La purée de pois de la politique française

En politique, le brouillard c’est à Paris plutôt qu’à Londres. Au Royaume-Uni, l’éclaircie du chômage s’accentue. La courbe est repassée sous la barre des 2 millions en septembre. En 2011, on comptait 8,3% de demandeurs d’emploi. Ils sont 6% aujourd’hui. En France, il y a 3,46 millions de chômeurs sans activité en Métropole et 3,72 avec l’Outre-Mer après une hausse de 5,5% en un an. Si on compte les chômeurs en activité réduite, on parvient à plus de cinq millions ! D’où vient cette situation météorologique désastreuse sur le front de l’emploi dans notre pays ? La comparaison avec le Royaume-Uni est facile. Ce pays a gardé sa monnaie. Son système politique permet au gouvernement qui dispose de la majorité à la Chambre des Communes de mener une politique claire voire brutale sans être entravé par les obstacles qui s’accumulent chez nous. Ainsi, David Cameron a-t-il pu en collaboration avec la Banque d’Angleterre obtenir des résultats remarquables. Les taux d’intérêt ont baissé, une relance monétaire représentant 9 points de PIB a été pratiquée. Les dépenses publiques sont passées de 47 à 43,8% en trois ans. 550 000 emplois publics ont été supprimés, mais 1,2 million d’emplois marchands ont été créés, grâce à la baisse de la fiscalité et à l’appel à l’initiative privée pour répondre aux besoins dans le domaine de l’éducation ou du retour à l’emploi. L’impôt sur les sociétés est à 20% contre 33 1/3 chez nous avec taux réduit et seuils pour ne pas changer. Avec 3% de taux de croissance, le Royaume-Uni vire en tête. Le gouvernement conservateur-libéral a appliqué son programme, affronté les critiques et les contestations et en tire aujourd’hui le bénéfice. Au-delà des obstacles institutionnels et des pesanteurs traditionnelles qui existent chez nous, depuis la monnaie européenne jusqu’à l’anachronisme idéologique de la gauche, en passant par les organismes qui freinent les réformes, comme le Conseil Constitutionnel, la cause la plus redoutable de notre faiblesse est l’absence de courage, cette vertu que Churchill et Maggie avaient déjà incarnée en leur temps.

Après plus de deux ans de promesses non tenues, d’incertitudes et d’improvisations, d’usines à gaz improductives comme le CICE, en l’absence de vision d’ensemble, de plan cohérent et de toute pédagogie, le gouvernement socialiste accumule les mauvais résultats et suscite les colères. Un chômage calamiteux dans une économie en berne, un commerce extérieur déficitaire, une industrie qui s’effondre, une croissance atone, une dette qui s’accroît et un déficit qui persiste : cette série noire ulcère les Français, agace l’Europe, décourage les agents économiques. Alors, après avoir promis que tout irait mieux avec le Pacte de responsabilité, que le choc de simplification allait libérer les énergies, le gouvernement aux abois pare au plus pressé : non pas les Français, mais Bruxelles ! Les Français n’ont pas le courage de réformer ? Vous allez voir ! Surgit la Loi Macron, l’arme absolue du nouveau social-libéralisme qui va doper la France ! La mise en scène publicitaire est exceptionnelle, avec une conférence de presse du Premier Ministre. Les réactions sont en revanche plus réservées. Globalement, c’est une loi fourre-tout, un poème à la Prévert auquel il ne manque que les ratons-laveurs, et qu’on a trouvé dans les tiroirs de Jacques Attali. Personne n’en attend sérieusement une conséquence notable pour la croissance. Déjà les mécontentements se font entendre. A droite, les professions réglementées affirment ne pas avoir été consultées, dénoncent l’atteinte à leurs intérêts légitimes. A gauche, on souligne que les ouvertures de grandes surfaces le dimanche n’augmenteront pas le pouvoir d’achat des Français et risquent a contraire de faire disparaître des commerces indépendants. En fait ces critiques qui ne sont ni de gauche ni de droite expriment simplement le doute du bon sens sur une loi aux multiples aspects disparates dont l’impact sera faible et le message incompréhensible.

Or, c’est là que se situe le problème essentiel qui se pose à notre pays. Intégré à l’Union Européenne et à l’Euroland où il est seulement l’élève revêche qui ne veut pas faire ses devoirs, notre pays n’a pas depuis longtemps et singulièrement depuis plus de deux ans un gouvernement capable de lui expliquer ce qu’il veut faire et encore moins capable de le faire ensuite. Nos gouvernements louvoient entre les écueils des élections perdues et des colères populaires, apaisant d’un côté par le mensonge, détournant l’attention de l’autre par des mesures inopportunes. Ils papillonnent d’une loi l’autre en accentuant l’incertitude et l’insécurité juridiques. Ce système encombré d’avis et de rapports tente désespérément de tenir le peuple à l’écart. Celui-ci risque effectivement de se décourager comme en témoigne la montée de l’abstention. Il peut aussi attendre son heure, celle qui sonnera la fin de la partie pour ceux qui font semblant de nous diriger. Sans maîtriser le moins du monde une réalité résistante, nos gouvernants bénéficient de taux d’intérêts provisoirement miraculeux, d’une baisse du prix du pétrole qui leur est étrangère et d’un recul de l’Euro dont leur mauvaise politique est pour le coup responsable. C’est davantage de ces éléments dont ils ne sont pas volontairement les auteurs qu’ils peuvent attendre une embellie plutôt que d’une nouvelle loi peu utile.

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