Nous devons être une force de proposition

Tribune libre de Cyril Brun*

Dans la grisaille de notre quotidien national et international, le 24 mars, et toute la dynamique qui y a conduit, représente un formidable élan d’espérance. N’est-ce pas d’ailleurs ce dont notre monde a le plus besoin ? Croire en un avenir meilleur, en des lendemains qui chantent, n’est-ce pas finalement le vrai sens du printemps français ? Nous sommes loin d’un appel à la révolte, d’une invitation à l’insubordination ou d’un encouragement à la violence. On ne peut construire le bien en utilisant le mal. C’est bien pour cela du reste que depuis des décennies toutes les politiques échouent. Le mal est une destruction. Et cette destruction, nous la subissons depuis les aveuglantes Lumières et aujourd’hui, nous sommes face à un champ de ruines. Les gouvernements qui se sont succédés, en France comme ailleurs, n’ont pas réussi à enrayer la spirale de ce mal destructeur. Et à présent, ils ne parviennent pas à relever les ruines, pas même à les rendre simplement habitables. Et il en sera ainsi tant que leur vision de l’homme et de la société sera tronquée, car on ne peut pas vouloir le bonheur de l’homme en niant la vérité humaine.

L’homme a des besoins matériels, physiques, intellectuels et spirituels. Ces besoins ne sont pas en concurrence, ils s’organisent entre eux très simplement. Les exigences matérielles sont le socle nécessaire à chaque être humain pour lui permettre de se développer physiquement, intellectuellement et spirituellement. Mais chaque être humain étant unique, ces besoins sont universels (principes d’égalité) mais adaptés (principe d’équité). C’est pourquoi la standardisation des biens matériels ne se justifie que jusqu’à un certain point. Les exigences physiques sont la base du bien-être et du développement humain. Elles peuvent conditionner, pour partie, le développement intellectuel et spirituel. Ici plus qu’ailleurs, peut-être, équité rime avec justice. Uniformiser les réponses aux nécessités physiques c’est exclure de facto les handicapés. Les exigences intellectuelles de l’homme, pour leur part, s’appuient sur un certain nombre de conditions matérielles et physiques. L’accès à l’information, à l’éducation, à la culture, à la capacité de discernement, à l’environnement médiatique et social, sont autant de passages obligés de l’épanouissement intellectuel. Quant à la réalité spirituelle, elle ne peut s’épanouir que dans la liberté et la vérité. Il y a donc un équilibre, une harmonie naturelle, entre les besoins fondamentaux de l’homme. Déséquilibrer l’un ou hypertrophier l’autre, c’est compromettre l’ensemble de l’épanouissement de l’homme.

Voilà, ce me semble, l’avenir de l’homme, l’espérance que portent la Manif Pour Tous, le Printemps Français, l’Ecologie humaine et tant d’autres initiatives encore. Et cet absolu, cet idéal d’apparence utopique est un chemin qui se renouvelle sans cesse tout en restant unique, propre à chacun. En scandant dimanche leur droit à la liberté de conscience, les manifestants n’ont pas exprimé autre chose que le désir de vivre dans une société où ces quatre besoins fondamentaux de l’homme soient promus et défendus. Nous avons besoin d’une économie saine qui concourt au bien matériel, physique, intellectuel et spirituel de tous comme de chacun. Nous avons besoin d’une société libre, c’est-à-dire suffisamment fière d’elle-même pour aller à la rencontre de l’autre, sans peur ni agressivité. Nous avons besoin d’une société d’hommes et de femmes responsables, où chacun a les moyens, matériels et intellectuels, de mener à bien sa tâche et en contrepartie l’obligation d’en rendre compte. Nous avons besoin d’une société solidaire dans laquelle chacun prenne conscience de sa responsabilité vis-à-vis du bonheur de l’autre. Et pour cela, il nous faut un peuple formé, capable de discerner et donc libre. Il nous faut une véritable démocratie, ancrée sur la responsabilité des personnes. Une démocratie effective selon le principe de subsidiarité, à rebours de la centralisation.

“Croire en un avenir meilleur, en des lendemains qui chantent, n’est-ce pas finalement le vrai sens du printemps français ?”

En soit, tout un programme qui consiste à redonner l’éducation aux parents, en les aidant dans cette tâche, à faire de l’école un lieu où l’on apprend à apprendre et à discerner, c’est-à-dire, à être libre. L’éducation à la liberté est la condition sine qua non de la démocratie et de l’épanouissement personnel. Cette éducation passe par l’exemple, l’établissement de cadres clairs, fondés sur des valeurs en phase avec la réalité de l’homme. Valeurs qu’il faut promouvoir mais aussi expliquer dans une pédagogie qui suscite librement l’adhésion. Cela suppose de promouvoir et encourager un autre modèle de société dans lequel la responsabilité et donc la solidarité soit le lien essentiel. Un modèle de société qui lutte contre l’individualisme et l’égoïsme par la prise de conscience que l’épanouissement des uns passe par celui des autres. Une telle prise de conscience doit bouleverser le rôle et la place de l’économie et donc de l’homme dans l’économie qui doit retrouver sa place au service de l’épanouissement de l’homme. Or nous percevons combien, au contraire, l’homme se trouve asservi par un système qui le broie.

Aujourd’hui, après des décennies de fuite en avant mortifère, nous avons besoin de stabilité. Or cette stabilité passe par la famille, lieu de pérennité s’il en est, et la satisfaction des besoins les plus élémentaires pour l’homme. Ce qui veut dire qu’il faut retrouver l’adéquation entre qui est l’homme et l’action politique. Cette dernière visant, non pas à satisfaire les besoins des uns et des autres, mais garantir à chacun les conditions de son épanouissement. Il ne s’agit pas de faire à la place, mais de mettre en capacité d’être libre et responsable, tout en assurant le bien et la sécurité des autres.

Soit 10 principes fondamentaux et non négociables pour une véritable liberté :

Redonner à chacun les conditions matérielles de sa liberté et de son autonomie (travail, logement, formation, sécurité, environement).

Redonner à l’économie sa place au service de l’épanouissement de l’homme (favoriser l’initiative, la liberté d’entreprendre, la créativité utile au bien de la société, redonner le primat à l’économie réelle).

Recréer une société libre, sans peur et fière de ce qu’elle est (identité et racine nationale, différences culturelles et régionales, politique d’accueil et d’intégration respectueuse de la nation et des personnes).

Promouvoir une société d’hommes et de femmes responsables (liberté d’entreprendre et d’initiatives, responsabilité sur ses risques engagés, obligation de rendre des comptes, donner à celui qui tient le clou de pouvoir aussi tenir le marteau).

Construire une société solidaire dans laquelle la conviction que l’épanouissement des uns passe par celui des autres (Coresponsabilité, contre assistanat).

Eduquer à la liberté pour un peuple formé, condition de sa liberté.

Il nous faut une véritable démocratie où les institutions locales soient plus responsables et autonomes, à rebours de la centralisation.

Redonner l’éducation aux parents.

Restaurer les valeurs en phase avec la réalité de l’homme (Dignité intrinsèque, protection des plus faibles, droits et responsabilités, liberté de conscience, d’expression, d’entreprendre, droit de propriété, droit à la vie, égalité véritable, justice en prise avec la réalité).

Sanctuariser la famille, lieu de stabilité et de développement de l’enfant comme de l’adulte.

*Cyril Brun est le délégué général de l’Institut éthique et politique Montalembert à Paris.

Du même auteur :
> Résistance culturelle dans une liberté fraternelle
L’heure est-elle à la Résistance ou à la Révolte ?

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