Béatrice Bourges, la mauvaise conscience de l’opposition parlementaire

Béatrice Bourges est une jolie femme. Si tout se passait pour le mieux dans le meilleur des mondes, elle serait chef d’entreprise, et gratifierait régulièrement de son sourire doux et sagace la couverture de Challenges, le magazine de ceux qui réussissent. Heureusement nous ne sommes pas encore tout à fait dans le meilleur des mondes, et au lieu de cela Béatrice Bourges est en ce moment emmitouflée dans une couverture de survie, assise sur un banc public à quelques dizaines de mètres de l’Assemblée nationale, entamant son cinquième jour de grève de la faim.

Pourquoi ? Quelle est ton projet? dirait un certain Dieudonné. Qu’est ce qui, en France, en janvier 2014, pousse une femme normalement constituée à mettre volontairement sa santé en danger pour des raisons politiques ? « Intégriste » « folle » « facho » entend-je déjà me répondre les bonnes gens. La femme que j’ai vue hier soir ne m’avait en rien l’air de tout cela, seulement d’une personne décidée, sereine, pleinement consciente de ses actes. Habitée ? Certainement. Mais par quoi ?

« Mon objectif est de provoquer une élection présidentielle anticipée ». Rien que ça ? Mais comment est-ce possible lui rétorqué-je? François Hollande a été élu. Et même si 80% des français n’en veulent plus, les sondages ne remplacent pas encore les élections et c’est heureux. « Il est vrai qu’il est peu probable qu’il démissionne, concède-t-elle, mais il existe un autre moyen : la destitution par le parlement. »

Vous aussi êtes étonnés ? Et bien figurez-vous que c’est vrai. Voici le contenu de l’article 68 de la constitution de la Ve république :

« Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour.
La proposition de réunion de la Haute Cour adoptée par une des assemblées du Parlement est aussitôt transmise à l’autre qui se prononce dans les quinze jours. La Haute Cour est présidée par le président de l’Assemblée nationale. Elle statue dans un délai d’un mois, à bulletins secrets, sur la destitution. Sa décision est d’effet immédiat. Les décisions prises en application du présent article le sont à la majorité des deux tiers des membres composant l’assemblée concernée ou la Haute Cour. (…).
Une loi organique fixe les conditions d’application du présent article. »

Problème; ladite loi organique, qui fait office de décret d’application, n’a jamais été votée (tiens comme c’est bizarre). La loi n’est donc pas applicable aujourd’hui.

Cependant, en soulevant cette question d’une improbable mais possible tentative de destitution de François Hollande, Béatrice Bourges met les parlementaires de l’opposition devant leurs responsabilités. En effet si les députés de droite sont sincères dans leurs critiques alarmistes à l’égard de la présidence Hollande, alors Béatrice Bourges leur offre le moyen de mettre leur actes en conformité avec leurs paroles, en proposant de faire voter cette loi organique.

Mais pourquoi ne pas attendre 2017 et les prochaines élections diront les bonnes âmes? Parce que si comme l’affirme le parlementaire UMP Guillaume Larrivé, qui réclamait mardi à l’Assemblée nationale le départ de François Hollande sous les hourras de son camp, la situation est telle que la France est en plein “naufrage”, c’est donc qu’il est impossible d’attendre encore 3 ans et demi! Or si certains peuvent se contenter de clamer du haut de leur tribune que pour la France, le départ de Hollande, c’est une question de survie, d’autres le vivent pour eux-mêmes dans leur quotidien et dans leur chair!

En ce sens, venir aujourd’hui au chevet de Béatrice Bourges c’est venir au chevet de la France. Témoigner son soutien à cette femme c’est dire à François Hollande, que son incompétence, sa médiocrité et son incurie manifeste, le rend tous les jours un peu plus coupable de ce « manquement grave à ses devoirs, manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. », et qu’il faut mettre un terme à la menace qu’il représente pour notre pays avant qu’il ne soit trop tard.

Vous en avez marre de manifester tous les dimanche ? Marre de ne pas vous faire entendre, marre de vous retrouver avec vos petits drapeaux face à l’armée de robocops de Manuel Valls ? Vous êtes tentés par le découragement ou par la violence face à ce pouvoir policier et liberticide ? Béatrice Bourges montre par son action qu’il existe une autre de voie pour mener la résistance. La voie pacifique bien que transgressive de la conscience individuelle dressée face aux baïonnettes, la voie qui fut celle des Martin Luther King, des Gandhi, des Mandela, et encore aujourd’hui des tibétains.

