DOCUMENT : le recours en référé des identitaires demandant l’interdiction du Congrès de l’UOIF

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE MONTREUIL

Référé

(Article L. 521-3 du Code de Justice Administrative)

POUR :

A LA REQUETE DE : L’Association BLOC IDENTITAIRE domiciliée 33, Boulevard de Riquier 06.300 Nice, association régie par la loi du 1er juillet 1901 et par son décret d’application du 16 août 1901 agissant à la diligence du Président Fabrice Robert, de nationalité française, né le 28/10/1971 à Orléans, consultant.

Ayant pour avocat :

Maître Frédéric PICHON
Avocat à la Cour
7, rue Saint-Lazare
75009 Paris

CONTRE :

Monsieur le Préfet de la Seine Saint Denis

 

PLAISE AU TRIBUNAL

Le requérant demande au tribunal qu’il fasse injonction au Préfet de la Seine Saint Denis d’interdire le rassemblement prévu par l’UOIF au Bourget du 6 au 9 avril et ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard sur le fondement de l’article L. 521-3 du Code de Justice Administrative et ce, notamment, pour les motifs suivants :

RAPPEL DES FAITS

 

Du 6 au 9 avril prochain, l’UOIF organise au Bourget un salon annuel rassemblant plusieurs milliers de personnes ainsi que de nombreuses organisations islamistes.

Plusieurs prédicateurs étrangers étaient invités à cette occasion.

Le gouvernement français, chose assez rare pour être soulignée, a décidé d’interdire d’entrée à ce salon, quatre prédicateurs étrangers en raison de leurs propos qui « qui appellent à la haine et à la violence » et qui «  portent gravement atteinte aux principes de la République dans un contexte actuel représentent un fort risque de troubles à l’ordre public ».

Le communiqué du ministère de l’intérieur ajoutait : “Le gouvernement protège la liberté de tous les cultes et est attaché à ce que les musulmans de France puissent vivre librement leur foi” et “est en outre attaché à la liberté d’expression, droit fondamental garanti par la constitution”, soulignent les ministères de MM Guéant et Juppé. “Mais alors que la France est frappée par des extrémistes qui l’attaquent au nom de d’idéologies ou de croyances dévoyées, il est capital que ces libertés s’exercent dans le cadre de la loi et dans le respect des valeurs fondamentales qui sont les nôtres“.

Cette interdiction a été annoncée conjointement par les ministères des Affaires étrangères et de l’Intérieur.

Bien que contestée par l’UOIF dans un communiqué, cette mesure n’a fait l’objet d’aucun recours administratif.

L’affaire a donc été jugée suffisamment grave pour que pas moins de deux ministères d’Etat soient directement saisis en plus haut lieu, à la demande du chef de l’Etat lui-même.

En effet, pour justifier cette démarche, celui-ci déclarait être “intervenu directement pour que des prédicateurs qui prennent notre système de valeurs pour cible permanente restent chez eux“. Il avait cité la veille sur France-Info le cas de Youssef Al Qaradaoui, détenteur d’un passeport diplomatique.

Ce problème est réglé (…) J’ai indiqué à l’émir du Qatar lui-même que ce monsieur n’était pas le bienvenu sur le territoire de la République française. Il ne viendra pas (…) La République doit se défendre. Des gens qui ne respectent pas les valeurs de la République n’ont rien à faire chez nous“, a-t-il lancé.

Tout ceux qui ont tenu des propos infamants contre la France ou contre les valeurs de la République ne seront pas autorisés à entrer sur le territoire. La France n’a pas vocation à accueillir ceux qui enfreignent ses valeurs“, a insisté M. Sarkozy mardi

De telles mesures n’ont donc pas été prises sous le coup de l’émotion en raison d’un climat politique ou électoral tendu relatif à la présence de l’Islam en France, mais reposent sur des fondements juridiques que l’on peut considérer comme sérieux puisqu’à ce jour, aucun recours n’a été exercé contre ces décisions.

II. DISCUSSION

L’Article L521-3 du code de justice administrative Créé par Loi n°2000-597 du 30 juin 2000 – art. 4 JORF 1er juillet 2000 en vigueur le 1er janvier 2001 dispose qu’ « En cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative ».

Les quatre prédicateurs qui se sont vus refuser ou retirer la possibilité de se rendre sur le territoire français sont : Akrima Sabri, Ayed Bin Abdallah Al Qarni, Safwat Al Hijazi, Abdallah Basfar.

