Obama et Poutine : autant en emporte le vent !

Selon Obama, la Russie serait du mauvais côté de l’histoire. C’est le patchwork typiquement américain qui mêle une conception simpliste et unilatérale du progrès, une vision westernienne de la politique et la stigmatisation du « méchant », « Dark Poutine ». Prenons Obama au mot de l’histoire. Il se situe toujours dans le présent de la communication. L’histoire n’est pour lui qu’une source d’images chargés d’émotions qu’il convient de plaquer sur la réalité complexe pour donner à celle-ci un sens politiquement utile. À propos de la Russie, des « détails » lui ont échappé. D’abord, la Russie n’est plus l’URSS. Ce n’est plus un empire qui occupe la moitié de l’Europe, menace le monde libre par toute une série d’actions violentes qui imposent ses alliés en Afrique, en Asie et en Amérique latine, dans l’arrière-cour des USA, comme disait Reagan. Ce sont les Américains et non les Russes qui sont en Afghanistan et luttent contre le génie que Washington a sorti de sa bouteille, pour vaincre les Russes justement : les islamistes, armés par l’Amérique, financés par les Saoudiens et soutenus par le Pakistan. La Russie demeure une grande puissance, militaire et nucléaire, le plus grand territoire de la planète, mais elle n’est plus animée par une idéologie totalitaire à vocation mondiale. C’est un État qui veut seulement protéger ses intérêts et son statut. En second lieu, la Fédération russe a permis l’indépendance des autres États de l’URSS,  en Asie, mais aussi en Europe, pour des pays proches culturellement de la Russie qui avait annexé leurs territoires depuis des siècles. Un tel abandon de souveraineté est unique. Les États du Nord n’ont pas accepté la Sécession de ceux du Sud aussi aisément. Troisième point : lorsqu’un pouvoir anti-russe s’installe à Kiev, en rêvant de rejoindre l’Union européenne, et l’Otan, c’est l’arrière cour de la Russie, la Crimée avec sa base navale de Sébastopol, qui est menacée. Les Américains, en tentant de renverser Castro ou en débarquant dans l’île de Grenade avaient agi de même, et ils avaient raison. Quatrième point, la Crimée et l’Est de l’Ukraine sont peuplées de russophones qui souhaitent bénéficier de la protection de Moscou. L’une des premières mesures du nouveau gouvernement ukrainien a été la suppression stupide et discriminatoire de l’enseignement du Russe. Si Ottawa supprimait l’enseignement du français au Québec, ce ne serait pas du « bon côté de l’histoire ». L’arrivée des soviétiques à Prague ou à Budapest contre la volonté de la population, sans réaction américaine,  n’a aucun rapport avec l’intervention russe en Crimée bien accueillie par ses habitants. Quant à l’inévitable « reductio ad hitlerum » avec les Sudètes, faite par l’ancien responsable de la diplomatie tchèque, Karel Schwarzenberg,  elle est inutilement blessante pour un chef d’État qui souhaite que son pays soit reconnu et respecté, sans projet de domination mondiale, et dont on s’est ingénié à casser l’effet Sotchi.

“Le vent de l’histoire n’est pas celui qui pousse un incendie que les Russes n’ont pas allumé.”

Qui occupe le mauvais côté de l’histoire en admettant qu’il existe ? Tant que les Américains protégeaient le monde libre, on pouvait regretter leurs échecs et leur poids en vies humaines, se féliciter de leurs succès en dépit de procédés peu démocratiques et d’alliances douteuses. Après l’effondrement du bloc communiste, l’ennemi nécessaire au maintien du leadership américain est devenu le terrorisme islamiste et ses complices. Beaucoup d’États ont soutenu l’Amérique dans ce combat, y compris la Libye de Khadafi et la Syrie de Assad. Toutefois, la politique américaine a montré une ambiguïté qui laisse soupçonner que ses objectifs, sous couvert de croisade morale dans le sens de l’histoire, sont avant tout les intérêts de la superpuissance. La nébuleuse Al-Qaïda est née à la lisières des pétro-monarchies et des moudjahidines d’Afghanistan. Le wahabisme de l’allié le plus fidèle de l’Amérique dans la terre d’Islam, l’Arabie Saoudite, finance dans le monde entier un islamisme rigoriste et rétrograde, fait régner à domicile la charia évidemment contraire aux Droits de l’Homme brandis par les Occidentaux, et protège sans doute hypocritement par là un système politique, et ceux qui en tirent avantage, aux antipodes de la démocratie. Pourtant, l’Amérique a  cherché à abattre les dictatures nationalistes arabes, souvent proches de la Russie et armées par elle, alors que leur heure était passée avec l’Union soviétique. L’intérêt de cette « croisade » qui a conduit à l’instauration de régimes islamistes, à la guerre civile, au retour à la dictature et parfois au renforcement d’Al-Qaïda n’est pas celui du monde libre. Les « places et leur peuple en révolte », les révolutions des fleurs et les printemps arabes vous ont un air de série hollywoodienne qui éveille des doutes sur leur spontanéité. Le lien logique entre la séparation du Kosovo d’avec la Serbie et le refus d’un retour de la Crimée à la Russie, c’est la volonté de faire reculer la Russie. Le droit ni le sens de l’histoire n’y ont aucune place. Le Triangle de Weimar (Allemagne, France, Pologne) a joué un rôle décisif dans la signature des accords qui permettaient la transition à Kiev. Ils n’ont pas été respectés. Le Parlement a destitué le Président et accentué la division du pays. L’Ukraine est un État composite, à l’équilibre précaire. Il fallait respecter cette diversité et cet équilibre afin de permettre à ce grand et riche pays de rétablir son économie et de devenir un pont entre la Russie et l’Europe sans être intégré à celle-ci et encore moins à l’OTAN. Le vent de l’histoire n’est pas celui qui pousse un incendie que les Russes n’ont pas allumé.

