Il reste au Président Hollande son statut légal et… c’est tout !

La ficelle est un peu grosse, mais il est vrai que la taille est une condition du succès. Alors que le mécontentement vire à la fronde, que les torrents de protestations et de revendications convergent pour former un fleuve auquel le pouvoir actuel ne semble plus en mesure de résister, celui-ci use d’une vieille méthode qui a fait ses preuves. Il faut un bouc émissaire et le ministre de l’Intérieur l’a nommé : « l’extrême-droite qui n’aime pas la France ». Le jeu se déroule en trois temps : d’abord, le Président profite des commémorations pour réinvestir sa fonction symbolique et revêt à cette occasion le vêtement sacré du Chef de l’État, la personne à laquelle on ne touche pas sauf pour guérir des écrouelles. En République, ce sacré est devenu laïque, mais il se déploie néanmoins dans les rites, notamment consacrés au culte de la patrie. Lorsque l’inévitable se produit, que des profanateurs commettent le sacrilège de perturber le rite et d’insulter le symbole vivant, alors le discours de diabolisation intervient et constitue la seconde étape. L’excommunication républicaine tombe : de tels comportements rejettent leurs auteurs hors de la communauté républicaine. Cet anathème est efficace et redoutable : il fait naître une réprobation d’une grande partie de la communauté, notamment lorsqu’on rappelle à juste titre que le 11 novembre est un hommage aux centaines de milliers de morts pour la France. Il exclut et isole. C’est alors que s’ouvre le troisième chapitre, celui de l’amalgame qui permet de propager la condamnation de proche en proche, d’englober, à partir d’une poignée de manifestants mal inspirés, les vrais adversaires que le simple bon sens doit tenir à l’écart de pareils débordements : le Front national, dont, semble-t-il, des membres ont été interpellés préventivement, dans une action de police plus que de droit et les opposants au mariage unisexe qui n’ont toujours pas déposé les armes.

On voit les buts de la manœuvre : d’abord, pour le Président, victime de l’outrage, tenter de reconquérir par le discours d’unité le rôle qui doit être le sien et par la victimisation regagner un peu de sympathie auprès des Français. Ensuite, diaboliser à nouveau le Front national, adversaire perçu d’abord comme moins dangereux, notamment dans la perspective présidentielle d’un 2002 à l’envers, mais dont la montée dans les sondages et les élections partielles ainsi qu’une évolution qui le rend plus fréquentable, ont fait une menace considérable pour le PS, dans la mesure où il l’emporte dans les classes populaires. Enfin, et là, la question se pose de savoir si c’est une tactique personnelle ou une stratégie concertée avec le Président : sortir l’atout que représente Valls. Le discours républicain et national du ministre de L’Intérieur le rend incontournable. Il n’est pas mêlé directement aux problèmes économiques. Il plaît à l’électorat populaire. Il séduit une partie de la droite. Il est le plus à même de donner une seconde chance à un pouvoir totalement essoufflé après 18 mois d’exercice. Sa nomination à Matignon donnerait un répit et permettrait peut-être d’atténuer le choc des municipales. Ce serait pour lui un risque énorme, pour la gauche un danger de fracture redoutable, mais pour le Président une chance de recomposition de la majorité qui est peut-être la dernière de rebondir.

Il ne faut pas instrumentaliser l’Histoire, draper dans les plis du sacré des manœuvres politiciennes. Objectivement, le Président de la République subit actuellement un rejet tel que sa légitimité réelle s’en trouve compromise. Alors que notre pays se trouvait face à une situation économique et sociale dramatique, il a commis la faute de s’attaquer prioritairement à une institution qui, pour un certain nombre de Français, est « tabou » : la famille fondée sur le mariage. L’acharnement dans le vote de la loi, le mépris hautain à l’encontre des opposants ont fait de ceux-ci des adversaires résolus qui n’entendent pas respecter qui ne les a pas respectés. Lorsqu’on se donne le droit de déboulonner les valeurs auxquelles une grande partie des Français est attachée, on peut difficilement restaurer l’union nationale et on ne peut plus asseoir sa légitimité que sur la performance, l’efficacité, lesquelles ne sont pas, à l’évidence, au rendez-vous. Il reste le statut légal. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les Français ne s’y sont pas toujours arrêtés.