  • Akrima Sabri, un Palestinien ancien mufti de la mosquée al-Aqsa (Jérusalem), avait annoncé en 2008: «Il y a des centaines de femmes qui sont prêtes à se sacrifier pour libérer la terre de Palestine et à sacrifier ce qu’elles ont de plus cher, leurs propres enfants. Je vous informe également qu’avec votre patience et le pouvoir de Dieu, nous allons y arriver.» Il s’agit incontestablement d’un appel direct à la commission d’actes de terrorisme.
  • Ayed Ben Abdallah al-Qarni, né en Arabie saoudite, qualifie lui les juifs de «frères des singes et des porcs», dans son livre, La Tahzan.
  • Quant à Safwat al-Hijazi, un Égyptien, imam et prédicateur à la télévision, il reconnaissait en 2009 sur al-Nas TV : «Oui, je suis antisémite. Si ce ne sont pas les dirigeants arabes, nous devrons dévorer les juifs avec nos dents
  • Enfin Abdallah Basfar, imam d’une mosquée de Dheddah et récitateur de Coran très prosélyte, il a légitimé “le fait de battre son épouse si elle n’obéit pas à son mari“. 

Ces prises de position sont non seulement contraires aux lois de la République française en ce qu’elles appellent à la violence, à la haine, à la discrimination, au terrorisme ou portent atteinte à l’égalité hommes/femmes, mais plus généralement, elles sont contraires à la dignité humaine, notion développée tant par la CEDH que par la jurisprudence administrative.

Quand bien même ces prédicateurs sulfureux ne participeraient plus au congrès, l’UOIF ne pouvait décemment ignorer la qualité de ses invités ni la teneur de leur propos. Le fait que celle-ci ait cru bon devoir contester cette mesure d’interdiction, sans cependant aller jusqu’au bout de son raisonnement en engageant un recours, démontre que l’UOIF n’entendait pas se démarquer de ces prédicateurs ni de leurs propos.

L’absence de ces prédicateurs lors du congrès prévu du 6 au 9 avril, ne fait cependant pas disparaître le grave risque de trouble à l’ordre public ainsi que de nombreuses atteintes aux lois de la république.

Bien plus, le Chef de l’Etat lui-même, après ces mesures d’interdiction a réitéré ses mises en garde à l’encontre de l’UOIF mardi 3 avril dernier contre tout risque d’appels à la haine en écrivant au président de l’UOIG lui-même :

«Je vous le dis avec la plus grande fermeté: je ne tolérerai pas que puissent s’exprimer au cours d’une manifestation publique organisée sur le sol français les porteurs de messages d’appels à la violence, à la haine, à l’antisémitisme, qui constituent des attaques insupportables contre la dignité humaine et les principes républicains.» Prévenant l’UOIF: «Les congressistes que vous réunirez dans quelques jours au Bourget doivent en être convaincus

C’est reconnaître que la simple interdiction des prédicateurs sulfureux ne semble pas suffire pour empêcher de nouveaux appels à la haine.

Se rattachant aux frères musulmans, c’est « ontologiquement » que l’action de l’UOIF appelle à transgresser les lois de la république.

Déjà dans un article publié dans Libération du 16 juillet 2004, Monsieur Zair KADACHOUCHE, membre du Haut Conseil à l’intégration et président de l’association intégration France considérait à propos de l’UOIF que cette organisation incitait les musulmanes à ne pas respecter la loi sur le voile : «de se présenter dans les établissements dans les tenues qu’elles auront choisi de porter», en précisant «nous sommes prêts à leur fournir, ainsi qu’à leur entourage, un soutien moral, une aide au dialogue, une information sur la bonne connaissance de leurs droits, des conseils avisés d’acteurs de terrain, une assistance juridique et (…) si l’acharnement illégal devait aboutir à l’exclusion de certaines d’entre elles du système public d’éducation, nous serions également à leurs côtés pour tout mettre en oeuvre de manière à leur fournir un soutien scolaire qui leur permette de poursuivre leurs études en attendant qu’elles soient pleinement rétablies dans leurs droits» (lettre publique du 29 juin 2004).

Ainsi, l’UOIF appelle clairement ses fidèles à transgresser la loi civile.

A cet égard, le médiatique Tariq Ramadan est lui toujours invité. Ce dernier avait créé la polémique le 31 mars 2003 dans le quotidien Le Monde en sollicitant un moratoire sur la lapidation des femmes adultères et les châtiments corporels.

