Après le danger Ebola, le risque Letchi !

Mon intervention d’aujourd’hui – j’en ai bien peur – ne porte que sur une question très locale, propre à La Réunion, une question très triviale, une simple histoire de cantine scolaire, mais peut-être saura-t-on y voir aussi le symptôme plus général d’une dérive inquiétante de nos mœurs. De quoi s’agit-il en effet ? Il s’agit de la décision prise par une municipalité de l’île de faire décortiquer et dénoyauter les letchis avant de les distribuer aux écoliers pour leur repas de Noël.

Pour ceux qui ne sauraient pas ce qu’est un letchi qu’ils apprennent qu’il s’agit d’une petite boule de pulpe translucide délicatement parfumée, entourant un noyau de la taille d’une olive et recouverte d’une légère écorce rouge laquelle se rompt sans aucune difficulté. Pour beaucoup de gens d’ici, le plaisir de manger des letchis, un fruit associé aux fêtes de Noël, est inséparable de cette opération de décorticage. Sous cette écorce protectrice le letchi a en effet conservé toute sa fraîcheur et toute sa saveur, lesquelles disparaissent totalement quand on le met en conserve (une expérience que certains ont peut-être fait dans les restaurants chinois qui en proposent souvent pour le dessert : ceux-ci sont devenus presque insipides et de très peu d’intérêt !).

Par ailleurs, on peut s’interroger sur les conséquences prophylactiques de ce décorticage. On nous parle de « décontamination » mais comment s’effectue celle-ci ? Avec un trempage dans l’eau de Javel ? Sans doute pas… Bien sûr on imagine que les décortiqueurs, avant de se livrer à leur tâche de décortication, ont enfilé des gants en plastique, mais leur est-il possible de changer de gants après chaque fruit dont ils ont manipulé l’écorce potentiellement contaminée ? Et cette écorce que l’on enlève, n’était-elle pas la meilleure protection contre toute contamination ?

Et dire que tout cela est effectué au nom du « principe de précaution » afin de prévenir de prétendus risques d’étranglement ! On aimerait d’ailleurs bien à ce propos que nous soient fournies des statistiques précises sur les « accidents de letchis » survenus ces dernières années. Voilà en tout cas une initiative dont on ne peut dire qu’elle aille dans le sens du développement de la fameuse « autonomie » des jeunes, cette « autonomie » dont on se gargarise pourtant tellement et à tout bout de champ !

Alors, l’exemple réunionnais va-t-il être suivi par les cantines scolaires de la métropole ? Celles-ci, conscientes des risques considérables auxquels elles exposent les enfants qu’elles ont charge de sustenter, vont-elles à leur tour se décider à faire dénoyauter les abricots, pêches et cerises qu’elles leur proposent ? C’est ce que l’on serait content de savoir. Et nos chers écologistes qu’en disent-ils ?

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12 Comments

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  • charles-de , 15 décembre 2014 @ 11 h 02 min

    Mais QUI nous protège de la contamination PAR LA CONNERIE ?

  • montecristo , 15 décembre 2014 @ 11 h 43 min

    Un jour ma boulangère a laissé tomber la baguette de pain qu’elle allait me vendre.
    J’ai voulu la prendre quand même mais elle a préféré la changer en disant que c’était pour ceux qui “ont beaucoup traîné … ! ”
    J’ai répondu : “Mais que croyez vous ? Moi aussi, j’ai beaucoup traîné !”
    Je n’ai jamais pu la convaincre …
    C’était correct de sa part … cependant je sais que d’avoir beaucoup “traîné” protège de beaucoup de bactéries …
    Aujourd’hui, je ne risque plus grand chose …

  • kanjo , 15 décembre 2014 @ 12 h 41 min

    @charles-de
    ça créera des emploi….qu’on payera comment ? sur les cinq ou six euros que coûte un repas à la cantine, il n’y en a que deux pour payer la matière première. Gaspiller une partie de cette somme pour dénoyauter les fruits signifie que soit on n’aura pas asses d’argent pour le reste du repas, soit on devra augmenter le prix de la cantine.
    Par ailleurs, sur le plan nutritionnel, il est fortement recommandé de ne jamais manger les fruits au cours d’un repas, mais toujours au moins deux heures après, ou une demi-heure avant, la présence de nourriture, donc de sucs digestifs, dans l’estomac ayant pour effet de détruire la vitamine C. Et dans tous les cas, de les manger moins de cinq minutes après les avoir décortiqués, pour qu’il y subsiste un peu de cette vitamine C.
    Or l’apport de vitamines est l’unique raison, hors la gourmandise, pour laquelle on mange des fruits.