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34 Comments

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  • 0 / 10
  • gerard57 , 13 novembre 2013 @ 22 h 04 min

    On l’aura compris : le Français ne pourra plus qu’être “républicain” et “démocrate”. Toute autre étiquette lui vaudra la prison, la mise au pilori, la vindicte médiatique et populaire, l’interdiction d’exercer son métier, d’éduquer et de vivre avec ses enfants, et ainsi de suite.

    Joli programme !

  • Paule C , 13 novembre 2013 @ 22 h 13 min

    Je ne suis pas conspirationniste, mais cet entêtement dans l’idéologie et le mépris de plus en plus affiché du mécontentement des Français cache probablement quelque chose d’inavouable, comme l’obéissance à des ordres venus de plus haut, dans le but de détruire les fondements de la société française, pour les remplacer par

  • Charlotte Corday , 13 novembre 2013 @ 23 h 12 min

    Je me suis aussi demandé souvent quelle était la cause d’une telle obstination. Obstination absurde et contre productive.

    Il y a sans doute un chantage à la clé. Avec toutes les “casseroles” que cette bande de bras-cassés traînent derrière eux depuis 40 ans…on peut tout imaginer!

    Je n’oublie pas les propos d’un Luc Ferry dénonçant un ancien ministre pédocriminel couvert par le système. Des cas comme celui-ci, des affaires criminelles sordides doivent être légion parmi nos “élites” franc-maçonnes. D’ailleurs Ferry n’a pas tardé à être remis sur le droit chemin et on ne l’a plus du tout entendu sur ce sujet.

  • esprit libre , 13 novembre 2013 @ 23 h 15 min

    Exact !
    Et il est l’ennemi de la France ! Il a perverti la France et il la déshonore.

  • Charlotte Corday , 13 novembre 2013 @ 23 h 45 min

    J’ai pu constater dans mon entourage proche “de gens bien respectables et bien élevés”, une évolution très rapide ces temps-ci.

    Pendant des années ils vous regardaient de haut avec un sourire en coin lorsque vous leur parliez du “réel”. Ils vous qualifiaient derrière votre dos “d’intégriste”, de “réactionnaire”, “d’extrémiste”.

    Pendant les “manifs”, ces bonnes âmes, ne manquaient pas une occasion pour vous faire la leçon: “Cachez donc ce drapeau royaliste”!, arrêtez de crier: “Hollande démission”!

    A l’heure où j’écris ces lignes, que de chemin parcouru!

    Les gens bien élevés ont depuis goûté à la matraque, à la lacrymo, à la calomnie, aux GAV, et aujourd’hui certains sont persécutés au travail, dans les écoles, les associations…
    Ils ont compris que leur démarche consensuelle et “bisounours” était non seulement inefficace mais qu’ elle ne les protégeait même pas de la diabolisation!

    Alors maintenant, ils vous font les yeux doux et certains vont jusqu’à admettre que vous aviez raison depuis bien longtemps, c’est dire la “radicalisation”!

    Ajoutez à cette soudaine prise de conscience, la crise économique, la corruption, la criminalité galopante que l’on ne parvient plus à masquer…!

    Bientôt, c’est moi qui vais les traiter d’extrémistes sanguinaires!! ;-))))

  • Gisèle , 13 novembre 2013 @ 23 h 52 min

    Et encore .. enlevez toutes les glaces de la galerie de l’Elysée …on verra ce qui restera .

  • alain , 14 novembre 2013 @ 0 h 06 min

    charlotte,

    personnellement je n’ai rien vu de tel

    mais nous ne fréquentons sans doute pas les mêmes milieux.

    ceci étant il est clair que les “matériaux contestataires” s’accumulent !

    le pouvoir ne peut que se raidir idéologiquement puisqu’il ne peut pas donner du travail et qu’il ne sait que prendre l’argent qui reste.

    en conséquence on va monter aux extrêmes

    naturellement les “nouveaux ” vont se montrer plus “radicaux” que nous

    c’est normal ! c’est ce qui se passe quand il y a inversion de polarité. Le moins devient plus. Ce qui était vu comme négatif devient positif.

    Au niveau des “valeurs” la gauche va se faire laminer.

    Mais dans un premier temps je ne vois pas bien la sortie politique, car le FN n’est pas une solution.

    Pas de stratégie, pas d’équipes de gestion – en cas de participation au pouvoir quelle que soit la forme le FN explosera sur le mur des réalités.

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