Et si Poutine était la solution ?

Dans le « Western soft » que nous projettent les médias, il y a les bons et les méchants : d’un côté, les héros de la démocratie droit-de-l’hommiste derrière la star Obama, parmi lesquels Angela Merkel vient de prendre une place de choix ; de l’autre, les champions de la force obscure, dont Vladimir Poutine est une figure emblématique, et Viktor Orbàn un émule gênant, un mouton noir dans le troupeau bêlant de l’Union européenne. Entre le Prix Nobel par anticipation et l’ancien officier du KGB, le choix semble s’imposer… Un peu trop sans doute pour ne pas éveiller le sens critique indispensable à la liberté de penser et à la vraie démocratie.

Avec sa compétence professionnelle, l’ancien acteur Reagan qui avait simplifié la politique internationale en une guerre du Bien contre l’Empire du Mal. Cette conception simpliste était fondée. L’URSS occupait la moitié de l’Europe et avançait ses pions en Asie après la chute du Viet-Nam et en Afrique grâce à son satellite cubain qui y faisait la guerre. Elle envahissait l’Afghanistan tandis qu’elle réprimait sans complexe toutes les velléités de libération derrière le « rideau de fer ». La menace de la guerre des étoiles, hors de prix, la résistance intérieure, dans la Pologne catholique, et la victoire des Afghans, soutenus par les armes américaines, l’argent saoudien et le voisin pakistanais ont provoqué l’effondrement de l’Empire. Depuis la situation s’est renversée. Cependant, les Etats-Unis veulent un « remake » du film à succès.

Washington a joué les Frankenstein en créant un monstre ou plutôt en le réveillant. Le totalitarisme rouge a été remplacé par son vainqueur à Kaboul : le fondamentalisme islamiste. Bush junior, après le 11 Septembre a voulu reprendre le scénario original, en remplaçant les acteurs. L’ennemi public n°1 est devenu le djihadiste sanguinaire chassé d’Afghanistan et détrôné à Bagdad à travers un dictateur « national-socialiste »qui n’avait rien de commun avec lui. L’Orient compliqué ne s’adapte pas aux histoires simples. Les interventions militaires n’ont pas résolu les problèmes ou les ont aggravés. Les Talibans s’activent toujours chez les Afghans. L’Irak a explosé. Il est difficile de gagner des guerres lorsque l’ennemi n’est pas clairement désigné et qu’on a, pour amis, ses amis. Alors Obama est arrivé pour reprendre la bonne vieille cible russe, en essayant de dissoudre l’islamisme dans une version plus modérée. Sans succomber à un complotisme échevelé, la succession des printemps, les uns arabes, les autres ukrainiens ont présenté bien des similitudes avec leurs places parsemées de fleurs : que la bonhomie américaine ait été souvent le décor d’un machiavélisme achevé n’est pas nouveau et demeure logique dans une politique d’intérêt national. Tandis que les Etats-Unis se refaisaient une santé à coups de dollars et de gaz de schiste, leurs actions systématiquement provocatrices à l’égard de la Russie, en Syrie ou en Ukraine, allaient-elles dans l’intérêt de l’Europe ?

Le chaos syrien est à l’origine des mouvements migratoires encouragés par les Américains et leur allié turc. Le but est d’abattre le dernier pouvoir proche de Moscou au Moyen-Orient, non de renverser un dictateur, dont toutes les expériences récentes montrent qu’il laisserait la place au chaos, comme en Libye, ou à un retour à l’ordre musclé sous un régime militaire ou islamiste. La seule hypothèse farfelue est l’instauration d’une démocratie. Peut-on d’ailleurs imaginer qu’une manipulation systématique des peuples pour leur imposer des politiques sans option soit d’inspiration démocratique ? Peut-on croire que la volonté de priver les nations de leur identité pour les contraindre à adopter un modèle unique soit démocratique ? L’Europe en faisant valoir des droits individuels mais en privant les peuples de leurs choix est une démocratie bancale qui peut de moins en moins donner des leçons. La Russie est un pays dont l’Histoire est singulière. Elle n’a jamais connu de démocratie à l’occidentale. Sa culture dominante d’une fabuleuse richesse appartient cependant à la civilisation occidentale, européenne et chrétienne. Son dirigeant actuel poursuit avec succès un double objectif. Il veut d’abord rendre à son pays sa place dans le monde, sa sphère d’influence légitime auprès des pays qui pendant des siècles ont appartenu à l’Empire Russe. Il veut ensuite dépasser les contradictions de l’Histoire nationale en affirmant une identité fière d’elle-même, de Pierre-le-grand comme de Stalingrad. Ces ambitions ne menacent en rien l’Europe dont la Russie est le voisin géographique et le partenaire économique naturel dont l’appauvrissement ne présente que des inconvénients. Une Ukraine fédérale peut-être un pont entre l’Union Européenne et la Russie, à condition qu’elle n’intègre ni l’Europe ni a fortiori l’Otan. Vladimir Poutine va proposer un plan pour la Syrie. Là encore, la stabilisation de ce pays est dans l’intérêt des Européens. Il n’est pas sûr qu’il y ait une pareille convergence avec la Turquie et avec Etats-Unis. Il est temps, si l’Europe veut exister, qu’elle se libère du pays qui, il y a longtemps maintenant, l’a libérée.