  • André Pouchet , 15 décembre 2014 @ 14 h 27 min

    Je constate avec satisfaction que beaucoup de ceux qui commentent ici sont, comme moi-même, étonnés, voire scandalisés par les faits que je dénonce. Peut-être seront-ils intéressés par la lecture de l’article de la presse locale qui a fait “tilt” (si je puis dire) pour moi et par le commentaire ironique que j’ai envoyé aux deux quotidiens locaux. Seul La Quotidien me l’a publié.

    13/12/14 – 04h13 – André Pouchet,
    dans Le Quotidien de La Réunion :

    L’assistance, jusqu’où ?

    Je me suis étranglé, non pas en avalant un noyau de letchi, mais en découvrant dans Le Quotidien (page 17) un article absolument sidérant intitulé : « Saint-Paul : deux tonnes de letchis dénoyautées (sic) ». Mon premier mouvement, je l’avoue, fut de vérifier la date du journal. Non, nous n’étions pas encore le 1er avril mais, parait-il, seulement le 11 décembre !

    Dans cet article, en effet, on nous explique sans rire qu’une vingtaine d’intérimaires ont consacré deux jours de leur vie aux « opérations de décontamination, d’épluchage, de dénoyautage et de mise en barquettes » de 2 tonnes de letchis pour assurer le repas de Noël des 14 000 élèves de Saint-Paul !

    Comment, les jeunes Réunionnais seraient incapables d’éplucher eux-mêmes leurs letchis et, pour leur mâcher le travail, il aura donc fallu déployer une brigade de 20 spécialistes ? J’espère que les dits spécialistes embauchés pour l’occasion ont reçu une formation ad hoc et qu’ils sont détenteurs d’un diplôme certifiant leur aptitude à l’épluchage du letchi, une opération, comme on sait, particulièrement délicate et qui ne peut être mise entre toutes les mains.

    Puis-je suggérer que cette équipe d’assistance à la restauration sans risque voie son embauche ensuite prorogée ? Elle pourra en effet être très utile en de nombreuses autres occasions. Par exemple pour retirer les arêtes du poisson et les os de la viande afin d’éviter à ces pauvres demeurés de s’étrangler en ingérant leur cari sans de suffisantes précautions.

    Elle pourra aussi leur venir en aide pour éplucher leur pomme de peur qu’ils ne se coupent en maniant eux-mêmes le couteau, un outil très dangereux, vous savez, si l’on n’y prend garde… Et puis veiller à ce qu’ils ne boivent pas trop vite : ils pourraient, ce faisant, avaler de travers et être victimes d’une « fausse route », ce qui, nul ne l’ignore peut être très grave, voire mortel (j’ai d’ailleurs une tante, moi qui vous parle, qui est morte comme cela).

    Mais, une question se présente à mon esprit tenaillé par une terrible angoisse : est-ce qu’à force de prendre les enfants pour des crétins on ne risque pas de finir pour de bon par les rendre tout à fait crétins ? Je crois qu’il serait judicieux de convoquer d’urgence la cellule psychologique du rectorat pour lui soumettre ce grave problème.

    André Pouchet, le 11 septembre 2014

    http://www.clicanoo.re/453213-saint-paul-letchis-de-noel-pour-14-000-eleves.html

    http://www.lequotidien.re/opinion/le-courrier-des-lecteurs/276859-assistance-jusqu-ou.html

  • Le renard , 16 décembre 2014 @ 2 h 23 min

    Normal ! les idéologues font appel à l’émotion, à l’imagination et non à l’observation .Ils sont en orbite. Encore une fois ils n’ont pas lu Bossuet ” Le plus grand dérèglement de l’esprit, c’est de croire les choses par ce qu’on veut qu’elles soient, et non parce quel’on a vu qu’elles sont en effet “

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