Copé-Fillon : Choc des ambitions ? Heurt des idées ? (2/3)

Tribune libre de Hubert Montmirail

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Une ligne… droite indexée à des terroirs foncièrement différents. Jean-François Copé s’inscrit sans difficultés dans la droitisation de Nicolas Sarkozy, qui apparaît déjà dans son passage à la tête du groupe UMP (combat pour l’interdiction de la burqua), mais aussi dans ses premiers mois à l’UMP, lors du fameux débat sur les cultes. Quant à François Fillon, il apparaît comme une figure plus centriste (un « centriste balladurien », selon Éric Zemmour), l’homme de la bonne gestion qui peut plaire aux opinions modérées. Cette différence a des origines lointaines et s’explique – partiellement – par les terroirs politiques respectifs de ces deux hommes.

Jean-François Copé, plus sensible à une terre politique marquée par le FN. Élu de Seine-et-Marne, Jean-François Copé est plus sensible aux réactions politiques des Français face aux malaises suscités par la présence d’étrangers. Jean-François Copé, qui perdit en effet sa circonscription à cause du FN, dans le cadre d’une triangulaire, en 1997, le sait. A priori, Jean-François Copé est plus sensible aux questions des électeurs FN, alors que François Fillon semble en faire plus rapidement le deuil. À défaut de tout rapprochement avec le FN et son appareil, les questions soulevées par ses électeurs constituent un impondérable. La Seine-et-Marne offre à la fois l’image d’un département rural et urbain, marqué par une poussée de la gauche aux dernières élections présidentielles (François Hollande réalise 49,25% au second tour) et par un vote important pour Marine Le Pen (elle obtient 19,65% au premier tour). Le contraste français dans sa splendeur… Une terre de droite, confrontée à une montée de la gauche, notamment dans les zones urbaines, mais marquée par un vote FN : la Seine-et-Marne a aussi des cités sensibles…

François Fillon : une figure de l’Ouest, moins sensible aux crises identitaires. François Fillon apparaît comme un homme de l’Ouest. La Sarthe n’a pas été un département spécialement marqué par les questions migratoires ou identitaires, comme tout le grand Ouest français. La progression du FN, même si elle est importante (dans la Sarthe, Marine Le Pen réalise 19,17% des suffrages exprimés : à la différence des résultats de Seine-et-Marne, ce résultat de la candidate FN peut être perçu comme l’expression d’un milieu rural en voie de déclassement), reste encore récente pour être intégrée dans les comportements des décideurs de la droite UMP. C’est cette France de l’Ouest, naguère conservatrice puis démocrate-chrétienne ou radical-socialiste et désormais socialiste réformatrice, qui a massivement voté pour François Hollande. Dans ces terres, on peut voter sans problèmes pour un élu centriste ou socialiste, voire Modem ou Vert. Nicolas Sarkozy, à l’exception de la Vendée, de la Mayenne et du Maine-et-Loire, a très largement perdu dans ces terres. Le nouvel ancrage politique de François Fillon ne change rien à l’affaire. Paris est peu sensible à l’attrait du FN, y compris dans la nouvelle circonscription l’ancien Premier ministre (5e arrondissement, moitié du 6e arrondissement et les trois-quarts du 7e arrondissement). L’électeur parisien comprend encore assez mal les questions identitaires et n’est pas (encore) touché par les chocs de la mondialisation, comme les délocalisations et les fermetures d’usine. Cependant, ne préjugeons pas des attitudes. Ainsi, lors de la dernière campagne présidentielle, François Fillon a émis quelques inflexions identitaires, comme son appel à certaines religions de reconsidérer leur pratique culturelle. Sans le dire, c’était une manière de viser le halal

Un avenir différent pour l’UMP ? L’hypothèse Copé. Si Jean-François Copé passe, on peut dire que la droitisation est durable. Si elle est rejetée par certains cadres (Roselyne Bachelot, Chantal Jouanno, Nathalie Kosciusko-Morizet), elle serait ancrée dans l’horizon des militants, voire des petits cadres. Dans ce cas, la question des rapports avec le FN demeure épineuse et peut se poser de manière contradictoire : désistement aux élections ou stratégie d’éradication. Dans ce dernier cas, le FN apparaît comme un concurrent direct. On comprend alors la volonté, lors des dernières législatives, de Jean-François Copé de maintenir aux triangulaires le candidat UMP, même mal placé, face au FN et au PS : à la fois pour le « ni-ni », mais aussi pour éviter l’élection d’un élu frontiste. D’autre part, pour ne pas apparaître comme l’otage du FN, Jean-François Copé cherche à agréger des soutiens plus centristes, comme Jean-Pierre Raffarin. Les humanistes sont aussi des alliés de la stratégie Copé pour le contrôle de l’UMP et aussi en raison de la faible sympathie de ces derniers pour François Fillon. On peut d’ailleurs craindre une dédroitisation de Jean-François Copé, mais sur le long terme, lorsque la question de l’élection présidentielle se posera… Après tout, cela rappelle aussi Nicolas Sarkozy qui, dans son ascension (2004-2007), cherchait à séduire les électeurs du FN, mais aussi certains cercles « branchés », en prônant, par exemple, la suppression de la double peine, quitte à s’afficher avec Bertrand Tavernier. Mais l’on notera cependant que cette droitisation est plus durable et fait figure d’acquis pour tout chef de l’UMP. La campagne présidentielle de 2012 a peut-être légué un héritage auquel l’on ne peut renoncer.

À suivre mercredi…

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1 Comment

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  • jean-françois MARY , 13 juillet 2012 @ 18 h 03 min

    NI L’UN NI L’AUTRE.
    DEHORS TOUS LES 2

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