Tout se paye !

Trois en moins d’un an ! Trois grands groupes français passés à l’ennemi étranger : Publicis, Lafarge… maintenant Alstom. N’omettons pas PSA et son ouverture de capital au chinois Dongfeng. N’oublions pas auparavant, avec Pechiney racheté par Alcan en 2003, Arcelor par Mittal en 2006 et Rhodia par Solvay en 2011, ces mariages à la barbe bleue qu’ont connu certain de nos fleurons français !

Au passage, il est amusant de remarquer les réactions indignées de nos politiques et journalistes d’habitude si prompts à louer les bienfaits du mondialisme multiculturel et multiethnique. Ce qui est bon pour l’homme ne le serait pas pour l’entreprise ?

Mais passons et revenons au cœur de notre problème, c’est-à-dire la disparition de champions hexagonaux. En se remémorant les multiples diatribes contre ces groupes du CAC 40 aux profits indécents et à l’actionnariat exploiteur, on est enclin à penser que le pays tout entier va manifester sa joie de les voir enfin dépecées. Il n’en est rien ! Toute annonce d’OPA sur une entreprise française a la curieuse habitude de ramener sur le devant de la scène leurs innovations, leurs emplois et leurs impôts ! Adieu patrons trop payés. Adieu actionnaires ventripotents. Adieu profits indécents. Nos grandes entreprises redeviennent vertueuses et désirées !

Cette brusque sortie de l’anticapitalisme primaire bien français arrive malheureusement souvent trop tard. Car Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes. Et la France s’emploie elle-même méthodiquement à briser ses industries. Fiscalité, charges sociales, réglementation, droit du travail… Tout est prétexte à casser leur dynamique et à leur compliquer la tâche dans un environnement déjà ultra-concurrentiel. Rajoutez-y l’aberrante politique de la concurrence européenne et la messe est dite !

“Sans reprise en main de son destin, la France continuera de dépérir jusqu’à ce que son héritage – totalement dilapidé – ne suffise plus à acheter la paix sociale. Car n’oublions pas que si les civilisations sont mortelles, les nations ne le sont pas moins. La France et son peuple ne pourront rayonner sans une économie forte et prospère. À défaut, il nous faudra accepter de ne plus écrire l’Histoire, mais de la subir.”

Plus globalement, ces fleurons qui trépassent sont le reflet de notre économie toute entière. Jour après jour, elle s’appauvrit et se fait conquérir tantôt par des Américains, tantôt par des Allemands… de plus en plus par des Chinois, des Indiens ou des Qataris. Depuis bientôt 40 ans, la France vit sur son passé et ses acquis. À l’exception de quelques réussites récentes mais bien trop sporadiques, elle voit son héritage fondre comme neige au soleil, chacun essayant d’en tirer un maximum d’avantage à court terme. C’est notre addiction à la dépense publique qui ressurgit ainsi. Notre attachement à un modèle social ruineux et inefficace. Notre détestation du capital et des richesses.

Alors si nous souhaitons demain que Danone, Arkema ou Ingenico restent des entreprises françaises, si nous souhaitons également que nos talents et nos fortunes demeurent en France, il est temps d’accepter les réformes différées depuis trop longtemps, à commencer par la revalorisation de l’entreprise et la réduction drastique de la sphère publique. Il est surtout temps de changer d’état d’esprit en plébiscitant l’initiative individuelle, la prise de risque et la réussite personnelle ! Il est temps d’accepter une règle économique de base, à savoir créer de la richesse avant de la distribuer.

Mais pour réussir ce retour dans la compétition mondiale, il est nécessaire de s’appuyer sur des élites téméraires et responsables. Des capitaines d’industrie visionnaires et capables d’innover ; aptes à assumer leurs échecs le cas échéant. Des politiques serviteurs et non profiteurs, retrouvant le sens de l’intérêt général occulté aujourd’hui par leur clientélisme dispendieux. La réduction du nombre d’élus au Parlement et la fin de leur régime de retraite spécial constitueraient deux signaux positifs de cet élan réformateur.

Sans reprise en main de son destin, la France continuera de dépérir jusqu’à ce que son héritage – totalement dilapidé – ne suffise plus à acheter la paix sociale. Car n’oublions pas que si les civilisations sont mortelles, les nations ne le sont pas moins. La France et son peuple ne pourront rayonner sans une économie forte et prospère. A défaut, il nous faudra accepter de ne plus écrire l’Histoire, mais de la subir.

> Henri Dubreuil est diplômé en économie et en finance.

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20 Comments

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  • 0 / 10
  • Binze , 7 mai 2014 @ 19 h 48 min

    Ces gens qui envisagent avoir réussi dans la vie uniquement s’ils ont gagné beaucoup d’argent, m’irritent.
    Si à 50ans t’as pas ta rollex, t’as raté ta vie. pourrait résumer au moins l’idéologie générale de l’auteur.
    Il y a quelques vérités dedans quand même. Mais une piètre philosophie de la vie, toute libérale tout à fait semblable à celle des oligarques qui veulent notre mort.

  • Eric Martin , 7 mai 2014 @ 20 h 08 min

    Euh… Il ne vous vient pas à l’idée que l’argent peut servir à avoir une famille nombreuse, à créer de l’emploi, à aider son prochain ou la société civile, par exemple ?

  • Extrait , 7 mai 2014 @ 20 h 35 min

    Y-a-t-il besoin d’innover — inventer les iPhone ou autres inutilités de demain — ou de polluer plus que les chinois pour s’occuper d’une famille nombreuse ?

  • Eric Martin , 7 mai 2014 @ 20 h 49 min

    La réussite sans polluer, c’est possible.

  • Catoneo , 7 mai 2014 @ 22 h 13 min

    Ce pays est ridicule quand il prend la pose.
    Gouverné par des socialistes (déclarés ou masqués) depuis quatre-vingt ans, son destin est celui de Pompéi. Ses derniers atouts seront piétinés par les castes retranchées dans leurs privilèges qui vendront la vigne après avoir vendu le vin.
    Même s’il cherche à y participer, il n’écrit plus l’histoire !
    Sauf révolution ou pire.

  • Extrait , 7 mai 2014 @ 22 h 42 min

    Mais la réussite se mesure-t-elle à la taille du compte en banque ?

    La pollution, c’est une chose. La surproduction en est une autre. Il faudrait rééditer Ivan Illitch.

    Trop d’alcool, trop de nourriture, trop de tabac, c’est mauvais pour l’homme, non ? On peut aussi souffrir d’obésité énergétique ou d’obésité technologique. Quelles inventions récentes ont réellement amélioré la vie des hommes ?

    Même en remplaçant toutes nos usines par de supers éoliennes non polluantes — c’est de la théorie, je sais que les éoliennes posent de nombreux problèmes —, cela ne résoudrait pas le problème de la surconsommation et des conséquences sociales et philosophiques associées.

    label 10 print “reussite != consommation”
    goto 10

  • Binze , 7 mai 2014 @ 23 h 09 min

    c’est utile, surtout dans notre modèle de société, mais c’est pas indispensable, sauf dans votre esprit étriqué.
    Dans la vision libérale, tous les problèmes sont réduit à une question d’argent.
    Alors que la plupart et les plus importants des problèmes se règlent par le respect de valeurs morales, et l’argent ne sert à rien ou à corrompre les esprits cupides.

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