Le ministère de l’intérieur lui-même regrette la présence de Tariq Ramadan

Les ministères « regrettent » par ailleurs l’invitation lancée par l’UOIF de l’intellectuel suisse Tariq Ramadan, « dont les positions et les propos sont contraires à l’esprit républicain, ce qui ne rend pas service aux musulmans de France ».

Mais bien plus, en dépit de déclarations prudentes condamnant officiellement la violence et le terrorisme, les liens organiques de l’UOIF démontrent le contraire :

L’Union des organisations islamiques d’Europe (UOIE), structure mère de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), n’a jamais caché son soutien au mouvement terroriste palestinien Hamas. L’UOIF, peu après la mort du chef du Hamas, le cheikh Yassine, avait fait applaudir lors de son congrès la mémoire du chef de l’organisation tué le 22 mars 2004 par les forces israéliennes. Ahmed Yassine qui a dirigé le Hamas jusqu’à sa mort, fut l’instigateur des attentats suicides à l’encontre des civils israëliens,. Chakib Ben Makhlouf, président de l’UOIE, s’est rendu en Palestine en décembre 2011 afin de rencontrer les acteurs politiques du territoire, dont le Hamas.

S’il est légitime de critiquer la politique israëlienne dans les territoires occupés, point de vue qui relève de la liberté d’expression, en revanche, le soutien à une organisation classée comme terroriste est assimilable à une apologie du terrorisme, prévue et réprimée par l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881, modifié par la loi anti-terroriste du 9 septembre 1986, et qui punit de cinq ans d’emprisonnement et de 450000 euros d’amende ceux qui auront directement provoqué, dans le cas où cette provocation n’aurait pas été suivie d’effet, à commettre des actes de terrorisme. Seront punis des mêmes peines les personnes qui auront fait l’apologie du terrorisme.

Sur le site de l’UOIF, on peut lire des prêches et des recommandations d’ouvrages du mentor spirituel des frères musulmans Youssef Al-Qaradhawi cité par le Président de la république lui-même dans le cadre de sa mise en garde contre les risques d’appel à la haine lors du congrès prévu ce week end.

Ce dernier considère que l’Europe est une terre à conquérir au nom de l’Islam par les prêches et le prosélytisme. Al-Qaradhawi, qui dirige le conseil européen de la fatwa ( dont fait aprtie l’UOIF) au côté de théologiens fondamentalistes encourage le djihad contre les Juifs et les Américains ( « Il n’y a pas de dialogue entre nous et les Juifs, hormis par le sabre et le fusil » autorise les violences conjugales, justifie la polygamie, les attentats kamikazes et la mise à mort des homosexuels.

Youssef Al-Qardaoui, dans un passage sur le droit du divorce explique dans son livre comment l’homme doit réagir lorsque son épouse se rebelle contre son autorité au sein du cercle familial :

« après avoir tenté de rectifier de son mieux l’attitude de son épouse à l’aide de mots choisis, en usant de persuasion subtile et en raisonnant. […]. Si cette approche échoue, il lui est permis de la battre légèrement, avec ses mains, en prenant soin d’éviter le visage ou d’autres parties sensibles. (…). En fait, cette “correction” (souligné dans le texte original) doit se conformer à celle dont a usé le prophète de l’islam Mahomet lorsqu’un jour, en colère contre un serviteur, il lui dit, : “si ce n’était de crainte du Jour de la Résurrection (jugement dernier), je t’aurai battu avec ce miswak (écorce tendre d’arbuste servant à se nettoyer les dents) (rapporté par Ibn Sa’d dans son Tabaqat) »

Concernant la possibilité de changer de religion, principe reconnu par la CEDH, le cheikh Al Qardaoui, se référant au coran considère que : «  Oui, j’allais leur proposer l’Islam et, s’ils refusaient, j’allais les mettre en prison. » (…) Le sens de cette tradition est que `Umar a pensé que la peine de mort n’était pas applicable à l’apostat en toute situation. Elle peut être annulée ou reportée si une nécessité impose son annulation ou son report. Dans ce cas précis, la nécessité consiste en l’état de guerre, en la proximité géographique entre ces apostats et les idolâtres et en la crainte que ces apostats ne soient tentés de passer à l’ennemi. `Umar a probablement fait l’analogie avec ce qu’avait dit le Prophète — paix et bénédiction sur lui : « Ne coupez pas les mains pendant les batailles. », et cela de crainte que le voleur, furieux, ne rejoigne l’ennemi. ».

Si ce dernier ne recommande pas systématiquement la peine de mort pour les apostats, c’est-à-dire les musulmans ayant renié leur foi, ce n’est que dans un but stratégique, notamment dans le cadre d’un état de guerre.