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57 Comments

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  • 0 / 10
  • zouzou , 5 mars 2014 @ 8 h 22 min

    Le danger pour l’Ukraine n’est pas Poutine, mais les banquiers internationaux qui tiennent déjà le bloc dont nous faisons parti, on paie assez pour le savoir.

  • Marie Genko , 5 mars 2014 @ 9 h 15 min

    @Olex,

    Cher Monsieur,
    Vous êtes peut-être ukrainien, mais visiblement vous ne comprenez pas le Russe!
    Il suffit d’ouvrir son poste de télvision pour voir et entendre les foules d’Odessa, de Donetz et d’ailleurs réclamer l’aide de la Russie et exiger un référendum en brandissant des drapeaux russes !
    Evidemment ce n’est pas sur “Euronews” qu’on vous les montrera…!

  • Frédérique , 5 mars 2014 @ 9 h 45 min

    LE lâche député FN est prié de voter une résolution pour l’envoi de troupes en Ukraine, mais les 61 députés d’Europe Écologie Les Verts (17), de Divers gauche (22), du Parti radical de gauche (12), du Front de gauche (10) en sont exemptés? Une malencontreuse épidémie de gastro-entérite les cloue au lit, ou sont-ils trop occupés par la mise en place de prochaines expéditions punitives contre les vilains fachos?

  • Boutté , 5 mars 2014 @ 10 h 04 min

    Si vous vous exprimiez en Français, nous pourrions faire effort pour vous lire .

  • Eric , 5 mars 2014 @ 10 h 24 min

    Et bien je suis d’accord avec l’article de M. Vanneste.
    Je pense aussi que les 2 pays entreront dans l’histoire, mais l’un en créant le chaos partout, en faisant des guerres et des coups d’état, l’autre en faisant le contrepoids .
    Je trouve que Poutine est un chef d’etat de grande classe,exceptionnel, quant à Obama , je ne sais si l’histoire retiendra son nom.

    Quant à l’Ukraine, ce n’est que les évenements récents qui ont fait que je me suis intéressé à elle, pour découvrir une complexité à laquelle je ne m’attendais pas.

    Pour moi, jusqu’à présent, l’Ukraine, c’etait le grenier à blé de l’URSS, et Tchernobyl.
    En fait j’ai découvert un pays mal fagoté, aux frontieres artificielles, non cohérent du point de vue ethnique et linguistique et à l’histoire compliquée du fait de sa constitution.
    Ses 2 gros problèmes sont l’incapacité d’avoir un chef d’Etat probe et non corrompu , et son insuffisante économique qui en fait un pays pauvre et ruiné.
    Peut-être ces 2 élements sont l’explication de la renaissance du néo-nazisme en Europe dans ce pays , et l’explication qu’on puisse encore faire des coups d’état en europe .
    Elle m’a fait aussi comprendre que toutes ces coups-d’état prétendus révolution accouchent souvent d’un chaos du pays pire que l’état précédent .

  • Jo , 5 mars 2014 @ 10 h 48 min

    Vous avez parfaitement raison. L’Amérique ne supporte pas que la Russie aide des pays qui sont dans l’Europe comme ce fut le cas pour Chypre ! Souvenez-vous il y a un an ce fut le hold-up des comptes à Chypre et bien sûr c’était de l’argent sale !
    C’est comme l’argent du Vatican, c’est de l’argent sale !

    Mais l’Amérique qui spolie les peuples là où elle convoite les richesses, pour elle c’est de l’argent “propre” !
    Que sait-on des comptes gelés de la Libye et de l’Irak ???
    Le peuple crétin est prié de croire ce que ces donneurs d’ordres prétendent !

    Actuellement la Syrie est protégée par le Véto russe donc la Russie est l’ennemie !
    Et il est quand même inquiétant de constater que le Venezuela connait des troubles, idem en Ukraine, idem en Chine, idem en Syrie… et qu’un semblant de calme soit trouvé en Egypte, en Tunisie…
    Et qui se trouve derrière ???

  • Jo , 5 mars 2014 @ 10 h 56 min

    L’information, ne vous en déplaise, y est autant fiable que celle qui émane du Monde, du Figaro ou de Libération qui elle est une information déformée et collabo !
    Lorsqu’une information dérange, vous êtes certain de ne pas la trouver dans la presse française ou elle sera déformée, interprétée, charge à nous de la contrôler au mieux !

    Hollande est un peu ridicule de faire la leçon à Poutine lui qui n’a comme sympathisants que ceux qui l’entourent et qui fait l’objet de multiples demandes de démission !
    A quand pour lui Varennes !!!

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