Ce n’est pas moi qui ai commencé

Tribune libre de Myriam Picard pour Nouvelles de France

Le soir du premier tour de la présidentielle, j’interviewais foule de responsables du FN, des gens imbuvables et dangereux qui poussèrent le vice jusqu’à ne pas montrer ce qu’ils étaient : de Wallerand de Saint-Just à Julien Sanchez, en passant par Paul-Marie Coûteaux, Bruno Gollnisch, Julien Rochedy et Marie-Christine Arnautu, tous firent gentiment risette et ne me fournirent pas le moindre commencement de début d’ébauche de dérapage verbal haineux ! Comble du cauchemar pour tout journaliste qui se respecte, je posais deux questions (si ce n’est pas de l’obstination…) à Frédéric Chatillon.

Je m’attendais évidemment, le soir même, à trembler de fièvre et à claquer frénétiquement du talon. Rien du tout. Ces gens-là ont certainement des défauts, les moins raisonnables d’entre eux ont peut-être même des ulcères, mais rien d’apparemment contagieux.

C’est donc avec surprise que je découvre que des députés, plutôt que de s’engraisser paisiblement à nos frais, préfèrent prendre l’escalier plutôt que l’ascenseur, à l’Assemblée nationale. Comprenez qu’ils risqueraient d’y rencontrer de supposés pestiférés. Gens dont il semblerait que les idées et les valeurs, forcément nauséabondes, soient transmissibles.

Gilbert Collard dissimulerait-il quelque maladie honteuse ? Marion Maréchal-Le Pen cacherait-elle, sous sa blondeur, quelque tare effrayante et épidémique ? Faut-il alerter Marisol Touraine ?

Ou serait-ce tout simplement que Christophe Cavard, député EELV du Gard, éminent personnage qui a confié ses émois à un journaliste (« Je fais en sorte de les croiser le moins possible, je passe par le petit escalier parce que je sais que eux prennent l’ascenseur. »), n’a pas compris que Gilbert Collard ne mord personne, en dépit de ses formules acides sur les ‘esprits’ tolérants, sensibles, ouverts au multiculturalisme, au bien, à la lutte contre le mal et la gastro-entérite ? Que Marion Maréchal-Le Pen, dont nous savons tous ce que nous devons penser vu ce qu’en pensent les gens qui nous disent ce que nous devons penser, se lave sans doute les mains régulièrement et, pour la centième fois, qu’on se le dise, n’est pas une réincarnation d’Eva Braun.

Le malheur de grand nombre de représentants de « droite » comme de « gauche » dont nous sommes les consternés spectateurs, c’est que dès que l’un d’eux ouvre la bouche, non seulement on se doute qu’il va pondre une énormité pontifiante, mais on sait qu’il aura un pseudo-opposant pour macérer aussi sec une ineptie équivalente.

Ces gens-là ne savent décidément pas se tenir. Des gosses mal mouchés qui se paient le luxe d’insulter des millions d’électeurs. Leur demande-t-on d’embrasser frénétiquement des miniatures du Père Le Pen ? Leur aurait-on imposé l’adhésion au fan-club de Florian Philippot ?

On ne réclame de leur part que d’être des adultes responsables, des élus qui se tiennent, des hommes et des femmes de devoir, si tant est que cette notion soit encore compréhensible pour la masse en général, et pour la masse politique en particulier.

Mais non. NKM, la glaçante Mère la Morale de l’UMP, le jour de l’élection de la présidence du Perchoir, s’est dispensée de ce mouvement d’élégance morale, de ce banal mais symbolique serrage de mains qu’elle aurait dû accorder à Marion Maréchal Le Pen, désignée comme scrutateur. Et Benoît Tessier, photographe chez Reuters, a parfaitement saisi l’indignité de la scène.

Je n’aime pas le pathos dont suppure notre détestable époque. J’abhorre la sensiblerie agressive façon Rivarol ou Gala. Mais il faudrait être une brute pour ne pas saisir tout ce que le geste avait d’infamant, de gueux, de lâche. Une jeune fille de 22 ans a réussi, dans la ville que l’on sait, cet exploit d’être élue. Sans vague, sans scandale, sans petite phrase. Et Nathalie Kosciusko-Morizet a refusé de saluer cette très jeune élue du peuple. Au nom, très certainement, de la préservation de l’intégrité de son éminente et irréprochable petite personne. Elle a sans doute pensé que l’histoire (la Bonne, la Propre, l’Antifa) conserverait le souvenir ému d’une digne femme demeurant dans le camp du Bien et refusant de serrer la pince de la bête immonde. Elle ne fut pas la seule.

Copé, déjà, en piteux petit Agnan, le nez qui coule et la mine cafarde, pleurnichait, lors de la rentrée parlementaire. Il lui arrivait un grand drame, il faut dire. Une catastrophe, quelque chose de tout à fait inacceptable : il s’était retrouvé – ordre alphabétique oblige – assis à côté de Gilbert Collard. Et comme c’est un personnage politique de tout premier plan, il s’est empressé de bramer sur l’épaule d’un journaliste du Figaro : « Je n’ai jamais de chance, je gagne jamais au loto. On est 577 et je tombe à côté de lui. »

Le regretté Coluche le disait déjà : « Je ferai aimablement remarquer aux hommes politiques qui me prennent pour un rigolo que ce ne n’est pas moi qui ai commencé. »

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15 Comments

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  • 0 / 10
  • Gérard (l'autre) , 9 août 2012 @ 18 h 03 min

    Magnifique article ! Merci Myriam ! Ca soulage !

  • Robert , 9 août 2012 @ 22 h 18 min

    Bien vu!
    L’endive NKM et le petit caïd de récré Copé ont le courage qu’ils peuvent.
    Pas celui d’aller jusqu’au bout des idées qu’ils prétendent défendre et soit passer au PS soit cesser de diaboliser le bon sens exprimé par le FN.
    Si la démocratie n’avait pas été torturé pour lui faire dire électoralement ce qu’on veut qu’elle dise, le FN aurait du avoir une centaine d’élus. Mais deux, plus Bompard, c’est encore trop pour ces Tartuffe.
    Alors qu’ils gardent leurs indignations pour s’en faire des lavements et nous laissent servir notre pays en défendant ses intérêts, ses vrais intérêts pas ceux d’une caste non élue ou de lobbys étrangers.

  • THIERRY V , 10 août 2012 @ 7 h 56 min

    Entièrement d’accord avec vous sur le fond….Vous êtes toujours lucide et courageuse.
    Mais avez-vous emprunté la forme à Coluche ?

    Au plaisir de plus nombreuses contributions.

  • Mizette , 10 août 2012 @ 10 h 27 min

    La droite (la vraie) mettra de l’ordre dans tout cela pour la prochaine élection présidentielle, c’est à ce prix que la France restera le pays des français, digne de respect.

  • Quéribus , 10 août 2012 @ 11 h 49 min

    Et je rappelle ce gentil mot de Marion à NKM : “dans cinq ans ma tante sera présidente”.

  • Le Pog , 10 août 2012 @ 18 h 19 min

    Très bon article de M. Picard, seule la référence à coluche me gène un peu, c’était une personne foncièrement gauchiste avec tout ce que cela peu sous entendre.
    Mais merci cependant.

  • Le Pog , 10 août 2012 @ 19 h 02 min

    Mise à part la référence à Marion, pourquoi “Quéribus” comme pseudonyme ?

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