C’est encore al-Qaradawi qui a lancé une « fatwa » sur la chaine Al-Jazeera contre le philosophe Robert Redeker qui vit depuis, en France!, dans la clandestinité, protégé par les services spécialisés français.

Il résulte de tous ces éléments malheureusement non exhaustifs, que tant à travers ses liens organiques que ses références politiques, religieuses ou philosophiques, que l’UOIF, appelle clairement à transgresser les lois de la république au nom de son interprétation de l’Islam.

Ses déclarations conciliantes ne résistent pas à l’examen des faits et s’inscrivent dans le cadre de la la “takia” c’est-à-dire un double discours selon ses interlocuteurs tout en étant finalement très clair sur ses finalités celui de la mise en place la loi coranique, la charia, dans tous les pays musulmans.

A cet égard, le communiqué de l’UOIF à la suite de ces interdictions est pour le moins surprenant. L’organisation soutient que :

« Cheikh QARADAWI est un homme de paix et de tolérance qui a œuvré pour l’ouverture et la modération et dont les positions ont toujours été en faveur de la justice et de la liberté des peuples(…)Il exerce une influence positive dans le monde musulman et est continuellement attaqué par les mouvances extrémistes en raison de ses prises de position modernes, en faveur de la démocratie, du droit des femmes et du dialogue entre les civilisations ».

Concrètement, l’UOIF entend porter atteinte, dans le cadre de son interprétation stricte du coran à des principes essentiels protégés tant par les dispositions européennes, la constitution que les lois de la république que sont :

 

– le principe de laïcité et le droit de changer de religion

– le respect des femmes et le refus de toute violence conjugale

– la distinction du spirituel et du temporel

– le refus de l’appel à la haine contre une personne en raison de son appartenance ou non appartenance à une religion déterminée et de l’anti-sémitisme

– la condamnation du terrorisme comme mode d’expression

Dans ces conditions, l’association Bloc identitaire est parfaitement fondé à solliciter du tribunal qu’il fasse injonction au Préfet de la Seine Saint Denis d’interdire ce rassemblement sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard.

En effet, l’article 3 de l’association Bloc identitaire de ses statuts prévoit :

Le rassemblement de ce congrès porte manifestement atteinte à ce projet en ce que l’UOIF entend clairement porter atteinte tant aux institutions de la République qu’à l’identité de la France par l’instauration d’une loi théocratique d’essence totalitaire.

Les conditions d’urgence sont parfaitement réunies puisque le congrès est prévu du 6 au 9 avril prochain soit dans quelques jours.

Plusieurs associations ou intellectuels ont d’ores et déjà appelé à interdire l’UOIF et la tenue du congrès y compris des organisations associées à l’UMP en l’espèce la Droite libre ainsi que de nombreuses organisations représentant la communauté juive, preuve de l’émoi suscité par ce rassemblement.

Qui plus est, ce rassemblement est organisé dans un département sensible, dans un contexte politique lié à des actions violentes menées par des groupes islamistes. Un tel congrès dans ce contexte risque de surcroît de favoriser l’amalgame avec des musulmans modérés.

Quant au bien fondé de la requête, celle-ci-ci est incontestable dans la mesure où il a été démontré que l’organisation UOIF, dont le gouvernement français a refusé l’accès à quatre prédicateurs, entend transgresser les principes essentiels de la République.

La tenue d’un congrès rassemblant plusieurs dizaines de milliers de personnes afin d’y distiller ses discours de haine constitue à l’évidence un trouble à l’ordre public.

Les injonctions adressées aux personnes privées sont parfaitement recevables telles que celles adressées à des occupants sans titre du domaine public afin qu’ils évacuent la dépendance occupée (Conseil d’Etat, 16 mai 2003, Sté Icomatex) ou encore aux occupants irréguliers des locaux utilisés par un service public administratif (Conseil d’ Etat, 28 mai 2001, Sté Codiam).

Cette mesure relève de la compétence du juge administratif.

PAR CES MOTIFS ET TOUS AUTRES A PRODUIRE, A DEDUIRE, A SUPPLER AU BESOIN MEME D’OFFICE

L’association requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal Administratif de Montreuil :

Enjoindre le Préfet de Police de la Seine Saint Denis d’interdire le congrès de l’UOIF prévu du 6 au 9 avril à Saint Denis.

SOUS TOUTES RESERVES

Fait à Paris le

Frédéric PICHON

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