Oui ce jeûne est spirituel car il s’arme de prières, mais il est surtout politique par sa puissance symbolique. Y aurait-il, en France, en 2014, quelque chose de plus précieux que le confort matériel, de plus précieux que ma santé ? Quelque chose comme le droit d’espérer avoir un père et une mère ? Quelque chose comme la liberté d’expression ? Quelque chose comme le droit de penser par soi-même ? Le pouvoir ne s’y trompe pas, lui qui harcèle jour et nuit Béatrice Bourges avec une meute de policiers particulièrement zelés pour qu’elle déguerpisse le plancher et n’interpelle pas nos consciences, assisté dans ses basses œuvres par le silence complice des grands médias.

Pourquoi autant de policiers autour d’une personne affaiblie et sans défense, doivent se demander les touristes qui passent ces jours-ci par la Place Edouard Herriot. Il est vrai qu’en France on ne sait jamais ce dont est capable une femme déterminée et habitée par l’amour de sa patrie.

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45 Comments

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  • Charles , 2 février 2014 @ 22 h 18 min

    Je ne pense pas que une destitution apporte quelque solution à nos problèmes.
    A supposer que Hollande soit destitué,on fait quoi après ????

    Elire qui à sa place et pour faire quoi ????la même chose.

    La vraie solution ,c’est de bousculer le jeu des municipales puis des europetantes.
    Alors ,Ollandouille n’aura pas d’autre choix que de lancer
    des nouvelles élections législatives.

    Cela sera à conjuguer avec une baisse drastique des privilèges publics.
    Les salaires au dessus d’un certain seuil pour des emplois non stratégiques.

    Par exemple,les zornalistes du secteur public plafonnés a 3500 net/mois.
    A défaut,des chômeurs qualifiés seront disponibles pour les remplacer.
    Notre problème ce sont les rats dans le fromage qu’il faut sortir par la queue.
    Ils interdisent toute forme de progression dans la compréhension du public.

    Selon moi,BB s’est fait manipuler en croyant tenir une solution.

  • Véronique , 2 février 2014 @ 22 h 45 min

    Magnifique !
    Et dire que LMPT n’a pas eu un mot pour elle aujourd’hui à Paris…

  • PG , 2 février 2014 @ 23 h 21 min

    Elle est géniale : en jeûnant, elle provoque. L’admiration de ceux qui mangent, se disent cathos et ne s’engagent pas en politique.
    Elle est parfaite. Utile comme dirait Hollande, à la bonne conscience : nous avons notre martyre par procuration. Elle fait notre salut à notre place.
    En l’admirant, nous nous admirons.
    Pharisiens même.

  • bbldudo , 2 février 2014 @ 23 h 57 min

    Je vous retourne la question : bousculer les municipales et pour faire quoi après?
    De nouvelles élections législatives ? Très bien mais après ?…. nous pouvons toujours nous poser la question en attendant Hollande continue sa politique de destruction et rien ne l’arrête. Pourquoi attendre 2017 ? Personne ne reviendra sur leurs foutues lois. Alors 1er objectif le destituer. 1er effet de cette destitution : un signal vis à vis des autres qui ne pourront plus gouverner de la même manière, en bref il s’agit de restaurer la démocratie et de retirer du pouvoir aux oligarques, Après la destitution : le choc opéré par cette destitution fera bouger les lignes et créera un nouveau rapport de force pour peser de tout son poids sur la politique du pays en recentrant les choix sur plus de souveraineté, la défense de la famille etc… Avons nous d’autres choix ? A choisir mieux vaut emprunter la voie, certes risquée, que dessine Béatrice Bourges que d’attendre des lendemains qui chanteNT, en espérant à chaque fois en la prochaine élection. Perso je n’y crois plus et il faut penser autrement l’avenir du pays.

  • bbldudo , 2 février 2014 @ 23 h 59 min

    Vous êtes sévère… quel engagement politique avez vous ?

  • monhugo , 3 février 2014 @ 0 h 15 min

    “Quelle est ton projet? dirait un certain Dieudonné”.
    Quelqu’un parlant français lui répondrait : “projet est masculin”. De même que “tous les” va avec le pluriel : “dimanches”. Etc….
    En ces temps où le genre est incertain, rien ne vaut les “fondamentaux”.

  • Gisèle , 3 février 2014 @ 0 h 28 min

    Erreur , son nom était sur toutes les lèvres cet après midi et pas pour en dire du mal …
    Par contre , nous n’avons pas tout entendu de ce qui se disait sur le podium , et si c’est vrai que personne n’en a dit mot , ce n’est pas très sympa !

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