minutes, nous pourrons peut-être convaincre nos compatriotes des erreurs fatales du passé et les persuader qu’il y a un espoir.

*Jacques Garello est un économiste libéral français, professeur émérite à l’Université Paul Cézanne Aix-Marseille III. Il est fondateur du groupe des Nouveaux Economistes en 1978 et président de l’Association pour la liberté économique et le progrès social (ALEPS) depuis 1982. Il est également membre du Conseil d’administration de l’Institut de Recherches Economiques et Fiscales (IREF).

> Cet article est publié en partenariat avec l’ALEPS.

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4 Comments

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  • steph , 2 mai 2012 @ 1 h 05 min

    Permettez moi de ne pas être d’accord, monsieur, quand vous écrivez que “s’abstenir, dans l’arithmétique électorale actuelle, c’est voter Hollande”

    Je récuse fortement cette affirmation, qui n’est pas fondée mathématiquement ni logiquement. Si, dans un contexte électoral où il est possible qu’une majorité choisisse A plutôt que B, si je choisis C, je ne favorise ni A ni B, je dis simplement que, de ces deux alternatives, je ne me sens pas compétent pour identifier le moins pire. Lorsque vous prétendez que je voterais Hollande (ou Sarkozy, car il se trouve également des gens qui affirment que ne pas voter, c’est voter Sarko), au mieux vous tentez de me prendre en otage, au pire, vous m’insultez (involontairement et légèrement, bien sûr, mais quand même).

    Ce n’est pas à vous qu’il faut dire que les systèmes économiques sont complexes, et ne peuvent être résumés en bonnes intentions théoriques ou en incantations bien-pensantes. Qui peut affirmer avec certitude que telle chose sera bonne ou pas – en dehors d’énormités – , alors qu’elle ne jouerait qu’à la marge, et que l’évolution rapide du monde va en rendre les effets imprévisibles ? La défiscalisation des heures supplémentaires est un bon exemple de cela. Pouvez-vous expliquer pourquoi, alors que la “droite” a glapi sur tous les tons que les 35 heures “ont mis la France au bord du gouffre”, elle n’a rien fait pour les abroger ? Peut-être parce qu’elles n’étaient pas si mauvaises ? Sans vouloir vous offenser, je me permet de vous rappeler que peu d’économistes avaient été capables de prévoir des choses aussi énormes que la crise de 2008-2009 (à vrai dire, je n’en connais aucun), et que la science économique n’est pas une science très exacte dans tous les domaines.

    Comme 80% de mes concitoyens, je ne crois pas aux promesses politiques, et suis certain qu’Hollande ne fera pas tout ce qu’il a promis, pas plus que Sarko, la réalité, à la fois celle des marchés et celle des électeurs, s’imposant aux deux. Et je dois dire qu’entre un ticket Hollande/Ayrault, et un ticket Sarko/Coppé (il a été question qu’il soit premier-ministrable), je choisirais sans hésiter le premier. Au moins, ce sont des hommes plus honnêtes, même si mes options politiques personnelles sont différentes.

    Vous terminez en écrivant “Encore une minute, monsieur le bourreau. Pendant ces cinq minutes, nous pourrons peut-être convaincre nos compatriotes des erreurs fatales du passé et les persuader qu’il y a un espoir.” Vous pourriez écrire cela si vous aviez 18 ans, mais la liste de vos titres universitaires et professionnels laisse à penser que vous n’êtes plus à l’age des illusions, mais à celui de la sagesse, et que vous connaissez la vie politique Française depuis quelques années. Par conséquent, vous auriez plutôt dû écrire “Encore 5 ans, monsieur le bourreau, depuis 35 ans, nous essayons de vous convaincre des erreurs du passé, mais sans nul doute, les 5 prochaines années vont nous permettre de réussir là où nous avons toujours échoué !”. A la place du bourreau, je n’hésiterais pas une minute !…

  • Frédérique , 2 mai 2012 @ 8 h 15 min

    Vous oubliez le dicton qui dit que “les terres brulées produisent les plus belles récoltes”, 5 ans d’engrais sur une culture intensive ne nous apporteront que des produits de mauvaise qualité. Et puis comment croire que ce parti que vous soutenez sans vraiment le dire, va dans le sens qui est le votre, le libéralisme, alors qu’il soutient la création d’une union européenne qui nous plombe avec plus de lois, plus de réglements et le tout, en plus des notres. Aucune politique à l’heure actuelle ne detient la vérité, parce que la vérité est qu’il faudrait une petite dose de toutes les doctrines pour faire un monde qui va dans le bon sens, celui du progrés qui n’oublie personne sur le bord de la route. Et malheureusement l’occident s’est figé dans un bi-partisme aveugle qui l’entraine au fond du gouffre. Il faut tout casser quitte à descendre aux enfers, puisqu’il faut avoir souffert pour comprendre la douleur des autres. Un peu de courage! Ce n’est juste qu’un mauvais moment à passer, Mr Garello, la France pays de la révolution a peut-être encore un rôle à jouer dans l’histoire.

  • Yves Tarantik , 2 mai 2012 @ 9 h 23 min

    A Steph

    Le problème des intellectuels c’est que vous réfléchissez beaucoup trop.
    Peu importe les mots, mais voter blanc ou nul c’est bel et bien laisser une voix d’avance
    au candidat Hollande, en vertu de la démonstration mathématique (complexe je l’avoue) suivante :

    A étant ce qu’il est :

    premier cas : 1 voix de gauche – 1 voix de droite ou non = 0
    2ème cas (le vôtre) : 1 voix – 0 voix = 1 voix…
    …de plus au résultat final pour Hollande !

    Donc dans l’arithmétique actuelle, celle de ce second tout, quoi que vous en disiez, s’abstenir ou voter blanc c’est offrir ou laisser une voix de plus en faveur de l’élection de Hollande.
    Il n’y a la aucune insulte, juste un peu de bon sens..
    En 1981 les astucieux du camp chiraquien ont permit l’élection de Mitterrand.
    Nous en payons encore les conséquences (et les dettes) aujourd’hui !

  • Steph , 2 mai 2012 @ 13 h 10 min

    @Yves.

    Si les intellectuels réfléchissent-ils trop, alors peut-être avez-vous voulu faire la démonstration que vous n’étiez pas un intellectuel ?

    Dans mon cas, comme vous dites, vous partez d’une hypothèse que non seulement vous n’avez pas vérifiée, mais encore qui est fausse, et qui consiste à dire qu’en cas d’obligation, je voterai sarközy. Ce n’est pas exact : si j’était obligé de voter, sous la torture, estimant plus dangereux un ticket Sarko/Coppé qu’un ticket Hollande/Ayrault, je voterai Hollande sans état d’âme.

    Votre démonstration est donc à refaire, j’attends la suivante avec grande impatience, car pour le moment, votre “bon sens” n’a pas fait la preuve de son efficacité face à mon “intelligence” ! 😉

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