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17 Comments

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  • 0 / 10
  • Catholique & Français , 14 septembre 2015 @ 12 h 55 min

    Le russe orthodoxe Poutine est éminemment sympathique pour un Catholique français de base comme moi; et pourtant une question folle (paranoïa ?) me gêne depuis 1989, rendue encore plus aigue par Fatima (les “erreurs de la Russie” dont parle le Secret en 3 parties, rendu public en 1999) : quel jeu la Russie joue-t-elle vraiment depuis la “chute” du communisme ? Poutine est-il vraiment ce qu’il montre ? Je garde toujours à l’esprit ces vieux textes communistes qui prennent un relief très particulier dans la période de chaos que nous vivons : “Nous ferons, le moment venu, les propositions de paix les plus spectaculaires de tous les temps. Il y aura des ouvertures étonnantes et des concessions extra-ordinaires. Les pays capitalistes, stupides et décadents, coopéreront avec joie à leur propre destruction. Ils nous donneront leur amitié. Ils se jetteront dans nos bras. C’est alors qu’ils se trouveront sans défense que nous les écraserons de notre poing fermé !” extrait d’un discours célèbre de Dimitri Manioulsky à l’Institut Lénine (1931) et celui-ci, plus récent : “Messieurs, ne soyez pas inquiets au sujet de ce que vous allez entendre concernant “Glasnost”, “Perestroïka”, “Demokratie” dans les années qui viennent. Ces choses sont principalement à l’usage de la consommation externe. Il n’y aura pas de changement significatif en URSS, autrement que pour des besoins de façade” (déclaration de Mikhaïl Gorbatchev au Politburo-Usage interne, en novembre 1987).

  • Pascal , 14 septembre 2015 @ 13 h 07 min
  • Cap2006 , 14 septembre 2015 @ 14 h 58 min

    La Russie de Poutine est un paradis pour ces habitants… c’est bien connu.
    Le retour d’une influence forte de l’Eglise Orthodoxe fait assurément rêver une église catholique moribonde en France.

    pas moi.

  • Marcus , 14 septembre 2015 @ 17 h 29 min

    Poutine n’est certainement pas un enfant de cœur, mais je l’échangerais volontiers contre toute notre clique de politiciens incompétents, corrompus, amateurs et dangereux (Hollande, Case vide, Belcassine, Valls, Taubira, etc.).
    Les idiots utiles ne se posent jamais les bonnes questions. Poutine est au pouvoir depuis plus de 15 ans, pourquoi les médias occidentaux le diabolisent-ils depuis 2 ou 3 ans seulement ?

  • lucotin , 14 septembre 2015 @ 18 h 14 min

    On ne peut nier que Poutine aime son pays la Russie, il a une assise populaire

    On ne peut pas en dire autant de nos dirigeants actuels qui veulent détruire la France de toujours avec en plus des indépendentistes, des bi-nationaux (comment cela peut-il exister ?) au gouvernement.
    Tous ces gens là n’ont plus aucune légitimité

  • Monique Neveu , 14 septembre 2015 @ 18 h 29 min

    Mais si Poutine est tellement aime par son peuple et si sur de son pouvoir pourquoi bloque-t-il les opposants a son parti La Russie Unie?

  • Gigi , 14 septembre 2015 @ 19 h 08 min

    Il y a longtemps que je le dis dans mes commentaires de 7/7 , mais non, grâce a l’Amérique ” Obama et scie ” Poutine c’est le méchant et quand Obama est venu a Bruxelles, c’était juste pour se mettre l’UE dans sa poche !

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